Chapitre 25

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− Ta confiance en moi m'effraie un peu, j'admets au détour d'un petit parc pour enfants. Tu as conscience que je n'ai aucune idée de l'endroit où on va ?

− Moi ce qui m'effraie c'est que tu nous diriges droit vers les six cours Fae sans le moindre plan.

Je soupire. J'ai bien essayé de me creuser la tête, réfléchir à une approche, un discours, quelque chose qui me vaudrait l'attention des chefs de ce peuple étrange. La seule chose que j'en ai tiré c'est un nœud à l'estomac, un mal de crâne et la désagréable impression d'être stupide. Tryg ne se ferait pas prier pour me le faire remarquer. Il n'était pas très fan de son propre peuple. Je dois dire que moi non plus. Entre les enfants mangeurs d'homme et Tryg lui-même, l'image que j'ai des fées se trouve être assez négative.

− N'hésite pas à participer au brainstorming. Je n'y connais rien moi en Fées.

Je frappe sans grande conviction dans une canette qui heurte le pneu d'une voiture abandonnée un peu plus loin.

− Ce sont des créatures viles et moqueuses. Elles ne nous aideront pas gratuitement.

− Ouah... original ça. Ça nous aide beaucoup merci. Moi qui m'attendais à trouver de gentils petits lutins ailés.

Il me dévisage un instant, incertain.

− Era a dit que tu voyageais avec l'une d'entre elles. Une fée rejetée par sa cour.

− Ouais... un petit ange, maugrée-je au souvenir de ma dernière conversation avec Tryg.

Une part de moi est toujours furieuse contre lui, mais je mentirais en affirmant qu'il ne me manque pas. Ma gorge se serre un peu en pensant à lui, il m'amène trop près de Ash et Declan. Il me ramène inexorablement à Osen.

− Comment l'as-tu convaincue de t'aider ?

Un bref mouvement dans la rue opposée attire mon regard.

− On l'a kidnappé, puis attaché et enfermé dans un placard. Ensuite j'ai passé un marché avec lui en lui promettant que je le protégerais.

− Toi...

− Moi, affirmé-je, pas vexée le moins du monde par son air dubitatif. Je ne vais pas te mentir, je n'ai protégé personne, mais le cœur y était. Ensuite et bien... je crois qu'on est devenu ami et qu'il y a vu l'occasion de se servir de moi.

J'entraîne Darin avec moi vers la façade de l'immeuble dans lequel j'ai repéré une paire d'yeux curieux. A la manière qu'il a d'hésiter en jetant un regard mauvais devant lui, j'en conclu que je ne suis pas la seule à l'avoir repéré.

− Se servir de toi pour quoi ?

− Tuer quelqu'un...

− Qui ?

Je hausse les épaules. Quelle importance. Celui que je prenais pour mon ami voulais m'utiliser pour commettre un meurtre, il n'y a rien de plus à dire.

− Je vois. Donc tu ne sais ni qui, ni pourquoi, c'est bien ça ?

− Qu'est-ce que ça peut faire ? Je me fiche de ses raisons, on ne manipule pas ses « amis » pour faire ce genre de choses.

Il garde le silence un instant, le regard perdu dans les décombres d'une boutique à quelques mètres de là. Il se masse la nuque, étudie de nouveau le commerce en ruine et finit par s'adosser au mur, les bras croisés.

− Il faut qu'on avance.

− Il faut qu'on patiente.

Je n'aime pas cette idée. La nuit ne tardera pas à tomber et contrairement à la majorité des habitants de cette ville, je n'y vois rien. Encore moins quand le ciel est obstrué d'innombrables nuages opaques et que la ville ne dispose plus d'électricité.

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