Nous marchions dans les rues illuminées de Paris. Tout était désert, comme une ville fantôme, et pourtant, j'avais l'impression de me sentir bien plus vivante. Pourtant, en temps normal, sans Ken, avec qui je ne risquais probablement rien, ma peur du noir et de la nuit auraient prit le dessus. Mais là, je me sentais bien. Il imposait un certain rythme, traînant ma valise, pour laquelle il avait d'ailleurs fait une crise pour pouvoir la prendre, et me faisait découvrir pour la première fois, Paris de nuit. Il ralentissait pour se mettre à ma hauteur et me lançait un sourire.- Alors, raconte moi un peu.
- Tu veux que je te raconte quoi ?
- Ce que viens tu faire à Paris, pourquoi personne t'y accompagne, tout ça !
Je continuais de marcher à son rythme, en regardant devant moi et en essayant de comprendre quelle serait la bonne réponse à cette question. Mes parents étaient partis vivre en République Dominicaine pour le travail, et moi, j'étais restée en France pour finir ma scolarité. De là, une longue et interminable discussion s'était établie pour décider de qui de mon frère ou de ma sœur allait devoir me récupérer. Ça s'est vite fait, et je n'avais pas eu mon mot à dire. Les deux situations étant radicalement opposées, mon frère, 21 ans en école d'art dans un petit studio de Bordeaux, et ma sœur, 28 ans, avec un CDI, dans un appartement de 62 m2 en plein Paris Sud. Et j'avais beau dire que je voulais rester sur Bordeaux pour mes habitudes, et surtout pour mon frère, personne ne voulait rien entendre. Je devais donc rester ici deux ans, obligatoirement, le temps de ma première et de ma terminale, et surtout, de devenir majeure.
- C'est compliqué, j'abrégeais.
Simple et rapide, j'allais pas tout lui déballer ce soir.
- T'as pas tes parents avec toi ici ? On va chez qui là ?
- Tu poses beaucoup de questions.
- C'est parce que tu réponds à aucunes elles.
- Mes parents sont partis, du coup j'ai du venir habiter chez ma sœur.
Puis le silence s'installait et laissait place à mes pensées, à ma contemplation des lieux et aux bruits de nos pas sur les pavés des trottoirs.
- Est-ce que tes parents sont morts ? Tentait-il, mal à l'aise.
Je m'arrêtais brutalement, lui faisait de même quelques mètres plus tard après s'être rendu compte de mon arrêt. Il se tournait à demi pour me regarder et me lançait un regard insistant.
- Me regarde pas comme ça. Je demandais comme ça, t'as dis que tes parents étaient partis. Allez, avance que je te ramène chez toi.
Je soufflais et avançais plus vite pour me remettre à sa hauteur.
- Ils sont pas morts, juste partis vivre ailleurs.
Il me regardait tout en marchant, il semblait analyser mes expressions faciales avant de tourner à un angle de rue et de concentrer son regard devant lui.
- Et alors, t'as l'impression qu'ils t'ont abandonnés ?
J'haussais les épaules, pas sûre de moi. D'un côte, oui. Tu ne fais pas d'enfants pour te casser à l'autre bout du monde avant leur majorité, avant qu'ils soient prêt à ne plus te voir tout les matins, à la sortie du lycée ou autre. D'un côté, ils m'ont grandement abandonné, mais d'un autre, ils vivent simplement leur vie. Celle ci passe bien trop vite, ils avaient déjà 45 et 48 ans, et l'occasion ne se serait surement pas représentée.
Ils m'avaient abandonné pour ne pas abandonner leur vie à eux, et je ne savais pas si j'étais en droit de leur en vouloir pour ça.
Ken ressortait mon papier, que je lui avais préalablement donné pour qu'il puisse connaître l'adresse, s'arrêtait devant une porte d'immeuble, relisait le papier plusieurs fois avant de se tourner vers moi et de me sourir.
- On y est, t'es chez toi.
Chez moi, pas vraiment.
Je fixais la porte.
- Tu veux que je t'accompagne jusqu'à ta porte ?
Je baladais mon regard entre l'immeuble et lui avant de bouger négativement la tête et de prendre la poignée de ma valise.
- Non, merci, c'est gentil Ken. Merci pour ce soir, je sais pas ce que j'aurais fais sinon, je détournais le regard rapidement, et puis vous étiez cool, merci. Vraiment.
Il me souriait grandement avant de me tendre le bras, le poing fermé.
- Pote ?
Je pouffais, tapais dans son poing et commençais à partir, avant de me retourner, prenant du courage.
- Eh... il se retournait, mains dans les poches, en me demandant de continuer d'un signe de tête, tu crois que je pourrais vous revoir, toi et les gars ?
- T'inquiètes, on a encore pleins de choses à te faire découvrir, on va te faire aimer ta vie d'ici.
Puis, il partait, et je le regardais faire, intriguée par ce personnage charismatique, rassurant et pourtant mystérieux. A mon tour, je rentrais dans l'immeuble et cherchais mon nouveau "chez moi", au premier étage. Je me couchais rapidement, après avoir retrouvé ma sœur et lui avoir trouvé une excuse pour mon retard. Je m'endormais en pensant à mon renouveau ici, à ces garçons, au fait que j'avais vécu plus d'aventure en une soirée à Paris qu'en 16 ans à Bordeaux. Alors, ce soir là, dans mon lit, en regardant le plafond blanc où j'avais collé un polaroid de Léo et moi, je me disais enfin que j'étais sereine, et qu'ici tout changerait.

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ODRAZ
Fanfiction« - Qu'est ce que tu me veux Ken ? - Qu'est ce que je te veux Odraz ? Tu dors à droite à gauche, tu fumes de la weed, tu lâches les cours et tu me demandes ça ? - Mais tu te prends pour qui ? - Pour quelqu'un qui s'inquiète un minimum pour toi ? P...