Chapitre 20

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− Et maintenant ? demande Camille en tournant le dos à la ville, au gouffre et à ces innombrables drapeaux.

Je l'imite en soupirant, difficile d'imaginer le début d'un plan maintenant. À quoi bon d'ailleurs ? Même en pleine possession de nos moyens nous ne parviendrons pas à atteindre l'un des quartiers avant la tombée de la nuit et le début des massacres. Et quand bien même, ce n'est pas comme si nous pouvions y trouver refuge. Camille est humaine, moi aussi, ou du moins j'en ai l'odeur et le sang. D'ici quelques minutes, nous rameuterons tous les maudits vampires de la ville.

− Honnêtement ? je ne sais pas...

− Tu pourrais au moins faire semblant d'avoir une idée.

Je repousse du bout du pied une canette vide et la regarde rouler un instant. Pour ma part je peux simplement attendre que la nuit passe, me faire éventrer par quelqu'un et attendre de me réveiller demain. En supposant qu'aucun démon ne se joigne à la fête. En revanche, je n'ai aucune solution à proposer à la chasseuse.

− Le drapeau le plus près est une sorte de branche de vigne. On peut toujours tenter de l'atteindre, avec un peu de chance on tombera sur une espèce qui ne cherche pas à nous manger.

− Celui d'à côté ressemble fort à une mâchoire, ça ne me donne vraiment pas envie d'approcher.

Je hausse les épaules et m'assoit en utilisant le muret comme dossier. La pierre fraiche contre mon dos apaise momentanément la douleur qui irradie dans mes épaules.

− On peut aussi rester là et tuer tous ceux qui tentent de s'approcher. Mais... enfin tu vois...

− Si ce sont des goules tu les gères. Je prends les autres.

Je ris et sur le moment ça ressemble plus à un couinement qu'à autre chose.

− On n'a qu'à faire un chacun.

− Bonne idée. C'est équitable...

Sa voix s'éteint doucement sur ces derniers mots. Je tourne la tête vers elle et contemple sa jambe ruisselante de sang avec inquiétude.

− Tu saignes encore beaucoup.

− Non ça va... c'était pire il y a quelques heures.

Son teint livide la trahit. Même si en vérité il suffit de regarder son jean imbibé d'hémoglobine pour avoir une idée de la situation.

− Tu en as trop perdu... il faut... il faut faire un garrot.

− C'est trop tard Mave. Tu le sais très bien. Et puis à quoi bon ?

Une sorte de décharge me traverse le corps lorsque je réalise ce qu'elle entend par là. Je chasserais bien les larmes qui s'accumulent dans mes yeux si j'étais encore en mesure de lever les bras sans gémir. Sauf que ce n'est pas le cas. Alors je les laisse couler et irriter ma peau et mon cœur de leur sel.

− Camille...

Elle lève une main et lève la tête en direction du ciel sombre et encore dépourvu d'étoiles.

− Je nous ai conduit dans la gueule du loup. C'est ma faute si on a perdu Ash et Declan et c'est encore ma faute si ces démons nous sont tombés dessus alors ne t'avises pas de culpabiliser. J'aurais dû me douter que le directeur Brom était impliqué dans ce pacte démoniaque. Lui et tous les chefs de notre guilde. C'était évident, mais j'ai préféré me voiler la face.

− Tu ne vas pas mourir, affirmé-je d'une voix tremblante. On survivra à cette nuit.

Un rire léger comme une plume s'échappe de ses lèvres.

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