Chapitre 28 - Et maintenant ?

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Toujours avec la lettre en main, mes iris ne cessent de glisser sur chaque mot, en boucle. Je relis les passages que je ne saisis pas, tout en touchant les divers objets éparpillés sur ma table basse. La tonne de paillettes colle à mes habits, décorent mes meubles et mon sol, et ça m'emmerde. Je sais d'avance que je ne pourrais pas m'en débarrasser si facilement. 

J'attrape mon briquet pour enflammer mon calumet. Il est nécessaire pour m'aider à y voir plus clair et me refoutre les idées dans le bon sens.  Avec ces conneries, je ne cligne pas des yeux depuis tout à l'heure, ils sont secs et me piquent. Je m'affale contre le dossier de mon canapé, accompagné de mon papier blanc et je reste paralysé comme un abruti. 

— Isaac : Putain... Fais chier ! 

Avec ce trop-plein d'émotions et de révélations, mes sensations sont intensifiées et mes ressentis sont mitigés. Il y a tellement un mélange de tout que je me sens vide. Vide de penser correctement. Je tire une nouvelle taffe en bloquant sur la trace de ses lèvres rouges en fin de page. En approchant la feuille, j'analyse tous les détails de cette marque qui est faite pour me tourmenter. 

Le plus fou dans tout ça, c'est qu'elle a intentionnellement mis une goutte de son parfum sur sa lettre. C'est certainement pour me faire oublier toute cette notion de distance qui nous sépare, un truc du genre. Et je dois dire que cette odeur de pomme juteuse, de violette poudrée et de vanille musquée m'enivre. Un véritable délice. 

Stop, j'arrête de me shooter à l'essence de ce parfum qui réside dans un putain de courrier ! T'as raison Cali, je ne sais pas quoi penser de tout ça. J'ai pourtant pris quelques précautions concernant l'ouverture de ton colis, mais je n'en ai peut-être pas pris avec toi... J'ouvre mes yeux instinctivement dès l'instant où j'ai compris que mon cerveau partait à la dérive. Ce qui est toujours le cas.

Je lâche la feuille blanche avant de passer mes doigts au travers de ma chevelure. La cendre prête à tomber sur moi, m'invite à me redresser plus vite pour éviter un massacre supplémentaire. Mon regard se fige sur l'échantillon de parfum que Cali m'a offert, le numéro 8. Je pose mon joint dans le cendrier, attrape l'objet et retire le capuchon qui l'emprisonne. 

— Isaac : L'Homme Idéal, tu parles d'une connerie !

Un léger spray part sur mon poigné pour découvrir l'odeur de celui-ci. J'hume à plusieurs reprises cet arôme pour reconnaître de quoi il s'agit. Je dirais que l'amande est plus prononcée que le reste, une touche de vanille et un parfum qui ressemble à du cuir. C'est fort et doux à la fois, mais ça garde une part de mystère.  

« À vrai dire, il représente bien ce que je vois et pense de toi. C'est ce que t'es à mes yeux, en fait. »

Je ne peux pas m'empêcher de m'emparer une nouvelle fois de cette note explicative. Je rallume mon pétard et tire une latte dessus avant de saisir le fameux carnet de voyage, vide, comme moi. Cependant, sa couverture incarne une carte du monde à gratter lors de mes prochaines expéditions. Et je ne peux pas rester insensible face à cette douce attention. 

« En parlant de tes futures aventures, ce carnet est fait pour que tu les intègres ici si l'envie te vient. C'est toujours sympa de garder une trace de ce qui nous donne du baume au cœur. »

L'électricité qui me traverse consume mon corps et mon crâne. J'aimerais dire que à c'est à cause du joint, mais ce n'est pas le cas, même si lui aussi me monte à la tête. Mon départ c'est mon but, alors que toi Cali, tu es mon envie. Et je suis censé faire quoi avec ça, moi ? 

J'imagine très bien la scène où la jolie brune se trouve assise sur mon canapé, à l'intérieur de mes bras, et ce que je lui répondrais à chaud. Ça aurait toutes les saveurs amères d'un bon vieux film aux couleurs dramatiques. 

ALCHIMIE.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant