Naléiss Freeds

Chapitre 14

   Je regardais le paysage de maison en pierre défiler derrière la vitre, sereine. Le visage calme de Nelly s'y reflétait. Il était seize heure trente, on était dans le bus pour rentrer chez nous. C'était notre premier jour de troisième. Nelly et moi étions dans la même classe. Sûrement grâce aux professeurs qui avaient dû tenir tête au père d'Anna qui voulait nous séparer. Plus personne ne le pouvait.

   Nous étions comme des sœurs maintenant. Nous passions tout notre temps ensemble. Et j’étais heureuse que ma famille l'apprécie autant que moi. Surtout ma sœur qui ne voulait plus la lâcher. Elle était venue avec nous pendant les grandes vacances, en camping, au bord de la mer. Ça a été génial !

   En rentrant, on avait fait une semaine d’équitation dans mon centre équestre. Il appartenait à des amis à mes parents. Peu après notre arrivée à Landogne, ils m’y avaient invité et cela m’avait bien évidemment plu. J’avais donc pris l’habitude d’y aller plusieurs fois par semaine, pour monter ou simplement admirer les chevaux. En avril, j’avais assisté aux premiers pas d’Ouragan, un poulain farouche avec les autres mais pas avec moi. Un lien s’était tout de suite créé. Il avait été clair pour tout le monde et les patrons m’avaient chargé de m’occuper de lui, à mon plus grand bonheur. En trois ans, il avait quasiment atteint sa taille adulte, révélant un magnifique étalon noir. Il avait été pour moi une bouffée d’air frais et une source d’apaisement dans les moments les plus durs. J’avais commencé à le débourrer, l’habituant à la longue, au filet, à la selle. Tout c’était merveilleusement bien passé, si bien que j’allais pouvoir commencer à le monter dans quelques semaines.

   Comme à notre habitude, Nelly et moi sommes rentrées par le parc. Mais cette fois-ci, des jeunes hommes attendait devant le chemin de gravier, très louche. Et ils n’avaient pas l'air d'être là pour discuter. Je me suis arrêtée net en voyant un couteau dépasser de la manche d'un d'entre eux.

   Avant de connaître Nelly, je me faisais souvent bousculer ou insulter. Je me prenais aussi quelques coups. Je me laissais faire, car j’avais peur d’empirer les choses. Mais quand Nelly est arrivée, cette situation avait dû changer : il était hors de question qu'elle soit mêlée à quoi que ce soit. Alors je m’étais mise à fuir, pour éviter tout problèmes.

-C'est bien elles.

   La voix du garçon m’a ramené au présent. D'un coup, je suis passée en mode défensive et me suis mise à analyser la situation : ils étaient quatre, des jeunes hommes d'environ dix-sept ans. Tout de suite, j’ai pu identifier le chef de la bande : David Bleak, frère d’Anna Bleak. A coup sûr, c’était elle qui les avait envoyé. Elle devait vouloir me rappeler qu'elle était toujours là, à me pourrir la vie.

-Qu'est-ce que vous nous voulez ? a demandé directement Nelly.

-Ma petite sœur m'a dit que vous lui avez voler cinquante balles dans son sac, donc on va vous donner une petite correction. Comme ça vous y repenserez à deux fois quand vous voudrez l’emmerder.

-Et puis quoi encore ? Si tu crois que je vais gentiment me faire tabasser pour quelque chose que je n'ai pas fait, tu te fourres le doigt dans l'œil !

-Nelly... S'il te plaît, autant éviter les problèmes... Rentrons simplement... l’ai-je supplié en lui tirant le bras.

-Il ne me fait pas peur !

   Elle s'est approchée des garçons et s’est mise en position défensive. Alors, le grand baraqué à la droite de David s’est avancé. Mais il se déplaçait très bizarrement, les yeux injectés de sang. Il est drogué ! ai-je compris. Les autres devaient l'être aussi. C'était encore plus dangereux : personne ne pouvait prévoir leur réaction. Il a tenté un crochet que Nelly a évité facilement puis a reçu un coup de pied dans l'abdomen par celle-ci. Mais deux autres sont venus prêter main forte à leur pote qui avait trébuché en arrière.