Chapitre 8

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Le lendemain matin au réveil, j'étais fraîche et dispose, prête à en découdre avec cette nouvelle journée qui s'annonçait active. Je dormais toujours bien chez mon père, grâce à mon matelas que je chérissais, car il était mou à souhait. Les matelas durs me donnaient mal au dos. Je ne dormais jamais si bien que dans mon lit d'adolescente, dans lequel s'était formé un creux au cours des années. Mon père m'avait déjà proposé de le changer maintes fois mais j'y tenais et n'en voulais pas d'autre. Tant pis s'il y avait une trace de pipi de chat au niveau des pieds, qui datait de l'époque où nous avion notre chat Cornélius.

Mon père, qui ne souhaitait pas lui imposer l'épreuve de la castration car nous avions de l'espace pour qu'il se défoule et vive heureux sa vie de chat mâle avec coucougnettes, ne savait pas à l'époque à quoi il s'engageait, ni moi.

Nous l'avions emmené chez le vétérinaire pour le faire vacciner, après l'avoir adopté chez une voisine. Lorsqu'il nous entretint de la nécessité de prendre rendez-vous pour l'opération, mon père s'opposa, ne voulant pas le forcer à vivre cette étape inutile selon lui. J'étais jeune et tout comme mon père, je n'y connaissais pas grand chose en chats.

Le vétérinaire nous taquina et nous répondit d'un air narquois que nous reviendrions bientôt en courant, dès que Cornélius aurait atteint sa maturité sexuelle. Mon père tint bon et ne transigea pas. Cornélius garderait ses attributs intacts, c'était décidé.

Quelques mois passèrent, notre chat grandissait et était adorable. C'était un chat joueur, farceur et un peu vicieux, mais qui pouvait aussi être une crème à ses heures. Quand vint la fin de l'hiver, mon père se targua d'avoir pris la bonne décision. Tout allait bien, rien ne changeait.

Jusqu'au jour où quelques semaines plus tard, alors que les fleurs commençaient à pointer le bout de leurs pétales, Cornélius se mit à miauler de façon étrange en pleine nuit, à tourner en rond, à monter et descendre l'escalier comme une flèche et à traverser les pièces en courant ventre à terre. Et quand il était en forme, il se servait du mur pour faire demi-tour.

C'était le milieu de la semaine, j'allais au collège et il me fit passer une nuit mémorablement difficile, ainsi qu'à mon père.

Le matin suivant, il s'était calmé et je partis suivre mes cours du jour fatiguée, mais l'esprit tranquille.

Quand je rentrais le soir, mon père était passablement énervé, ce qui ne lui arrivait pas souvent. Cornélius avait passé la journée à tortiller de l'arrière-train le long des murs pour marquer son territoire. Quand mon père était rentré du travail, il avait eu la surprise d'être accueilli de la façon la plus odorante et la plus incommodante qui soit. Il n'avait pas mis longtemps à comprendre, et ni une ni deux, rendez-vous fut pris pour faire ce qui avait été annoncé par le vétérinaire. Mais le temps que vienne ce jour, dont nous avions alors finalement compris toute l'importance, Cornélius avait eu l'occasion de commettre d'autres méfaits, dont celui de se soulager sur mon lit.

Il fallut quantité de vinaigre blanc, de javel et de bicarbonate de soude pour que je puisse à nouveau réutiliser mon matelas sans m'asphyxier. J'avais d'ailleurs dormi plusieurs jours sur le canapé le temps de le désinfecter, de le faire sécher et de l'aérer.

Me remémorer ces souvenirs me fit penser à MacIntosh, qui me manquait à chaque fois que je partais. J'avais souvent des scrupules à le laisser, j'avais peur qu'il manque de câlins et d'affection. Jep aimait les animaux et les chats en particulier, mais je trouvais que personne n'était à ma hauteur pour s'en occuper. Je me levai, ravie de le revoir le jour suivant.

J'arrivai à table habillée, coiffée et prête à sortir. Mon père, qui avait déjà pris son petit-déjeuner et préparé le mien, m'avait laissé un mot sur mon bol en me disant qu'il avait des courses à faire et qu'il me retrouverait en début d'après-midi. Je n'eus pas trop d'efforts d'imagination à faire pour comprendre qu'il était encore parti régler quelque chose avec quelqu'un.

À la recherche de l'homme perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant