Chapitre 13

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J'avais pris l'habitude de partir courir avant l'aube quand je vivais encore à San Francisco. C'était le moment parfait pour sortir seule ; les fêtards étaient couchés et les lève-tôt encore au lit. Il n'y avait personne dans les rues, encore moins des tarés.

Et puis, mon boulot commençait tôt et me laissait lessivée à la fin de la journée. J'avais toujours été incapable de faire du sport en débauchant, alors je m'étais adaptée.

Visiblement, ma nouvelle capacité à faire des grasses matinées avait foutu le camp aussi vite qu'elle était arrivée. Je m'étais réveillée à cinq heures et demie, exactement comme avant, et je ne tenais pas en place depuis.

Si j'avais été seule, j'aurais mis la musique à fond et j'aurais dansé jusqu'à tomber d'épuisement, ou bien j'aurais fait le ménage. Ou la cuisine. Quand j'avais besoin de bouger, je mettais mon esprit en pause jusqu'à ce qu'il soit à nouveau fonctionnel.

Généralement, quelques heures me suffisaient à voir clair à nouveau. Là, ce n'était pas une possibilité, pas si je voulais garder ma tête sur mes épaules. Papa avait tendance à ressembler à un ours enragé quand on le réveillait brusquement.

Alors j'avais enfilé un short, et j'étais partie courir. Si l'heure n'avait déjà pas été risquée à San Francisco, alors à Hamrin... Il n'y avait pas un chat dehors. Même les bêtes dormaient encore et ne se rendaient pas compte de mon passage.

Je n'avais pas tardé à abandonner le béton pour rejoindre les petits chemins de forêt que je connaissais par cœur. J'avais grandi ici ; la moitié de la région était cartographiée dans mon crâne et je ne risquais pas de me perdre.

Et puis, merde, ça faisait un bien fou ! Je pouvais laisser ma musique à fond sans prêter à ce qu'il y avait autour de moi, je pouvais courir aussi vite que mes jambes me le permettaient. J'étais totalement libre et j'avais envie d'en hurler de joie.

Mes pieds frappaient le sol à une vitesse régulière, mettant mes articulations à rude épreuve. Mes os encaissaient les chocs, mes tendons faisaient leur job et, au final, je me sentais bien malgré mes poumons presque douloureux.

Dire que j'avais échangé cette vie contre l'agitation sans fin d'une grande ville... Je n'avais pas de regrets, loin de là, mais ça ne me manquait pas.

J'aurais peut-être dû rester en haut du point de vue plus longtemps. Je n'avais pas envie de rentrer, encore moins pour monter des foutus plans de business. J'attendais toujours les réponses de Riley sur ce que je lui avais envoyé.

Je savais qu'il allait exiger des plans concrets avec des chiffres et tout un tas de variables, mais je n'avais juste pas le courage de m'y mettre. Ça demandait trop de temps, trop d'efforts, et ça n'était pas de la cuisine. C'était suffisant pour que je joue à l'autruche.

Merde, la vie d'adulte, ça craignait salement.

Le souffle court, je contournai une parcelle de forêt ravagée par les exploitants forestiers. C'était inutile de s'acharner à continuer par là ; j'allais finir par perdre une cheville, ou pire. Je n'étais pas assez accro à la course à pied pour ça.

Mon genou protesta quand je rejoignis une parcelle de route. Il avait plu quelques jours auparavant et le sol était détrempé, surtout aux endroits où le bitume foutait tout en l'air. C'était désagréable, douloureux, et définitivement pas ce que je préférais, mais c'était mieux que rien.

De toute manière, je préférais courir au grand air qu'entre des buildings ou sur un tapis de course.

Parvenue sur une longue ligne droite, j'accélérai le rythme, repoussant mes limites jusqu'à ce que mon corps proteste et que je manque de m'effondrer. Même là, je continuai, puisant dans mes forces pour me tirer de mes derniers retranchements.

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