Le médecin a du retard. Niall gigote sur sa chaise, incapable de se tenir tranquille. Son pied droit tapote le sol, ses doigts prennent ses genoux pour des percussions. Ma paume se glisse dans l'une des siennes et je capte son attention.
— Niall, ça va ?
Je connais la réponse, mais cette question fuse dans un murmure. Je m'en veux d'avoir demandé ça.
— Ouais...
Il baisse la tête et je le perds de nouveau. Les martèlements continuent.
Vite, trouve autre chose de plus adapté...
— Ça te stresse ?
Pas certaine que c'est mieux...
— On va dire que ça fait pas partie de mes rendez-vous préférés.
J'ai bien compris que le sujet de son traitement reste anxiogène pour lui, même s'il n'y a pas lieu de s'inquiéter. Je ne peux pas me mettre à sa place, mais je peux au moins tenter de le réconforter. Je lui offre un sourire chaleureux, dépose un baiser sur sa joue, puis chuchote près de son oreille :
— Est-ce que je peux faire quelque chose pour t'aider ?
Il me jette un coup d'œil et serre mes phalanges. Ses lèvres s'étirent un peu. Le voir dans cet état me peine et je ne sais pas toujours si je pose les bonnes questions.
— Tu es là, c'est déjà énorme.
Il attrape mon menton entre ses doigts et m'embrasse. Des étincelles éclatent dans mon cerveau et leurs crépitements me traversent de la tête aux pieds. Le baiser ne dure pas, mais nous demeurons front contre front, les yeux fermés. Je profite de cet instant de répit dans l'angoisse du rendez-vous et ralentis ma respiration, dans l'espoir qu'il cale la sienne sur mon rythme.
— Oui, je suis là et, quoi qu'il arrive, je reste avec toi.
Son souffle s'échoue sur mes lèvres et sa chaleur m'enveloppe.
— Merci. Tu n'imagines pas à quel point ça me touche.
Les battements de mon cœur accélèrent. Peut-il les entendre ? Se rend-il compte des frissons qui me parcourent quand il murmure ainsi contre ma bouche ? Près de lui, dans ce cocon d'intimité, c'est comme s'il n'y avait plus personne dans la salle d'attente. On ne se cache plus, et ça fait un bien fou.
— Monsieur Douglas ?
L'appel éclate notre bulle et un vertige fugace me traverse. L'instant m'échappe et une sensation de froid m'envahit quand Niall se lève. Je l'imite et il attrape ma main dans la sienne, réanimant mes pulsations. Nous passons ensemble devant le médecin en le saluant et entrons dans son bureau en le précédant. Je tente de me faire discrète et scrute l'environnement, enfoncée dans un des deux énormes fauteuils en cuir qui tournent, les doigts crispés sur chaque côté de l'assise. Une grande table en bois brut me sépare du siège ergonomique du doc, où s'éparpillent papiers, post-it, sous-main et outils informatiques. Des photos de paysages variés décorent les murs et une bibliothèque propose la lecture d'ouvrages de médecine. Prise dans ma contemplation, Niall capte tout de même mon attention quand, alors que le praticien l'ausculte derrière moi, il me présente en tant que sa petite amie. Ma respiration se coupe une microseconde. Nous n'avions pas encore mis de mots sur notre relation, me sentir déjà exclusive à ses yeux m'apporte un certain réconfort.
Après l'examen physique, les deux hommes viennent s'asseoir. Ils commentent les résultats d'analyse de sang, qui semblent bons de ce que je comprends, puis le généraliste demande des détails.
— Est-ce que vous avez des effets indésirables avec le traitement ?
J'observe Niall qui me jette un coup d'œil, visiblement embarrassé. Ses lèvres sont torturées par ses dents et son pied frappe de nouveau le sol, comme un batteur sur sa pédale. Je pose une main sur son genou et incline la tête pour lui signifier qu'il peut parler sans crainte.
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ღ ℬ𝓸𝓷𝓷𝓲𝒆 ℋ𝓲𝓰𝓱𝓵𝓪𝓷𝓭𝓼 ღ
RomancePositionnez la mécanicienne pétillante près du photographe tourmenté. Déconnectez leur part d'ombre, puis pansez toutes leurs blessures. Réparez leur cœur avec un florilège d'émotions et beaucoup de tendresse. Attisez les braises, jouez sur la frust...