Protection dangereuse [Terminée]

Épisode 45

Ariane est allongée sur son lit, la porte de sa chambre fermée, et sa tête déborde des événements bouleversants qui se sont produits durant la journée. Presque tous ont été mauvais, et pourtant elle est heureuse.

Elle revoit l'émotion de Julien quand il l'a vue arriver et son regard amoureux après qu'elle a réussi à le prévenir. Elle l'entend dire: « J'ai fait une erreur. Je vais tout arrêter. » « Tout » ne peut être que son plan pour se venger de M. Poulin, il y a consacré sa vie. Est-ce que ça signifie qu'il va se calmer?

« Il m'aime » pense-t-elle. C'est la seule chose qui compte. Et Ariane lui a montré qu'elle est de son bord. Le problème, c'est que M. Poulin l'a constaté lui aussi. Il a regardé Ariane d'un air soupçonneux quand Julien est parti, et d'autres vont comprendre aussi. Mais ce n'est pas important. Elle est capable de vivre avec ça.

Appuyée contre un atlas rouge, dans un rayonnage de la bibliothèque, la poupée contemple Ariane comme elle a contemplé Julien. « Il est venu dans cette pièce me prendre des vêtements » se rappelle-t-elle, et cette pensée l'enveloppe dans un nuage parfumé.

La chambre violette et blanche est magnifique, mais Ariane s'y sent étrangère, comme une coccinelle dans un monde de plastique. C'est ailleurs qu'elle veut être.

Oui, les policiers auront bientôt le signalement de Julien, mais il est capable de se forger une nouvelle identité et de se cacher pendant des années. Ariane caresse le pendentif de la tante, qu'elle a passé à son cou. Peut-être qu'elle pourra s'en servir pour le retrouver quand la pression policière aura diminué?

La pensée de vivre son amour avec lui l'éclaire. D'une manière ou d'une autre, cette histoire va bien finir.

Des cris lui parviennent du corridor et elle sort de sa chambre. Sa mère est là et son père et sa sœur les rejoignent.

— Mme Poulin vient de m'annoncer une nouvelle merveilleuse! s'exclame Caroline. La police a retrouvé les gens qui t'ont kidnappée!

« Non! » pense Ariane.

— Figurez-vous que l'un d'eux travaillait comme garde du corps! Il était ici aujourd'hui! Dans cette maison! Il t'a entendu parler de la nouvelle piste, Ariane, et il a filé comme un rat. Ce qu'il ne savait pas, c'est que la police avait trouvé où il habitait. Ils se méfiaient de lui parce qu'il s'était absenté plusieurs jours après ta fuite. Il était revenu travailler la veille et ils l'ont suivi quand il a fini sa journée... malgré toutes les précautions qu'il a prises!

La peur donne mal au ventre à Ariane.

— Qu'est-ce qui s'est passé?

— Le bandit a rejoint ses complices, la police a tenté de les arrêter et ça a tourné en fusillade. Tous sont hors d'état de nuire, c'est ce qui compte. Ils ont dit à Mme Poulin de ne plus s'inquiéter.

Caroline n'en sait pas plus. Ariane se précipite au rez-de-chaussée, allume le téléviseur et le branche sur le canal de nouvelles.

— ...qui avaient kidnappé la jeune amie de David Poulin...

Sur l'immense écran HD, les images montrent des ambulanciers sortir une civière d'une maison dont la façade est fissurée.

— Ils sont morts! s'écrie le père.

— De mieux en mieux! ajoute la mère.

Ariane se sent, à l'intérieur, s'effondrer.

— Les policiers ont tiré comme des malades, raconte une jeune femme qui passait sur le trottoir. Beaucoup de monde auraient pu être atteints.

— Les Poulin vont enfin vivre normalement! dit sa mère.

— Tu réalises, Ari, dit sa sœur, que tu aurais pu être dans cet immeuble et recevoir une balle perdue?