~ Chapitre 8 Partie II ~

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( Attention ! ce chapitre portant sur une expérience à la guerre/la mort/sexualité peut heurter certaines personnes)

S'il ne s'agissait pas d'une illusion ou du monde de ses rêves, il devait s'interroger quant à Agnès Ducoroy. Il ne pouvait laisser quiconque lui faire du mal. Mais au plus profond de son être, il savait que des personnes désirant ternir Ducoroy n'existaient pas. Non, il devait être emporté par la fatigue. Il ne pouvait dissocier le spéculaire du réel... Ce n'était pas la première fois qu'il vivait des étrangetés inexplicables. Souvent, elles disparaissaient avec le temps. Et c'était ce qu'il ferait. Attendre.


* * *


Il y eu les cris de détresse perdus dans la famine, les plus forts empoignant les plus faibles d'une dangereuse étreinte, la peur marquant le visage de chacun... Agnès l'avait vécue, cette tension de mort et de supplice. Il y avait les pendus ornant les branches d'arbres, les têtes décapitées, les yeux inondés de larmes... Elle se rappelait cette enfance à courir dans les rues d'Orléans tandis que le soleil projetait des particules de poussière aux éclats dorés. Tournant, encore et toujours, sa robe tourbillonnait au vent. 16 ans, attendant patiemment que la mort la prenne, elle aussi. Pourquoi les habitants s'entre-tuaient ? Pourquoi la maladie ne la saisissait-elle pas ?

Puis son père apparût, un jour, entre les cadavres jonchant la porte d'entrée. Il la prit dans ses bras et courut jusqu'à sa monture, la seule que le peuple n'avait pas encore dévorée. Agnès percevait toujours sa gorge sèche et ses lèvres gercées. Son père la tenait fermement près de lui, s'en allant prestement au galop. Leur maison s'éloignait progressivement. Elle n'avait pu quitter des yeux le massacre d'un siège où les feux se multipliaient et les râles des blessés l'angoissaient. Elle savait qu'à seulement deux sur l'animal, ils sacrifiaient d'innombrables vies pour sauver la leur. Et son cœur lui répétait à en saigner qu'elle ne méritait pas de vivre. Qu'avait-elle de plus pour s'enfuir ? Elle n'avait plus aucune âme depuis que sa mère avait été sauvagement assassinée. Lorsque son père avait retrouvé le corps de sa femme, elle était dénudée, et ce fut à cet instant qu'ils se promirent le silence. Il y avait parfois des situations où le moindre mot était tranchant.

Agnès ouvrit les yeux sous l'appel du soleil. Elle se leva du lit avec l'envie de revoir son amie Jeanne. Elle avait perdu des êtres chers... Elle devait profiter de ceux qui lui restaient. Après s'être préparée pour quitter sa chambre, Agnès parcourut les allées du château. Elle fut en peu de temps face aux appartements de Jeanne. Étrangement, elle eut un certain doute, sa main restant immobile devant la porte d'entrée. Elle finit par se résigner à frapper. Son poing rencontra à peine le bois que son amie apparût. Quand elle découvrit Jeanne, elle eut l'impression douloureuse de l'avoir vue il y a une éternité. En si peu de temps, il lui était arrivé tant de choses...

- Agnès ? Je... Attendez-moi un instant, je reviens - s'empressa-t-elle de dire-

La porte se referma. Cependant, Agnès pouvait entendre le son de sa voix. Elle n'était pas seule ? Agnès retînt sa curiosité pour ne pas mettre son amie dans l'embarras. Mais en entendant la voix de cet autre, elle s'en inquiéta. Cette personne ne semblait pas être Robert de Beaufremont. Jeanne allait-elle lui faire part de sa situation ? Elle espérait ne pas avoir perdu la confiance de son amie. Celle-ci finit par ressortir, ayant pris soin de se couvrir. La matinée était fraiche et les deux jeunes femmes marchaient dans les jardins traversés par des vents glacés. Leurs regards parcouraient ce qui les entourait.. Agnès débuta la conversation :

- Je suis désolée pour mon comportement de l'autre jour. J'ai été égoïste, alors que vous aviez tellement à me confier.

- Vous n'avez pas à vous excuser. C'est oublié.

L'AgnèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant