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Après cette triste révélation, Ken était parti pour me laisser me reposer, et de toute façon, l'ambiance était retombée.

Le lendemain, j'avais fouillé dans les papiers administratifs de ma sœur pour connaître le nom de mon lycée et le communiquer aux garçons par messages. Ils avaient tous été déçus de voir que je n'étais pas inscrite dans leur ancien établissement, mais plutôt dans un lycée qui me semblait stricte et cadré, d'après leurs brèves explications. Mes parents, même à l'autre bout du monde, forçaient pour me faire entrer dans la bonne catégorie, pour que, dans le meilleur des cas, je brille dans mes études, je devienne médecin, notaire ou avocate, comme Armelle.

Nous étions dimanche, et demain je reprenais les cours. Super. Armelle m'avait prévenu qu'elle m'avait gardé son après-midi, pour qu'on aille ensemble m'acheter le nécessaire, et peut être de nouveaux vêtements.

- Tu viens Od' ? On y va.

J'attrapais mon porte monnaie, au cas où, même si elle était censée me payer le nécessaire, enfilais ma veste et fermais la porte en trottinant jusqu'à ma sœur. Si j'étais si heureuse, c'est parce que j'avais étudié à la lettre le programme d'aujourd'hui, et que j'avais pu remarquer que la papeterie où m'amenait Armelle, avait également tout un espace dédié à la peinture, à la broderie, en bref, tout ce qui m'intéresse.

Ma seule angoisse restait ma sœur, qui n'accepterait surement pas de m'acheter quelque chose dans cet espace, où même d'y mettre les pieds. En m'isolant dans mes pensées tout en marchant, je me disais que j'avais envie de montrer ma peinture au plafond de ma chambre à Ken. En temps normal, j'aurais gardé ça pour moi et ne l'aurait montré qu'à très peu de monde, mais Léo n'étant pas présent, je savais que la personne la plus apte à me comprendre et à comprendre mon amour pour cet art serait Ken.

Nous arrivions dans le magasin, remplis de jeunes de mon âge, eux aussi préparant leur rentrée, avec plus ou moins d'enthousiasme. Avec Armelle, nous remplissions notre sac de banales fournitures, cahiers, stylos, trousse et plusieurs fois, à travers les gens et au loin, j'apercevais l'étalage concernant la peinture.

- Dis Armelle, comme on a finit pour mes cours, tu veux bien venir avec moi voir la peinture ? Voyant qu'elle fronçait les sourcils et qu'elle allait refuser, je faisais la tête la plus mignonne possible. Allez, s'il te plait, juste cinq minutes ?

Elle soufflait mais hochait la tête en roulant des yeux. Putain qu'elle était chiante. Avant qu'elle ne change d'avis, je l'attrapais par le bras et la tirais jusque dans le rayon. Alors que je me baladais, dans mon élément et impressionnée par chaque article, mon regard tombait sur un article dans la vitrine qui donnait sur l'extérieur, et il ne me fallu que quelques secondes pour me faufiler et l'atteindre. Les yeux ébahis, la bouche à demi ouverte, je touchais du bout des doigts le coffret. Au yeux d'une personne pour qui la peinture n'est pas la raison de vivre, je devais paraître pour une folle. C'était une grande boîte en bois cirée, et, sur ses plusieurs étages étaient étalés de nombreux tubes de peintures à l'huile, accompagnés d'un livre sur la peinture à l'huile et ses techniques, et de dizaines de pinceaux, de toute forme et de toute taille. Je désirais ce coffret plus que tout. J'attrapais son étiquette, et en la retournant, son prix me fit baisser les yeux et lâcher un long soupir, alors que j'étais toujours à genoux au milieu de la boutique.

- 250 balles pour un coffret avec de la peinture ? Sérieux Od', je t'achète de la gouache si tu veux c'est pareil.

Je sursautais lorsqu'elle me disait cela, au dessus de mon épaule en me sortant de ma contemplation, et lui lançais un regard noir avant de la suivre à l'extérieur de la boutique. Nous nous étions ensuite baladées dans Paris, et j'avais acheté quelques vêtements pour la rentrée.

Dans la soirée, je recevais un message des garçons me souhaitant une bonne chance pour le lendemain. Ça me rendais heureuse de savoir qu'il pensait un peu à moi, je me serai alors vraiment fait des amis. Pour Ken je n'avais pas de toute, malgré nos dix ans de différence, il était sûrement la personne que j'appellerai en premier s'il m'arrivait un problème à Paris, où que je voudrais parler avec quelqu'un dans un mauvais moment. Je me couchais après avoir regardé une dernière fois la route que je devais prendre pour aller au lycée, et surtout après avoir passé une bonne heure à fixer le plafond étoilé.

                
C'était la pause du midi. En cours, je n'avais pas fais de connaissance, il n'y avait pas eu la fameuse présentation gênante devant la classe heureusement, je m'étais fondue dans la masse, et les élèves de ma classe ne m'intéressaient pas vraiment. Aucuns.
En me rendant au self, je passais devant une porte, derrière laquelle je percevais une mélodie de piano et des éclats de rires. Intriguée, j'entrouvais la porte et découvrais un garçon, les cheveux ébouriffés,une chemise avec pleins de motifs multicolores et un noeud papillon, il y avait également une fille, qui courrait autour du piano en lançant en l'air des multitudes de feuilles, qui semblaient être des partitions et des dessins. Je remarquais que la pièce était vraiment petite, le piano prenait une bonne partie de l'espace, et je pus aussi apercevoir un pupitre de peinture. Alors que j'avançais pour mieux observer la pièce, le piano s'arrêtait et tout mouvement dans la pièce se bloquait. Les deux adolescents se retournaient vers moi, et le garçon, avec un grand sourire et un enthousiasme incroyable s'exclamait enfin, resserrant son noeud papillon autour de son cou.

- Bienvenue au Refuge !

ODRAZOù les histoires vivent. Découvrez maintenant