Chapitre 26

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Je déjeune avec Sébastien. Il s'agit aussi, alors, de faire le bilan sur notre collaboration. C'est un moment crucial pour notre relation professionnelle mais aussi pour entériner l'empathie réciproque que nous avons l'un pour l'autre. Sébastien arrive avec des plats asiatiques sans que je ne sois informé.

« Pardon, Sébastien, mais pourquoi ?

— Vous m'aviez dit que nous allions déjeuner ensemble, alors je me suis permis de commander chez un traiteur que j'apprécie. J'avais envie de vous faire découvrir mes goûts de ce côté-ci.

— J'en suis tout à fait ravi.

— Où voulez-vous que l'on déjeune ?

— Je pense que nous pourrions monter. Je sais que Benjamin est de sortie, nous ne le dérangerons pas dans son télétravail potentiel.

— Parfait ! ».

A l'instar d'il y a désormais quelques semaines, Sébastien me suit paisiblement dans les escaliers, refusant avec ardeur que je porte ne serait-ce que mon plat. J'ignore d'ailleurs ce qu'il a commandé et espère que sa mémoire concernant mes goûts ne lui a pas fait défaut. Je serais en difficulté si je devais avaler de la viande, à présent.

J'ouvre la porte de mon appartement et je sens une gêne chez Sébastien. Je me retourne et lui souris.

« Vous pensez soudainement à Benjamin, n'est-ce pas ?

— La dernière fois, vous étiez pleinement et totalement séparés. Je n'avais donc pas l'impression de rentrer chez vous deux mais seulement chez mon employeur. Ce qui en soi était déjà un pas assez fou.

— Je sais combien vos précédents médecins étaient distants voire désagréables. Mais, je vous assure, il n'y a aucun problème, entrez.

— Merci, Professeur. En soi, j'ai bien conscience que si vous m'invitez, c'est que vous vous sentez à l'aise avec l'idée. Il me semble néanmoins que votre mari a de nouveau transféré ses affaires, donc...

— C'est exact. J'aimerais cependant poursuivre cette conversation en étant à moins de deux mètres de vous » lui lançai-je alors que je suis arrivé à la cuisine et qu'il n'a toujours pas daigné passer le pas de la porte.

Cette formulation l'amuse et je parviens alors à faire entrer mon secrétaire qui, scrupuleusement, retire ses chaussures et vient poser les différents sacs. Il déballe méticuleusement les plats, les boissons et les desserts et je constate que tous sont composés de viande. Mon regard doit être explicite parce qu'aussitôt, Sébastien prend la parole.

« Il n'y avait que des plats carnés, mais j'ai pensé que vous accepteriez sans doute du poulet, et ce d'autant plus qu'il est mariné et bien assaisonné.

— Votre mémoire est remarquable, Sébastien.

— Si je ne connais pas les habitudes de mon employeur, à quoi bon être son secrétaire.

— Vous n'êtes pas secrétaire particulier, quand même.

— Au regard de vos confidences, je me sens plus proche de vous que de tous les anciens médecins que j'ai connus réunis ».

Suis-je surpris ? Non. La plupart de mes confrères et consœurs négligent complètement le rôle de leurs soutiens du quotidien. Je ne considère pas Sébastien comme un assistant, mais bien comme le secrétaire au sens littéral, celui qui sait les secrets, qui absorbe les confidences, qui est le témoin silencieux d'une vie professionnelle et parfois personnelle tumultueuse ; surtout en ce moment.

« C'est un joli compliment que vous me faites, Sébastien, je vous en remercie.

— Il est sincère, Professeur ».

Le Saint Ange (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant