Kylian

5

Nous étions arrivés à la mi-juin lorsque je m'étais rendue pour la première fois à l'hôpital psychiatrique où ma mère était internée depuis un mois maintenant. Nous étions le 16 juin, c'était son anniversaire alors j'avais fait l'effort surhumain de prendre le métro jusqu'à l'énorme bâtiment que je commençais à connaître par coeur. A l'accueil j'avais été saluée par Anne, toujours au même poste, ça faisait également une éternité que je ne l'avais pas vu ce qui était peu étonnant en vu du nombre de visite restreint que j'accordais à ma mère, je lui avais offert un signe de main ainsi qu'un sourire avant d'emprunter le même couloir que d'habitude. J'étais accompagnée d'un agent de sécurité qui avait vérifié mon identité, celui-ci m'avait ouvert la porte de chambre et m'avait laissé entrer en me précisant de sonner s'il y avait un soucis quelconque. Je connaissais déjà le règlement mais j'avais préféré ne rien dire acquiesçant simplement j'avais fais quelques pas en avant pour m'assoir sur une chaise dans l'angle de la pièce le plus loin possible de ma mère qui s'était retournée dans son lit en entendant du bruit et m'avait offert un sourire en me voyant assise ici.

-Ma Kaya... comme tu es jolie. Approche toi que je te regarde ma princesse.

J'avais soupiré et m'étais levée aussitôt sans avoir pu reposer mes jambes, elle avait attrapé ma main me tirant vers le lit sans aucune force ce qui était impressionnant la connaissant, je m'étais alors posée sur le bord de celui-ci pour tout de même reposer mes jambes tandis que ses yeux bleus avaient étudié mon visage avec un semblant attention. Ses doigts s'étaient mis à caresser mes joues alors que je me retenais de partir en courant tant chaque contact était un supplice lorsqu'il s'agissait de celle qui avait fait de ma vie un enfer.

-Joyeux anniversaire, avais-je dis amèrement.

Son sourire s'était élargit mais je voyais bien que ses yeux étaient vides d'émotion, elle ne pouvait cacher cela, elle me voyait mais ne me regardait pas réellement, elle semblait être dans un autre monde probablement à cause de la dose de médicaments qu'on lui faisait ingérer ici pour éviter toute crise violente de sa part. Ses veines étaient bien trop bleues et sa peau beaucoup trop pâle. La voir ainsi me faisait presque de la peine même si j'essayais de ne pas y faire attention, je venais d'ailleurs tout juste de remarquer les quelques cicatrices sur ses joues et ses bras, causées par elle-même il y a un mois, les marques étaient terrifiantes et témoignaient de la violence avec laquelle elle s'était mutilée.

-Ma Kaya, ma douce Kaya... comme tu es jolie.

Et voilà qu'elle se répétait, j'avais levé les yeux au ciel en comprenant que c'était peine perdu et avais sorti un cadre de mon sac pour le déposer sur la petite table à côté de son lit dans lequel se trouvait un cliché de mes parents et moi-même alors que j'étais encore une enfant lorsque je pensais encore que tout irait bien à l'avenir. Elle n'y avait pas fait attention, elle était complètement perdue dans ses pensées, j'avais déposé un baiser sur son front amèrement en ravalant mes larmes et je m'étais levée du lit alors que son visage s'était tourné vers la fenêtre m'oubliant complètement, elle ne se rappellera même pas que j'étais passée j'en étais certaine. J'avais salué l'agent de sécurité qui avait jeté un coup d'œil dans la chambre et avais fini par m'emboîter le pas mais j'étais déjà partie loin, espérant fuir cet endroit le plus rapidement possible. Un sourire à Anne et j'avais quitté le lieu sans me retourner, soulagée. Ça m'avait plus touché que je ne l'aurais pensé, heureusement il faisait un grand soleil dehors ce qui rendait cette matinée plus joyeuse qu'elle ne l'était en réalité. J'avais attrapé mon téléphone qui avait vibré mais il s'agissait d'une notification inutile alors je l'avais remis à sa place et en avais profité pour mettre mon casque sur mes oreilles me concentrant sur ma musique pour penser à autre chose qu'à ma mère. Je ne m'étais pas arrêtée à l'arrêt de métro en bas de chez moi aujourd'hui, j'avais continué sur la même ligne pour rejoindre Elio au restaurant, il savait que c'était une journée compliquée et m'avais proposé qu'on déjeune ensemble pour me changer les idées. D'ailleurs j'avais souris sincèrement pour la première fois aujourd'hui en le voyant attablé sagement, le restaurant était très chic, ça m'avait étonné mais après tout le jeune homme travaillait tellement qu'il pouvait aisément se permettre de venir dans ce genre de lieu même s'il n'était que libraire, j'avais toujours été persuadé qu'il se débrouillait pour faire autre chose à côté en vu de l'argent qu'il dépensait mais ça ne me regardait pas. J'avais déposé un baiser sur sa joue et m'étais assise essoufflée après le trajet que je venais d'effectuer.