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17.

J'avais eu 17 à ma dissertation de français sur le thème « Peut-on être captivé par un roman dont on ne s'identifie pas au personnage ? ». Qu'elle avait été ma surprise lorsque Mme Binard nous avait rendu la copie, une semaine et demi après sa rédaction. Au delà des effets de mon herbe toxique, j'avais aimé écrire cette dissertation. Le joint m'avait permis de me concentrer, et peut être de trouver un peu d'inspiration, mais l'essentiel du travail venait de moi, de ce que je pensais vraiment du thème. Et j'avais eu un réel plaisir à retrouver un intérêt pour un travail scolaire.

Pour autant, je ne m'en étais pas servie à nouveau pour cette raison. Le lycée me m'était en échec, tout comme ma vie en général, mais je ne pouvais entrer dans cette tourmente uniquement pour une question de note.
Bon, j'avoue que lorsque Nathan me tendait le précieux lors de l'une de nos nombreuses heures passées sur les bancs des squares ou dans sa chambre alors que je peignais, rares étaient les fois où je refusais. Mais ça ne faisait pas de moi quelqu'un de mauvais, si ?

- Odraz ?

Je me retournais, cherchant au milieu de l'aller principale bondée du lycée qui avait pu m'interpeller.
Lisa, sa grosse tignasse blonde virevoltant derrière elle, esquivait les lycéens, pour la plupart plongés dans leur téléphone.

- Je t'appelle depuis tout à l'heure, j'ai du suer pour te rattraper.

- J'étais dans la lune.

Nous passions le grand portail en fer du lycée en même temps que la foule d'élèves pressés d'être en week-end et de quitter le lieu.

J'avais l'habitude de m'acheter un truc à manger le vendredi après midi, de me poser seule quelque part. Dans un café lorsque je pouvais supporter les cris de bonheurs des étudiants un vendredi, sur les quais ou sur un banc avec un pain au chocolat quand mon état d'esprit demandait du calme.

Mais en voyant Lisa tourner au même croisement de rue que moi, prenant la même direction, je savais que mon moment de répit du vendredi serait sûrement reporté.

Fronçant les sourcils, je tournais mon regard vers elle, l'interrogeant du regard tout en ralentissant mon rythme en voyant qu'elle haletait.
Lisa était asthmatique, alors même si j'aurais aimé être seule, j'avais un peu de peine pour mon amie.

- Tu rentres pas chez toi ?

- D'accord, dis le moi tout de suite si ça t'emmerde que je sois là.

Je pouffais de rire, sachant très bien le sarcasme dont Lisa pouvait faire preuve, comme elle savait que je n'étais en aucuns cas réticente à sa présence.

- Plus sérieusement, je rentre avec toi chez Nathan.

- Pourquoi ?

- Parce qu'on sort.

Sa phrase me stoppait dans ma marche et Lisa se retournait, m'adressant un sourire mesquin auquel je répondais par un haussement de sourcils.

- Je sors pas ce soir, c'est mort.

- C'est vendredi et on a 16 ans, si on sort pas maintenant on sortira jamais.

- C'est une réflexion tellement idiote que je n'y répondrai pas, j'aurais toute ma vie pour sortir, par contre pour réviser le DS de maths de lundi, ce sera pas le cas.

Lisa m'arrêtait dans la rue, attrapant mon bras et me forçant à me tourner vers elle. Je savais exactement ce qu'elle allait faire : regard de chien battu, sourire enjôleur, attitude rieuse au point que je tombe presque amoureuse de sa joie de vivre.

- Allez, je pourrais pas y aller sans toi.

- C'est avec qui ?

Son sourire s'affaissait quand elle comprenait exactement où je voulais en venir. Un vrai combat de réplique, l'une comme l'autre savions amener l'adversaire sur des terrains très précis. Et en l'occurrence, elle comme moi savions qu'elle passait la plupart de ses vendredis soirs avec le groupe d'amis de son frère, Adrien, qui étaient devenus ses amis étant donné qu'ils n'étaient âgés que de deux années de plus de nous. On refusait souvent avec Nathan, bien que ce dernier appréciait les rejoindre pour se rincer l'œil, les amis de Lisa aimaient le monde de la nuit, et notre minorité d'âge posait souvent problème.

ODRAZOù les histoires vivent. Découvrez maintenant