Chapitre 21

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Un silence s'installe, dans ce qu'il a de plus sain et d'agréable. Celui qui vous oblige à vous arrêter, à regarder en face de vous, à contempler ce qui advient ou à accepter que rien n'advienne. C'est un fait, c'est une réalité. Je sens la pression du crâne de Nathan sur mon épaule, mais je ne dis rien, parce que je n'ai pas envie de parler.

Je ne saurais dire combien de temps a duré cet instant de calme. Comme une virgule, une respiration, la nécessaire inspiration qui manquait à cet échange. Il manque une musique, une litanie. Je repense à l'orgue, aux sons doux mais indispensables que j'écoutais avant l'arrivée de Nathan.

Ce dernier bouge et vient s'assoir à côté de moi de manière plus classique. Toujours sans un mot, je ressens un besoin naître. Comme si, au creux de mon estomac, une lumière advenait. Alors, en dépit de toute considération morale ou même psychologique, j'écoute cet instinct.

Je me décale de quelques degrés, alors que Nathan ne bouge pas. Ma tête la première vient se poser sur son épaule. Le choc de nos os est brutal. Je sens le corps de Nathan sursauter à cette soudaine attaque contre son intimité. Ma main gauche vient rassurer ce corps saisi de surprise en se posant sur son autre épaule.

Mon autre main, quant à elle, rejoint la première. J'enlace ainsi Nathan qui, sans attendre, réagit en venant loger ses mains dans mon dos. Son propre menton vient percuter mon épaule. Le silence règne. Le temps continue de s'écouler tandis que, en cet instant, l'espace n'a plus aucun sens.

Peu importe la distance qui sépare nos corps, peu importe la manière dont ils s'articulent. Ils viennent simplement trouver une place l'un à côté de l'autre. Nous ne sommes alors plus face à face, nous sommes côte à côte. Littéralement. Je pense que certains de nos os costaux sont en contact.

Le verre se brise quand Nathan ouvre la bouche.

« Alban.

— Nathan.

— Je...

— Merci.

— Merci ?

— Pour l'église ».

Je sens qu'une pression s'exerce pour tenter, je suppose, de capter mon regard. Je résiste. Je n'ai pas encore envie de quitter ce moment apaisant. Celui de l'exaltation. Celui de la reconnaissance. Celui de l'acceptation.

« Tu portes ton prénom à merveille.

— Ne te moque pas de...

— Je suis sérieux Nathan ».

Comme si mon cerveau devait envoyer un message au jeune homme pris au piège de mes remerciements, je sens deux, trois larmes perler sur ma joue. Évidemment, leur faible humidité arrive sur la chemise de Nathan qui en ressent la fraîcheur. Plus de résistance possible, Nathan sursaute et me regarde.

« Tu pleures ? Pourquoi ? Alban ?

— Parce que je refuse de te laisser croire que tu as pu jouer un rôle fautif dans ce qui arrive dans ma vie sentimentale.

— Je te promets que...

— Je n'ai pas fini, Nathan. L'amitié que tu m'auras donnée depuis samedi est assurément précieuse. Et je prends la mesure de tout ce qu'elle implique.

— Je n'ai rien fait...

— Tu as été là ».

Désormais, Nathan et moi nous regardons à distance mais sans que nous n'en ayons conscience. Non, à cet instant, il n'y a pas d'écart, il n'y a pas de profondeur, il n'y a pas d'espace. Il y a juste un lien. La découverte. Le renouveau.

Le Saint Ange (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant