CHAPITRE DIX-HUIT - "Tu t'attendais pas à ça, hein ?"

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J'hésite

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J'hésite.

Debout entre les étales de légumes, je mets un temps considérable à décortiquer les ingrédients que je souhaite utiliser pour mon plat. À ma droite, une montagne de courgettes. À ma gauche, une montagne d'aubergines. Les deux cucurbitacées me dévisagent et me jugent. Dans mon délire, je leur imagine des yeux et des paroles, leur prêtant la voix de gourou de Cranson arguant de rejoindre leur secte... ouais, je sais, je vais loin. Trop loin.

Mais je tiens à ce que ce repas soit parfait. Je n'ai aucune prétention, bien entendu. Les rares fois où on m'autorisait à cuisiner, j'étais si empotée que je brûlais tout ce qui passait sous mes doigts.

(Ah, j'étais plus douée avec un archet qu'avec une spatule, c'est clair !)

Cependant, la cuisine a toujours été pour moi une grande source d'admiration. Et de respect. La nourriture ne vient pas toute seule dans l'assiette, malgré ce que j'ai pu croire jusqu'à mes 18 ans, formatée par des parents archi autoritaires et dictateurs... non, j'ai appris à la dure que si l'on veut manger et donc survivre, il fallait mettre la main à la pâte. Dans ce bas monde, rien n'est gratuit.

Je prends donc le temps de me décider, sachant que celui pour qui je vais confectionner ce plat est mon petit-ami. Je ne veux pas me rater. La cuisine est comme une partition : on y ajoute des notes, on les mélange, et on forme une mélodie. La mienne ce soir représentera tout ce que je ne peux pas dire à mon amant.

(Alors ouais, je mets trois plombes à choisir entre courgette et aubergine, que personne ne vienne me faire chier ! C'est une décision cruciale.)

J'en suis là de mes réflexions, les yeux faisant des aller-retour entre la pile de droite et la pile de gauche, quand un corps se colle à mon dos.

Une vague de frissons désormais familiers remonte le long de mon épine dorsale que je ne suis plus sensée sentir, mes cils papillonnent et mon cœur entame un tango dans ma poitrine alors que des lèvres effleurent la fine parcelle de peau sous mon oreille. Un souffle chaud emprisonne mes sens et les démultiplie, y susurrant d'une voix de crooner ultra sexy :

Si tu compares les tailles, ma belle furie, sache que la plus grosse est juste ...

Je manque de m'étouffer de rire quand Daryl saisit ma main pour la poser contre son entrejambe.

(Une demie gaule, hm ?)

Je ravale cependant mon fou rire en surprenant le regard atterré et outré de la petite vieille juste à côté de nous, en train de fouiller dans une pile de poivrons. Je lui offre un sourire - crispé - avant de brutalement enlever ma main de la petite bosse qui étire le pantalon de mon imbécile de copain.

Bordel, Daryl ! On est en plein milieu du rayon fruits et légumes !

Et bien quoi ? Tu voulais attendre qu'on soit entre les saucisses et les gigots ?

~ Mi volcàn ~ (Is It Love? Daryl Ortega)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant