.11.

315 41 15
                                    

Pdv Kirishima
J'ouvre les yeux avec un mal de crâne terrible. Je geins et perçois un mouvement du coin de l'œil : Bakugo, qui se tourne vers moi, avec un air inquiet qui s'enfonce dans ses pupilles jusqu'à disparaître complètement, en un battement de cil.
Il se penche sans s'approcher.

- Réveillé ?

Je m'étire et grimace sous la douleur.

- Ouais. Il s'est passé un truc ? J'ai mal à la tête.
- Tu t'es cogné, hier. Tu te rappelles pas ?

Je me repasse la soirée de la veille.

- Je suis sorti, j'ai marché, et un homme m'a demandé une pièce. Et après...

Je fronce les sourcils en me redressant pour mieux réfléchir.

- Et après...
- Tu es rentré, et comme il avait plu, le rebord de la fenêtre était glissant. T'as ripé et t'es tombé. T'as un peu saigné, mais c'était rien de grave donc j'ai nettoyé ta plaie et t'es allé te coucher. T'étais un peu dans les vapes, alors ton cerveau a pas dû enregistrer comme il faut.
- Ah ? D'accord. Merci, alors.
- Me remercie pas, vraiment.

Je me lève, et ma vue manque de précision pendant quelques secondes. Je me tiens au lit. Bakugo me scrute. Mon regard se stabilise. Il fait chaud. Je retire mon haut. Bakugo se met dos à moi et s'intéresse à la bibliothèque.

- Tu l'aimes bien, Mina, Bakugo?
- Mh.

J'hausse les sourcils en roulant des yeux. Je soupire dans un demi sourire. Il me regarde par dessus son épaule.

- Quoi ?
- Rien. J'avais remarqué, c'est tout.
- Pourquoi tu demandes, alors ?
- Pour être sûr.
- Pourquoi ?
- Tu parles beaucoup, par rapport à hier.
- Mh.

Il se renfrogne et retourne aux livres. Il en prend un et le feuillette. Il fait claquer sa langue.

- Y a une faute.
- Hein ?
- Dans ton bouquin.

Il regarde la première page. La date d'édition.

- Il est vieux, c'est pour ça. C'est passé, ces infos. Erroné.
- Montre ?

Nous nous rejoignons à mi-chemin de nos positions, au centre de la pièce. Je me penche au dessus des pages. Mon index parcourt les lignes, décortique les mots.

- Effectivement.

Nos épaules se frôlent. Il fait un pas de côté.

Pdv Bakugo
Je referme le ramassis d'erreur et vais le ranger.

- Bakugo ?
- Ouais ?
- Il va falloir que je te présente à mes parents. Enfin, à ma mère. Mon père est en déplacement.

Ma main s'arrête dans son geste. Mon souffle suit le même modèle. Je me concentre pour provoquer ma respiration, qui refuse de se faire toute seule. Le bout de mes doigts tremble. Je me hâte de poser l'objet à sa place avant que ça ne se remarque.

- Non.
- Bakugo, s'il te plaît.
- Ça me plaît pas !!

Je fais volte-face. C'est impossible. Je ne connais pas son plan, mais ça ne peut pas marcher.

- Tu ne peux pas rester ici toute ta vie, il faut que-
- '' Toute ma vie ''?

Je me raidis. Il disait qu'il allait me libérer, me sauver ou je ne sais quoi, mais je suis autant prisonnier ici qu'ailleurs.
Toujours les mêmes schémas.
Au moins, je sais ce qu'il en est. Moi qui cherchais au hasard des indices pour me convaincre qu'il n'était pas quelqu'un de bien, il m'en a fourni la preuve lui-même.

- C'est pas ce que je voulais dire. Si tu veux partir, tu peux. Désolé.

Il se décale pour me laisser la voie libre jusqu'à la porte.
Je ne bouge pas.

- J'veux pas qu'ta mère me voit.
- Je comprends.
- Arrête de faire ça.
- Faire quoi ?
- Faire le gars parfait et super compréhensif alors que tu sais rien. Ça m'énerve.
- Bah énerve toi, c'est pas mon problème. Mais on y va maintenant.
- Hein ? Non. Pas moyen.
- T'as quel âge, pour flipper pour ça, sérieux ?
- Mais ta gueule, tu comprends rien !
- En attendant, moi j'ai pas peur !
- Moi non plus !
- Parfait ! Allons-y alors !
- J'ai dit non !!

Je me jette sur lui et le pousse sur le sol. Je mets ma main sous sa tête pour ne pas que sa blessure se rouvre.
Il m'attrape par le col.

- Et j'ai dit si.

Sa respiration effleure mes lèvres. Je déglutis et le repousse encore légèrement. Je me relève.

- Ouais, ok. Tu voudras pas me lâcher avec ça de toute façon, vu comme tu soûles.
- T'es bien agressif pour quelqu'un qui se fait nourrir et loger.

Il est appuyé sur ses coudes, un sourire en coin. J'hausse un sourcil.

- Pourquoi tu me cherches comme ça ??

Il ouvre ses mains.

- Ça m'amuse. Ça me fait plaisir d'avoir de la compagnie, alors j'en profite.
- T'as déjà Mina, non ?
- Oui, mais elle doit travailler. On se croise plus qu'on ne se voit. C'est rare, que je passe autant de temps avec quelqu'un d'un coup. On n'a pas le temps de se chamailler.

Pdv Kirishima
Il se met en tailleur sur le sol, à moins d'un mètre de moi.

- Pourquoi t'aurais envie de te disputer avec quelqu'un ?
- Je sais pas trop. J'ai besoin de me fâcher un peu des fois, tu vois. Pour extérioriser de temps en temps.
- Hm.
- Tu vois pas ?
- Pas vraiment.
- Comment tu fais, toi, alors ?
- Pour ?
- Te défouler.

Son visage reste neutre, mais le rouge de ses yeux me paraît plus terne, plein de souvenirs que je ne pourrais jamais ne serait-ce imaginer.

- Je sais pas si tu te souviens, mais jusqu'à peu, j'avais la super occasion de casser la gueule d'à peu près n'importe qui. Je pense qu'on peut dire que ça défoule.

Je me mords la lèvre. J'ai tendance à m'emballer, je ne prends pas assez en compte la situation des gens en face de moi.

- Désolé.
- Arrête de t'excuser tout le temps, sinon je vais te casser la gueule, à toi aussi.
- On parie ?

Merde. Je regrette d'avoir lâché ces mots aussitôt qu'ils sortent de ma bouche. Mais il paraît amusé. Légèrement. Il s'appuie sur son genou pour se relever.

- Nan. Je parie pas quand je sais que je gagne. C'est la beauté de l'incertain qui fait l'attirance du pari. Le danger, la crainte de perdre.

Il s'étire. Son tee-shirt remonte juste assez pour découvrir le bas de son ventre. De ce point de vue, lui debout et moi couché, il a vraiment une énergie de supériorité. La lumière du matin qui blondit ses cheveux déjà clairs, qui redessine les reliefs de son corps.
Il n'a vraiment rien d'un monstre.

- J'aimerais que le monde te voit comme je te vois.
- Hein ? Dis pas de connerie, j'pige rien. Tu voulais qu'on aille voir ta mère, non ? Alors bouge au lieu de raconter des broutilles, crétin.

Fire On Fire [Kiribaku] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant