Décembre (4)

317 31 5
                                    

Le dimanche, normalement, le déjeuner se prend en famille, avec mes parents. J'ai dû négocier une exception, qui n'a pas été difficile à obtenir. Si ma mère est un peu redescendue de son nuage, commençant à s'habituer au fait que son garçon a désormais des relations sociales, elle est toujours aussi heureuse lorsque je passe du temps avec mes nouveaux amis. Mon père est un peu plus difficile à convaincre, puisque pour lui ce sont les études d'abord. Mais j'ai trouvé le bon rythme et mes résultats scolaires prouvent que rien ne vient perturber mes bonnes notes. Il est donc assez simple de faire un peu ce que je veux, le reste du temps. Je passe un long moment dans la salle de bains, à me préparer. D'abord en me rasant. Certes, il n'y a pas grand-chose à faire à ce niveau, mais je veux être impeccable. Et puis, c'est une sorte de rituel, une manière de se préparer à un rendez-vous important. Les femmes se maquillent, les hommes se rasent, c'est ainsi qu'on entre en quelque sorte dans un rôle, celui de l'être sociable prêt à sortir de chez lui pour rencontrer les autres. En somme, c'est une étape plus psychologique qu'autre chose.

Puis je reste longuement sous la douche. C'est aussi une sorte de rituel. Toutes ces étapes permettent d'entrer dans la peau du personnage que l'on veut présenter à l'extérieur. Là, celui que je veux incarner est le mec digne de passer du temps avec Irénée. C'est la raison pour laquelle je ne néglige aucun détail. Le choix des vêtements ne fait pas exception. Pendant que je me prépare, je me demande si Irénée prend autant soin de lui à ce moment. Il semble toujours parfait, en toute occasion, comme si sa beauté était totalement naturelle et qu'il n'avait rien à faire pour l'entretenir. C'est certainement faux, mais cette idée fait partie d'un joli mythe. J'enfile une veste, m'assure que j'ai bien pris l'essentiel : mon téléphone portable et mon portefeuille. Je sens une petite boule dans mon ventre. Ce que je m'apprête à affronter ressemble fortement à un rencard, même si officiellement il ne s'agit que d'une façon de me remercier pour le tutorat. Certes, je passe souvent du temps seul avec Irénée, mais là la situation est différente. Nous serons à l'extérieur, dans un lieu public et il va falloir faire la conversation, sans le prétexte des devoirs ou de la console !

J'approche timidement de l'endroit du rendez-vous. Je suis impressionné par le lieu.

– Tout ira bien.

Irénée vient d'apparaître derrière moi, parfait comme à son habitude. Sa simple présence me détend totalement. Je n'ai plus qu'à me laisser guider par celui qui connaît déjà tout de cet endroit et de la manière de se comporter dans ce genre de situation. Nous entrons dans le hall de l'hôtel, qui apparemment ne peut pas porter le nom de palace, même si à mes yeux ce serait mérité.

– C'est magnifique !

Le brunch se tient dans une cour intérieure, couverte d'une verrière, et dont les murs sont tapissés de plantes qui n'ont rien d'artificiel. Au centre, une fontaine expulse un mince filet d'eau. Même s'il y a déjà du monde, tout est calme, feutré, l'ambiance est romantique !

– Installe-toi, Mathieu. Dans un premier temps, un serveur va venir nous expliquer les spécialités du jour et prendre la commande nos boissons.

C'est une serveuse qui approche, mais tout le reste se déroule exactement comme Irénée l'a décrit. Ensuite, nous approchons du buffet, laissant le choix entre plusieurs stands où des cuisiniers préparent en direct ce que veulent les clients.

– C'est génial !

– Je savais que ça t'impressionnerait.

– Tu viens souvent ici ?

– Ce n'est que la deuxième fois, mais je trouve que c'est un très bel endroit.

– On se croirait dans un film.

MathieuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant