Épisode 27

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Mais B ne tire pas et, après quelques secondes, Ariane ouvre les yeux.

À quelques pas devant elle, son ennemi lui sourit. Il ouvre la bouche et y introduit le canon de son arme.

Il va se suicider. Ariane hurle.

— Non!

Il rit et glisse le pistolet dans sa ceinture.

La peur a frappé Ariane au ventre. Elle a envie de vomir. Elle tremble tellement qu'elle vacille.

— Je ne me sens pas bien, dit-elle.

— Tu ne veux pas entendre la suite? Comment, moi qui avais quinze ans et regardais le corps de mon oncle adoré se balancer au plafond, je me suis rendu jusqu'ici? Garde du corps et employé de la compagnie qui protège les Poulin, chef d'un groupe de quatre malfaiteurs et ravisseur de la blonde de David?

— Ça ne m'intéresse pas.

Le cœur d'Ariane bat trop vite. Elle a des vertiges. Elle a envie de pleurer.

B se détourne et sort de la pièce. Le criminel chauve apparaît. Avec indifférence, il ordonne à Ariane de le suivre et la ramène à sa chambre.

Des draps, des couvertures et une robe de nuit se trouvent sur le matelas. Ariane demande à aller à la salle de bain, puis elle se change et s'allonge.

Elle essaie de dormir mais en est incapable. L'histoire de l'oncle se répète en boucle dans sa tête et ramène des émotions insupportables qui la font se tourner et se retourner sur le matelas. Les heures passent.

Le matin, quand elle se réveille, elle a accepté l'idée que, peut-être, l'histoire est vraie. M. Poulin est dur en affaires, elle le sait, et il pourrait aller très loin pour le succès de sa compagnie. B est un voleur, un kidnappeur et un menteur, mais sa souffrance était trop grande pour être feinte.

Son comportement est irrationnel, son âme est défigurée par les cicatrices psychologiques. Il a vécu une tragédie, c'est évident.

Si M. Poulin s'est réellement comporté de cette manière, il mérite la prison et Ariane sent un dégoût visqueux monter en elle. Ne pouvait-il pas respecter les droits de l'oncle de B?

Elle ne le connaît pas beaucoup, car il est souvent parti en voyage d'affaires et travaille tout le temps, mais son caractère implacable a parfois mis l'adolescente mal à l'aise. L'homme est habitué à imposer sa volonté aux autres. David est d'une autre espèce. Lui ne sait rien, Ariane en est certaine. Elle le connaît à fond. Jamais il ne dépouillerait une personne vulnérable et jamais il ne l'accepterait. David est semblable à elle et c'est une raison de leur amour.

L'image de son chum l'habite et Ariane sent son cœur fleurir. Celle de B la chasse et le cœur se referme. La haine et la colère le recouvrent, comme la terre recouvre un cercueil.

Ariane ne peut pas lui pardonner son comportement. Son mépris. Ses insultes gratuites, parce qu'elle sort avec David et s'est baignée dans la piscine intérieure des Poulin, le moment où il a pointé son arme vers elle, puis vers lui. Elle a l'impression qu'il a failli tirer. Il est dérangé à ce point-là. Sa folie va le pousser à tout détruire, Ariane incluse, si elle ne parvient pas à fuir.

Le chauve l'amène à la salle de bain, la reconduit à sa cellule et lui apporte un excellent déjeuner, avec beaucoup de fruits, du yogourt, des croissants et du café. Une trentaine de minutes plus tard, B entre dans la pièce et Ariane ressent un frisson de peur et de haine.

Dire que, quelques jours plus tôt, il l'attirait! Maintenant, il la repousse davantage que le plus délabré des clochards. Jamais un homme ne l'a laissée aussi froide.

Le criminel porte des jeans déchirés et un tee-shirt qui dévoile sa musculature athlétique. Le cou est puissant, le visage demeure sensuel et fascinant. Mais il restera pour toujours l'homme qui a feint de se suicider et de tuer Ariane.

Il la regarde sans la voir, comme si un problème le préoccupait. L'enquête policière se rapproche-t-elle de lui? Ariane l'espère. Avec les risques imbéciles qu'il prend, il n'échappera pas éternellement à la justice.

— Qu'est-ce qui me vaut le plaisir grandiose de ta visite? demande-t-elle.

B tient un sac et il en tire des vêtements. Deux paires de pantalons, un chemisier rose, un blanc, deux tee-shirts et des sous-vêtements.

Ariane fige.

— Mais... C'est à moi!

— Entrer dans une maison la nuit ne me pose aucun problème, ricane-t-il. Je suis allé te prendre quelques affaires.

— Mes parents ne t'ont pas entendu?

— C'est plutôt le contraire. Celui qui ronflait faisait trembler la maison. Un de tes grands-parents est une tondeuse à gazon?

— C'est mon père, avoue Ariane. Ma mère dort avec des bouchons.

— Ta petite sœur était réveillée. Il y avait de la lumière dans sa chambre.

Sans comprendre pourquoi, une tristesse grande comme le Brésil envahit Ariane et elle se détourne. Les larmes lui sont venues aux yeux et elle refuse de le montrer à cette crapule.

— J'ai pris un chemisier rose parce que cette couleur te va bien, continue-t-il.

— Je vais mettre le blanc, alors.

— J'ai failli t'amener ta poupée, celle qui est assise dans la bibliothèque. Est-ce que tu joues souvent avec elle?

— Ça m'aurait fait du bien. J'ai besoin de fréquenter des gens stables psychologiquement.

Son ennemi fronce les sourcils et sa bouche se tord de colère, puis il se détend et sourit.

— Tu es incroyable, dit-il.

— Pourquoi?

— Parce que tu es dans une situation très dangereuse et que tu devrais être terrifiée. Et pourtant, tu te défends. Tu as du courage, je dois le reconnaître.

— Si tu savais comme je m'en fous.

Elle ment. Le compliment de B lui a fait plaisir et elle déteste sa réaction.

— Je vais te proposer quelque chose, déclare-t-il. Mes hommes ne voulaient pas, mais j'ai réussi à les convaincre. Ça a été difficile. J'ai été obligé de négocier.

Il explique son offre, qui stupéfie la jeune fille. Incrédule, elle demande à B de répéter, puis l'examine avec attention. Se moque-t-il d'elle? Est-il fou à ce point-là? Qu'est-ce que ça cache?

[prochain épisode: maintenant!]

Protection dangereuse [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant