Mars (4)

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Ce vendredi après-midi, on ne plaisante pas. Certes, pendant les heures de classe on ne plaisante jamais, c'est toujours sérieux. Mais là, on nous force à un exercice, pour notre bien. Le baccalauréat, c'est un objectif, pourtant ce qui importe c'est ce que nous allons faire après. Il faut se décider pour son orientation. Et il faut le faire maintenant, parce qu'ensuite il y aura les révisions pour le grand examen, nous n'aurons plus le temps. Du temps, il en faut pour bâtir un projet solide ! Donc, sous la supervision de notre professeur principal et de la conseillère d'orientation, nous devons dédier cette après-midi à notre projet professionnel, par petits groupes, pour s'entraider. Je ne suis pas le seul à ne pas vraiment savoir ce que je veux faire ensuite...

Notre groupe, c'est évidemment Sébastien, Fabien, Irénée, Valentine et moi. Parce que, pour définir son avenir, il faut être entouré de gens qui nous connaissent.

– Irénée, tu remplis ton dossier assez rapidement.

– C'est clair depuis longtemps. Je vais me taper des études de droit, plus précisément du droit des finances.

– Vraiment ? C'est ce que tu veux faire ?

– Non, si je m'écoutais je me lancerais dans des études de sport, pour devenir coach, voire monter ma propre chaîne de salles de sport. Je suis assez doué, je pense, regardez le résultat sur Mathieu.

Les regards se tournent vers moi. Je suis à la fois gêné d'être pris en exemple et assez fier qu'Irénée estime que j'ai bien progressé.

– Alors pourquoi tu ne te lances pas dans ce domaine ?

– Valentine, tu sais qui est mon père.

Je crois que tout le monde le sait et c'est la raison pour laquelle les autres respectent Irénée, il a le droit de faire un peu tout ce qu'il veut dans cette école.

– À partir d'une entreprise familiale il a réussi à bâtir un véritable empire. Il a passé sa vie à faire grossir sa boîte, qui désormais est connue dans le monde entier. Et moi, je suis son fils unique.

– Il veut que tu prennes sa suite.

– Et je le veux aussi.

– Mais tu viens de dire que tu préfèrerais faire autre chose !

– Mathieu, on n'est pas dans une série télé à deux balles. On m'offre, sur un plateau, un job en or. Bon, je ne dis pas qu'un jour je vais devenir le président de la société de mon père, mais j'ai au moins déjà une place réservée au conseil d'administration. Il me laisse un peu de temps et, à mes vingt et un ans il m'intègrera dans ce conseil. Je ne vais pas faire mon rebelle et me jeter dans une carrière aléatoire alors que je peux réussir assez facilement à me faire une place au soleil.

Je ne le voyais pas du tout comme ça.

– On devrait tous suivre ses rêves.

– C'est une belle phrase, Mathieu, mais on est dans la réalité. Et puis ça ne ferme pas totalement les portes à ce que je voudrais vraiment réaliser. Au moins, j'assure les entrées d'argent et ensuite je serai plus libre de faire ce que je veux, de mes loisirs.

Waouh, je ne sais pas vraiment comment réagir. Je pensais, effectivement, qu'il serait plus rebelle que ça. Je ne peux pas dire que je suis déçu, juste étonné.

– Et toi, Sébastien ? Tu as aussi toutes les qualités pour te lancer dans le domaine du sport.

– Pourtant, je vais faire de la comptabilité.

Mais ce n'est pas possible ! Je connais donc si peu les gens qui m'entourent et dont je suis si proche ? Je les pensais fun, je les voyais avec des jobs innovants, mais en fait ils sont très sérieux.

MathieuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant