Chapitre 33

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Je m'étais attendu à ce que Paul vienne me trouver. D'un côté, j'étais presque étonné qu'il ait attendu aussi longtemps pour se pointer dans mon atelier.

Avec un petit sourire, je reposai mes outils. En levant mon cul de mon tabouret, je savais que je courrais tout droit à la mort, mais je n'avais pas peur. Ça faisait bien longtemps que je ne craignais plus ni la violence ni la fin.

En fait, j'aurais probablement été déçu s'il ne n'était pas venu. Il était mon meilleur ami, mon frère, l'homme que je respectais le plus sur cette planète. S'il fallait lui en coller une pour lui remettre les idées en place, je le ferais.

— J'ai bien fini par croire que tu ne viendrais jamais, lançai-je en lui faisant face.

Les poings serrés le long de son corps, Paul avait exactement l'air de ce qu'il était : un soldat qui n'avait jamais reculé devant le danger. Oh, et celui qui détenait encore le record du plus de mecs couchés dans un tournoi de boxe de notre base.

A l'instant où il me toucherait, j'aurais une chance sur deux de perdre conscience. Voire quelques neurones au passage.

— J'espère que tu te fous de ma gueule, siffla-t-il, son regard si noir que mes doigts me picotèrent. Ma fille ? Sérieusement ?

Il n'y avait aucune réponse adapté à ça, en tout cas aucune qu'il accepterait d'entendre.

Bordel, je l'avais vu plonger dans des rages noires quand Jess avait mentionné un copain pendant ses années d'études. Aucun de ces gamins n'avait représenté une menace, pourtant il avait été prêt à les annihiler.

Paul serait bien moins conciliant avec moi.

— Je peux pas l'expliquer, finis-je par soupirer, c'est juste...

— Ma fille, putain !

Je fis jouer mes épaules pour tenter de détendre les muscles tendus de ma nuque et de mon dos. Peine perdue.

Je ne craignais pas pour ma vie, mais pour l'amitié que je chérissais plus que tout au monde. Je ne pouvais juste pas le perdre, tout comme je ne pouvais pas faire une croix sur Jess. C'était peut-être utopique de vouloir garder les deux auprès de moi, mais c'était ce que je voulais.

Lorsque je redressai le menton, Paul passa à l'attaque. Il ne s'embarrassa pas de feinte ou de délicatesse ; son poing percuta ma mâchoire avec la force d'un camion lancé à toute allure. Ma tête partit sur le côté sous la violence du choc et je m'effondrai contre l'un des établis.

La douleur explosa dans mon flan, si vive qu'elle surpassa celle de mon visage. Merde, si je ne m'étais pas cassé une ou deux côtés...

Soudain, ça n'eut plus la moindre importance. Il suffit que Paul me décoche un nouveau direct dans le ventre, menaçant de faire remonter mon estomac dans ma gorge. La nausée me fit voir des étoiles, ou bien était-ce la sensation que j'allais accumuler les hémorragies internes d'ici peu ?

Au final, qu'est-ce que ça pouvait bien faire, hein ? Il me passa à tabac jusqu'à ce que ma respiration soit sifflante et mon dos pressé contre le sol. Je n'avais aucun souvenir de m'être fait coucher, mais bon, je n'arrivais pas vraiment à réfléchir non plus.

A cheval sur mes hanches, les mains refermées sur ma gorge, Paul serra jusqu'à ce je sois sûr de m'avanouir. Il fallut que mon crâne claque contre le béton pour que la pression s'amenuise légèrement.

— Merde ! cracha-t-il, son regard si flou que j'avais l'impression de me trouver dans un rêve. Tu peux toutes les avoir, pourquoi ma fille ?

La gorge si douloureuse que je ne parvins pas à articuler le moindre mot, je finis par tousser jusqu'à manquer d'en cracher mes poumons. Ah, bordel, il ne m'avait pas loupé ! J'avais de la chance d'être encore en vie, à ce stade-là.

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