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Harry noua ses boutons de manchette avec soin.

Ron battait le sol de la semelle sans rien cacher de sa désapprobation. Ses tâches de rousseur piquaient son nez et semblaient renforcer tout le mécontentement qui bouillonnait. Ses cheveux roux s'accordaient à merveille avec sa figure empourprée.

— J'arrive pas à y croire !

— Demande à Mione, j'invente rien !

Ron bougonna dans sa barbe avant de reprendre, tout haut :

— Une journée ! On t'écarte une journée, et se figure que ça ira.

— Mione m'a déclaré apte à reprendre le boulot, Ron, je ne suis pas Magicomage et toi non plus, de ce que j'en sais.

Harry ne jubilait pas. En fait, il semblait plus tendu que jamais. Il feignait une assurance qui n'existait qu'en surface.

— Et les supérieurs t'ont autorisé à revenir dès aujourd'hui, compléta Ron d'une voix sourde.

— Phil a insisté pour me laisser sa place, mais si j'avais su que tu allais montrer si peu d'enthousiasme...

— Arrête un peu tes conneries, Harry ! Jouer les innocents, ça te regarde, même si je ne te reconnais plus, mais pas à nous... Merde ! Tu as sorti ta tronche d'innocent à Mione aussi, ou tu l'as mise dans la confidence ?

Il y avait une pointe de jalousie dans la voix de Ron. Décidément, certaines choses n'étaient pas faites pour changer.

— Je ne lui ai rien dit de plus.

Ron planta un regard dur sur Harry. Il prononça, à mi-voix, afin de ne pas alerter les passants qui poursuivaient tranquillement leur route :

— Où est Malfoy, Harry ?

— Je ne sais pas.

— Ai au moins le courage d'assumer tes choix !

— J'en ai assez d'être courageux, irréprochable, Ron. Assez de devoir renvoyer l'image qu'on attend de moi.

— Et tu as choisi de couvrir un criminel... Tu as pas trouvé mieux comme crise de la trentaine, sérieusement ?

Harry s'adossa au mur humide. Le brouillard était froid et recouvrait les parois des maisons de cette désagréable humidité. Même ici, dans les plus beaux quartiers de Londres, les bâtisses n'étaient pas épargnées. Il ferma les yeux. Il voulait la paix autant que le chaos. Chaque décision dangereuse l'étouffait autant qu'elle le libérait des obligations, des responsabilités, du jugement. Il avait besoin de se libérer de tout cela, mais le jeu en valait-il la chandelle ? Draco ne lui avait pas laissé le choix.

— Je me doutais que tu ne comprendrais pas, Ron.

— Raison pour laquelle tu as préféré en confier davantage à Mione.

— On en est encore là, sincèrement ?

Ron se rembrunit. Il avait eu des comportements plus matures que celui-ci et s'il réfléchissait bien, il n'était pas difficile de comprendre pourquoi Harry avait cherché davantage de soutien auprès d'Hermione.

— Où est Malfoy ? réitéra-t-il, un poil plus calmement.

— Je ne peux pas te le dire, admit Harry.

Ron eut un mouvement d'humeur, comme s'il allait abattre son poing sur l'une de ces façades en briques impeccables. Comme si sa colère à lui aussi allait jaillir dans un flot noir, comme celui d'Harry.

— Tu m'as fait peur, hier.

— Je suis désolé.

— On est inquiets, Harry. On est inquiets pour toi.

Alta nocteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant