Chapitre 11

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Comme nous étions en mission secrète, nous nous entendîmes d'un regard pour ne pas nous servir du matériel devant eux. Je commençai à sortir les ingrédients du placard en attendant que les deux trouble-fêtes quittent la pièce. Ce qu'ils firent en nous souhaitant bonne nuit après avoir passé un coup de balai.

J'allai fermer la porte derrière eux et revins vers nos préparatifs. Fabricio commença les gaufres tandis que je m'attelais au mélange des ingrédients de l'appareil à cake. Nous avions tous les deux besoin d'œufs et de farine, que nous avions mis entre nous. Je connaissais bon nombre de recettes par cœur mais Fabricio avait emprunté celles des sœurs.

Elles avaient un classeur dans lequel les recettes étaient rangées par ordre alphabétique et beaucoup d'entre-elles comportaient des annotations manuscrites de différentes écritures. Sur la recette du tiramisu figurait la mention Fait grossir : remplacer le mascarpone par yaourt à la grecque plus petits suisses plus gélatine. Sur celle du banoffee, on pouvait lire dans une autre écriture : S M-L, on sait que ce gâteau est une bombe calorique mais tant pis ! Interdiction de l'alléger ! Signé S S-M. Tandis que celle des gaufres qu'utilisait Fabricio était annotée en bas de page Bien meilleur en remplaçant la moitié du lait par la bière de chez Émile.

Fabricio, à la lecture de ces notes, se mit à sourire.

« T'aurais pu y croire qu'il y a une guerre gastronomique entre les bonnes sœurs ?? Et qu'elles connaissent un certain Émile qui leur vend de la bière ?? Ça, ça m'intéresse, mais c'est très mystérieux. Ça mérite une investigation plus approfondie...

- On dirait qu'il y a les pro et les anti-restrictions... Quand même, à leurs âges, je n'aurais jamais crû ça... Je pensais qu'elles avaient d'autres préoccupations que de se mettre au régime... Et puis vu qu'elles seront éternellement célibataires... Qui ça va intéresser qu'elles aient quelques kilos en trop ou pas ?

- Je sais pas. Peut-être qu'elles veulent rester belles pour le petit Jésus, à défaut de la mettre dans la crèche... C'est lui, l'homme de leur vie...

- Fabricio ! Un peu de respect ! dis-je en riant. En plus, elles passent la semaine à ne manger pratiquement que des légumes. Une pâtisserie les week-end, c'est quand même pas la fin du monde. En tout cas, il y en a au moins une qui pratique l'ascèse, ça doit être Sœur Marie Lazare d'après les commentaires. C'est vrai qu'elle n'est pas bien épaisse.

- Si ça se trouve, elle fait même de la gym en soutane le soir dans sa chambre...

- Les sœurs, ça ne porte pas de soutane !

Je me mis à rire devant l'incongruité de cette image tandis que la porte s'ouvrit. C'était Maïra qui venait nous rendre une petite visite.

« Hello ! Je viens pour si je peux vous aider...

- Salut Maïra ! Tu peux te mettre avec Fabricio pour faire les gaufres si tu veux. Je m'en sors bien avec mon cake.

- Ok !

Fabricio n'avait même pas réagi au petit coup de pouce que je venais de lui donner car il était trop occupé à dévisager Maïra. Ou plutôt à admirer ses courbes car elle portait un pyjama-short et un débardeur. J'aurais aimé qu'Augustine et Célestin soient là pour profiter de cette scène d'anthologie. Fabricio était complètement déconnecté de la réalité tellement il la regardait intensément. Il était aussi immobile qu'une statue, les mains dans son saladier plein de farine et une expression bête sur le visage. Maïra ne s'en aperçut pas et avant qu'elle ne le réalise, je donnais un coup de coude à mon voisin qui redescendit sur terre en chute libre, car mon coude avait atterri dans ses côtes.

À la recherche de l'homme perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant