Revelio

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« Nous devions nous aimer c'était écrit là-haut. Les âmes sœurs finissent par se trouver quand elles savent s'attendre. »

{Théophile Gautier}

Hermione mit un long moment à retrouver ses esprits après le départ de Tom, au milieu de la matinée. Merlin, que c'était intense. Elle se haïssait d'avoir finalement cédé à la tentation mais elle ne le regrettait pas une seule seconde pour autant. Ce n'était définitivement pas Voldemort, se disait-elle. Ce jeune homme inexpérimenté, dont le simple contact provoquait des étincelles en elle, ne pouvait pas être un assassin sans espoir de rédemption. Et pourtant, il avait déjà tué, sans remords ni regret. Pouvait-il se repentir ? Etait-elle sa moitié perdue, comme il semblait le penser sans jamais le formuler à haute voix ? Allongée sur le lit, le visage tourné vers la fenêtre, la jeune femme massa distraitement ses muscles endoloris. Elle n'aurait pas dû céder, se répéta-t-elle. Elle devait penser à ses secrets. Il ne lui pardonnerait jamais s'il apprenait qu'elle venait du futur, qu'elle avait cherché à l'éliminer et qu'elle savait pour les Horcruxes. Son coeur eut soudain froid à cette pensée. Combien de temps pourrait-elle le lui cacher s'ils continuaient ainsi ? Elle devrait rester loin de lui...

Mais elle ne le pouvait pas. Elle l'aimait, se dit-elle avec une stupeur mêlée de consternation. Elle aimait ses yeux si noirs qui brûlaient d'une chaleur qu'elle ne lui connaissait pas, si loins de ces deux tunnels vides et froids de leur rencontre. Elle aimait ses grandes mains hésitantes mais volontaires avec lesquelles il l'attirait dans ses bras ou lui emprisonnait le visage. Elle aimait son intelligence, malgré sa corruption pour la magie noire. Elle aimait sa détermination, son goût pour le débat, le feu qu'il faisait naître en elle chaque fois qu'il s'approchait, son charme, sa façon de parler, son sarcasme, sa vivacité... Elle l'aimait malgré ses meurtres, sa soif de pouvoir, sa peur destructrice de la mort, sa possessivité. A l'encontre de toute rationalité, elle l'aimait.

Alors, serait-il possible qu'ils soient des âmes-soeurs ? Sa présence à cette époque était-elle réellement une manoeuvre du Destin pour rétablir la balance ? Tom qui n'avait jamais connu l'amour, sa propre mère ayant préféré mourir de chagrin plutôt que d'élever son fils, avait-il fait l'objet d'un oubli aux conséquences dévastatrices ? Et si c'était bien le cas, n'arrivait-elle pas trop tard, maintenant que son âme était déjà corrompue ?

C'était une hypothèse tellement présomptueuse. Qui était-elle pour affirmer être l'instrument du Destin ? Certes, les indices pointaient dans cette direction, Hermione était forcée de le reconnaître, mais relevaient essentiellement de la foi, un domaine qui n'avait jamais été son fort. Et pourtant Harry était la preuve vivante du pouvoir de l'Amour. Elle avait beau retourner le problème dans tous les sens, tout était question de choix et de croyance. Où était son meilleur ami quand elle avait besoin de lui ? Mais penser à Harry l'amena inévitablement au souvenir de Ron. Elle imagina la façon dont son sourire lumineux s'affaisserait en découvrant avec qui elle le trahissait aujourd'hui.

Etre avec Tom était aussi naturel que respirer. Ce qui s'était passé cette nuit et ce matin le confirmaient. Ils étaient parfaitement accordés. Tom n'avait aucune expérience et pourtant, il s'était produit quelque chose. Plus que les conséquences classiques de l'acte charnel, il y avait eu une épiphanie qui s'était produite en elle, ce sentiment que la vie n'avait plus aucun mystère, que c'était cette complétude, cette harmonie qu'elle cherchait depuis toujours. Avec le ralentissement de son rythme cardiaque, ce sentiment s'estompait peu à peu, sans jamais la quitter. Tom avait-il ressenti la même chose ? Lui aussi avait-il eu, un instant, l'étonnante impression d'être maître du monde ?

Avec un soupir, la jeune femme prit sa seconde douche de la matinée, songeant malgré elle au beau visage endormi de Tom et à son bras qui reposait autour de sa taille à son réveil. Elle pensa à sa promesse de ne rien révéler de leur relation et à la façon dont il l'avait capturée une seconde fois, avec un enthousiasme contagieux. Chassant ces rêveries coupables, elle se rendit finalement dans la Grande Salle pour y prendre un déjeuner bienvenu.

Le Temps, cet InconnuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant