Le contact des chaînes raclant le sol me ramène à moi. Je constate sans grande surprise qu'une fois encore j'ai perdu connaissance et que les chasseurs en ont profité pour me déplacer. La nuit qui règne ici est gelée, ou bien est-ce simplement moi.
L'odeur épouvantable qui règne dans la pièce me donne la nausée. Une chance pour moi, mon estomac est vide depuis si longtemps qu'il réagit à peine. Au milieu du tintement métallique des chaînes, le bruit écœurant d'un grognement humide résonne. Je sais où je suis, du moins je sais avec quelle créature je partage cet endroit. La goule est là. Même si mes oreilles m'indiquent la présence de plusieurs créatures je préfère imaginer que ce n'est qu'un effet acoustique.
Je dois faire un effort immense pour oublier la terreur qu'inspire chaque respiration rauque à mon corps. Cette chose, ces choses, peu importe leur nombre sont attachées. Une pensée qui aurait pu être d'autant plus rassurante si je ne l'étais pas moi aussi. La chaise à disparue, mes pas mes entraves, j'ai beau être couchée au sol et relativement libre de mes mouvements, d'épaisses chaînes me retiennent sur place.
Quand j'essaye de me lever, ma tête me tourne, ma jambe blessée me lance douloureusement et je me retrouve incapable de faire plus de deux pas sans que mes entraves aux chevilles n'arrêtent mon mouvement. Bien. La situation n'est donc pas catastrophique. Mes mains ne sont plus attachées dans mon dos et malgré ma blessure, je suis encore capable de marcher. Reste à régler le problème de lumière qui m'empêche de voir mes adversaires, si tant est qu'on puisse appeler des Goules ainsi, alors qu'on me livre à elles sur un plateau d'argent. Mon plan, du moins l'ébauche d'idée qui a germé dans mon esprit après ma discussion avec la chasseuse, nécessite que je les voie. J'inspire une bouffée de courage.
− Ce serait trop demander d'avoir un peu de lumière ?
Des grognements hargneux répondent à ma question et je dois prendre sur moi pour ne pas me recroqueviller sur moi-même. Ma peau se couvre de frisson, persuadée d'être bientôt déchiquetée par les dents pourries de l'un de ces monstres. Pourtant à ma grande surprise, le plafond s'illumine soudain. Je plisse les yeux, à peine gênée par la lumière blanchâtre émise par une multitude de lampes incrustées dans le plafond. Les Goules, elles, hurlent et s'agitent comme des démentes pour m'atteindre.
Horrifiée, je reste plantée au centre de la pièce et parcourt les créatures des yeux. Pour avoir vu quantité de films de zombies dans ma jeunesse, à l'époque où les pires monstres n'existaient encore qu'à l'écran, je comprends que les Goules en étaient l'inspiration. Des cadavres, de la chair pourrissante, des yeux vides et fous et surtout ces bruits de gorges affreux qui n'ont plus rien d'humain. Elles se tordent et se contorsionnent pour m'atteindre, mais des chaînes, identiques aux miennes, les maintiennent fermement contre les murs. Le bruit terrible de leurs mâchoires qui claquent dans le vide me donne des frissons.
− Et bien tu as l'air de bonne humeur aujourd'hui ! s'exclame une voix métallique au travers d'un haut parleur grésillant. Et si tu me parlais un peu de tes petits copains ?
Je détourne les yeux des Goules et foudroie le miroir sans teint qui me fait face. Camille, la chasseuse est-elle là, au côté de son paternel sadique ? Ou bien n'a-t-elle vraiment aucune envie de me voir dévorer vive ?
J'inspire.
− Alors ?
J'expire.
− Commençons par quelque chose de simple. Sais-tu où comptait se rendre le Berserk ? Va-t-il rejoindre son clan quelque part ? Est-ce un solitaire ? Parle ou bien ceci sera mon dernier avertissement.
J'inspire, faisant fi de l'air nauséabond qui envahit mes poumons.
− Mave... gronde la voix du chasseur.

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Let's Bite
VampireMave doit retrouver son frère. Quoi qu'il en coûte. Mais surtout, elle doit mettre la main sur cet ange qui joue avec sa vie. Une tâche ardue, d'autant plus lorsque les chasseurs s'en mêlent et donnent la chasse au Vampire et au Berserk qui l'accomp...