Occupé à me battre avec ma machine à café qui avait décidé de rendre l'âme sans prévenir, j'avais perdu la moitié de ma matinée. Heureusement que j'étais à jour dans tous mes projets, ou bien j'aurais dû charbonner toute la nuit pour rattraper mon retard.
Je jetai un coup d'œil mauvais à ma tasse.
Au moins, c'était bon. Faire venir les grains d'Amérique du Sud était clairement une décision que je ne regrettais pas. Après avoir quitté l'armée, j'avais mis un moment à retrouver un sens à ma vie, et encore plus à ressentir le goût.
Les rations dont j'avais eu l'habitude depuis mes seize ans m'avaient grillé les papilles plus efficacement que de l'acide. Pendant une époque, je n'avais rien pu manger sans y mettre une tonne de piment pour commencer à sentir quelque chose.
Heureusement, c'était revenu depuis le temps, assez pour que je ne puisse plus me passer d'un bon café matinal. Les habitudes avaient la vie dure, et je n'étais pas prêt à faire une croix dessus.
Je finis par abandonner ma cafetière réfractaire pour attraper quelque chose dans la cuisine. Le temps passait trop vite, encore plus depuis que j'avais passé la cinquantaine. Merde, mes années d'or étaient clairement derrière moi !
Alors que j'ouvrais un tupperware, un mouvement par la fenêtre me poussa à relever le nez de ce que je faisais. J'étais et je serais toujours un militaire ; mes réflexes ne me quitteraient pas, même dans un coin aussi paisible de campagne.
— Ah, putain, Jess ! marmonnai-je entre mes dents serrées.
Elle venait de sortir de chez son père, à peine vêtue d'un maillot de bain qui ne cachait rien de son corps tonique. Avec ses longues jambes et ses fesses en cœur, elle était sublime, et bien trop nue à mon goût.
Je regardai son dos onduler quand elle leva les bras pour attacher ses cheveux bruns en un chignon qui menaçait de tomber à chaque instant.
J'eus la sale impression d'être un voyeur tandis qu'elle mettait un pied dans la piscine, visiblement inconsciente que quelqu'un la regardait, mais je n'étais qu'un homme. Et puis son père n'était pas là, il fallait bien que quelqu'un veille sur elle.
Et sur ma queue qui ne semblait pas d'accord avec ma volonté de rester loin d'elle.
Les doigts crispés sur ma bouffe, je la jetai un peu trop violemment dans le micro-onde, à l'aveuglette. J'étais incapable de détourner les yeux de la beauté juste en face de moi, si proche que je n'aurais que le proche à descendre pour la rejoindre.
Merde, c'était de la torture ! Pourquoi fallait-il qu'elle me tente alors que je faisais preuve de bonne volonté ?
Jess fit à peine une longueur avant de se poser sur le côté du bassin, les bras croisés sur le rebord. Le visage levé vers le ciel, elle soupira, les yeux clos. Ses traits étaient juste assez tirés pour que je fronce les sourcils.
Quelques jours plus tôt, quand elle m'avait remballé avec l'assurance d'une femme expérimentée, elle n'avait pas eu l'air aussi épuisée. Depuis, la rumeur s'était répandue quant à une chef qui comptait proposer des repas avec des produits locaux.
Le projet avait beau être aussi intéressant qu'ambitieux, si ça lui minait la santé à ce point, il allait falloir qu'elle lève le pied, et vite. J'avais la sale impression qu'elle faisait partie de ces gens qui ne connaissaient pas leurs propres limites.
Ce fut cette certitude qui me poussa à sortir de la cuisine, ma tasse à la main, pour la rejoindre. Si elle n'était pas capable de prendre soin d'elle, j'allais le faire.

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Age Game
RomanceAprès avoir décidé de changer de vie, Jessica Stafford emménage à nouveau avec son père pour quelques temps. De retour dans la ville où elle a grandi, la jeune femme retrouve ses marques, mais aussi et surtout le meilleur ami de son père. Thomas Fai...