Une sorte de force invisible me conduit au silence et à l'attente. Nous entendons, autour de nous, quelques voix s'ajouter à la lumière solaire. Rien n'a changé, depuis cette poignée de mains. Je suis toujours aussi marqué par les traces des larmes, tandis que mon immaculée chemise commence enfin à cacher ma peau.
Nathan s'assoit au premier rang sur l'un des bancs en bois et ne dit rien. De mon côté, je m'installe sur les marches du chœur. Je regarde la rosace, en détaille les différentes couleurs. La lumière décline doucement, puisque le soleil atteint petit à petit le zénith. Les reflets se rapprochent donc de la porte.
« Alban... Ce qui est blanc ».
Je fixe désormais mon regard sur Nathan qui, visiblement, continue son chemin analytique latin.
« Une illustration a posteriori de ce que l'on appelle les hommes en blanc ».
Nathan fronce les sourcils. Sur le point d'ouvrir la bouche, je le coupe.
« Je suis médecin. Psychiatre, pour être tout à fait exact. D'où la mention toute particulière de cette couleur.
— Dans un sens, votre profession est assez bien résumée par votre nom. L'homme en blanc, angélique en ce qu'il apporte un message que nous aurions du mal à trouver seul.
— Voici une interprétation tout à fait originale...
— Pardon de ramener tout ceci à la religion mais ... comprenez-moi : vous êtes dans une église et multipliez malgré vous les références... Votre nom à lui seul est une double mention au christianisme.
— Vous êtes tout excusé.
— Je ne m'attendais pas à voir un psychiatre dans une église ! ».
A ces mots, Nathan se décontracte, croise les jambes et prend une pose nonchalante. La remarque deviendrait presque provocante tant sa posture a évolué.
« Les médecins ne sont pas tous athées ou agnostiques.
— Pourtant, vous me semblez l'être, dit-il, amusé.
— Je suis déiste, je crois de plus en plus à une forme de transcendance. Ou plutôt, si je devais être exact, je laisse cette hypothèse ouverte et ne compte pas la refermer.
— Aussi surprenant que cela puisse vous paraître, j'oscille précisément entre l'athéisme et l'agnosticisme, me sourit-il, comme s'il devait me rassurer après m'avoir poussé dans les retranchements de l'intimité.
— Je ne suis pas surpris, ni votre présence, ni vos activités, ni vos paroles ne laissent présumer de votre rapport à la religion ».
Nathan reprend une posture plus classique et laisse doucement sa tête tomber en avant. Il ne s'attendait probablement pas à une telle réponse. Mes proches ont l'habitude que mes méthodes d'écoute et de réaction puissent être mesurées, adaptées, contingentes. Le voici déstabilisé.
« Nous avons tout de même débordé sur des sujets particulièrement personnels, cher Nathan.
— Par ma faute, je vous prie de m'en excuser ».
Le jeune homme se lève et, de nouveau, me serre la main. Je peux désormais le détailler. Je pense qu'il a entre vingt-cinq et trente ans. Il a des cheveux blonds tombant sur son crâne, des yeux bleus perçants.
« Ces lieux sont, par nature, propices à la confession. Je vous avouerais d'ailleurs sans surprise que tel est le cœur de ma profession.
— Est-ce à dire que vous seriez vous-même prompt à la confidence ?
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Le Saint Ange (BxB)
General FictionAlban, psychiatre, connaît un certain succès avec son cabinet. Ses patients sont plus ou moins connus et plus ou moins reconnaissants. Mais le succès professionnel ne se suffit pas à lui-même. Un patient difficile, une vie privée qui s'effrite, Alba...