Novembre (1)

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Avec Fabien, nous sommes assis à une table de ce qu'on pourrait décrire comme le petit bar de la piscine. Ou plutôt, un espace buvette, bref, cela n'a pas d'importance. Au lieu de nous entraîner, nous sirotons un coca et c'est entièrement ma faute.

– Désolé, je ne sais pas ce que j'ai.

– Bien sûr que si, Mathieu, tu le sais. Tu fais énormément de sport et tu oublies les pauses.

J'étais fatigué en arrivant à la piscine, ce soir, mais je tiens à honorer tous mes engagements envers mes nouveaux potes. Je n'ose pas avouer que je suis épuisé et que j'ai largement surestimé mes forces. Une fois changé et dans l'eau, cela n'a duré que cinq minutes. Je n'arrivais à rien, vraiment, mon corps a fait un blocage et c'est donc pour éviter un accident de type noyade que nous sommes assis à cette table.

– Le matin tu es à la salle avec Irénée, l'après-midi tu cours avec Sébastien et ensuite tu enchaînes avec la piscine. Il faut aussi apprendre à faire des pauses.

– Je sais, mais j'aime toutes ces activités.

– Je me demande quand tu as le temps de bosser tes cours !

C'est vrai que si on regarde de loin, mon emploi du temps ne semble pas me permettre de travailler tous les devoirs que nous avons pour les vacances de la Toussaint.

– Après la musculation, je bosse avec Irénée.

– Quoi ?

– Il m'a demandé d'être en quelque sorte son tuteur.

J'ai la désagréable impression de le trahir en disant cela. Sans doute qu'il ne veut pas que je fasse la publicité de notre petit arrangement.

– Plutôt sympa comme job de vacances.

– Euh, ce n'est pas un job.

– Tu ne te fais pas payer ?

Sa question me choque. Je n'y ai pas pensé un seul instant. Mon unique rétribution est de passer du temps avec un super beau gosse, pour moi c'est amplement suffisant. Il ne faut pas toujours tout ramener à l'argent, il y a des rétributions bien plus grandes.

– Non, c'est juste pour l'aider. Tu ne le dis à personne, hein ? Je pense qu'il ne voudrait pas que ça se sache.

– Pas de problème, Mathieu, le secret sera bien gardé. Je suis un peu vexé de toujours passer en dernier, mais on va dire que tu as tes priorités.

– De quoi tu parles ?

– La piscine c'est le dernier sport que tu cales dans ta journée et là tu arrives complètement épuisé.

Je croyais que ce n'était pas grave, mais apparemment il le prend mal.

– Tu passes beaucoup de temps avec Irénée et tes soirées avec Sébastien.

Il est en train de me faire une crise de jalousie ? C'est un peu exagéré quand même.

– Ils ont plus de temps que toi. Le samedi soir tu pourrais être avec nous pour jouer à la console, mais t'as d'autres préoccupations.

Oups ! Il n'y a pourtant pas d'alcool dans ce coca. Pourquoi est-ce que j'ai dit ça ? D'accord, il m'a un peu agacé à se faire passer pour la cinquième roue du carrosse, je fais ce que je veux de mon temps, je le passe avec qui je veux.

– Qu'est-ce que tu insinues ?

– Rien, je ne sais pas ce que tu fais de tes samedis soir.

– Vraiment ?

Il me regarde droit dans les yeux. Je pensais passer un bon moment, avec un pote, juste à boire un verre. On dirait que lui a bien un objectif en tête, un sujet à évoquer. Et il m'a entraîné sur un terrain glissant sans même que je m'en rende compte.

MathieuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant