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Pdv Kirishima
Lorsque j'ouvre la porte de la chambre, Mina tient le livre que j'ai rangé une heure et demi plus tôt. Bakugo est à côté d'elle, penchée sur les pages. Ils discutent. Bakugo se retourne avant même que je ne fasse un pas. Les muscles de ses bras se contractent puis se détendent en me reconnaissant. Il a les sens aiguisés.

- Il se passe quoi ?

Mina me remarque à son tour.

- Je lui explique un chapitre.
- Ah. Ok.

Mes yeux passent de l'un à l'autre. Je me sens de trop, d'un coup. L'air m'étouffe.

- Je sors.

Je ne prends pas la peine d'attendre qui que ce soit et joins le geste à la parole. Je prends des virages, des escaliers, des virages à nouveau, jusqu'à être dehors, là où l'ambiance ne comprime pas mes poumons.

Pdv Bakugo
Mes yeux s'attardent sur la porte laissée mi-ouverte.

- Laisse le, il a besoin d'être un peu seul.
- Pourquoi ?

Elle hausse les épaules.

- Il est comme ça, parfois.
- Ah.

Une part de moi voudrais savoir où il va, ce qu'il va faire. Peut-être qu'il retourne à l'arène, peut-être qu'il va chercher quelqu'un d'autre, quelqu'un de plus docile. Peut-être. Et alors, qu'adviendra-t-il de moi ? Je ne suis pas sûr d'avoir une réponse, ou même de la vouloir.
Une tape dans le dos.

- T'en fais pas, va ! Il part jamais bien loin !

Y a une première fois à tout.

Pdv Kirishima
Je laisse mes pieds me guider. Je prends des ruelles dont j'ignorais l'existence, avance vers l'inconnu de la ville. Je croise de nouveaux visages, rencontre la misère décrite dans mes livres. La misère dont on ne parle pas de vive voix, qu'on enfouie sous des lettres et des mots d'encre noire sur des pages jaunies par le temps. Le cœur de la ville, le vrai. Les regards vidés par le travail acharné d'une vie qui ne permet aucun plaisir, qui me suivent. Et je sens, au fond de moi, que je ne fais que les regarder, que je ne les vois pas, pas vraiment. Je ne pourrai jamais les comprendre, de la même façon qu'ils ne me comprendront jamais. Et dans ces joues creuses, dans ces maigres corps, je reconnais Mina, Denki, Sero, et tous les autres employés de la famille. Peut-être, juste peut-être, que sans nous, ils seraient là. Si Denki n'était jamais tombé au parc, si Mina n'avait pas rit, si Sero ne m'avait pas dit de me taire. Si je n'avais pas été autorisé à sortir, ou à ressortir.
Et je ne me sens pas fier. Je ne me sens pas comme un héro. Je me sens ridicule, de n'être à ma place qu'à cause, que grâce à ma naissance. Je suis né riche, et j'ai grandi ainsi. Mes ennuis les plus importants se résument à recevoir une éducation par des professeurs que je juge ennuyants, à faire un caprice pour pouvoir m'approprier un nouvel et inutile objet.
Une main ouverte et tremblante apparaît sur ma droite, à hauteur de mon genoux. Je m'arrête, perplexe. La frêle silhouette est recouverte d'une épaisse cape débraillée. La voix chevrotante de l'homme perce le silence de la nuit tombante.

- Une pièce...?

Mes paupières se relèvent légèrement, de surprise. Je suis sorti sans rien sur moi, n'aillant jamais été confronté à ce genre de situation. Je bafouille quelques mots incompréhensibles avant de parvenir à articuler.

- J-Je suis désolé, je n'ai rien...

Sa tête se relève légèrement, et j'aperçois quelques marques, probablement laissées par des coups. Il se redresse légèrement. Il ne me paraît plus si vulnérable.

- Ah ouais ? Et tu veux faire avaler ça à qui, le bourgeois ?

Une douleur aiguë dans ma nuque se propage dans le reste de mes membres. Ma vue se trouble, et je n'entends que le fracas de mon corps lorsqu'il heurte le sol.
Ça brûle. Les ombres dansent devant moi sans que je ne parvienne à les saisir, même du regard. Comme des flammes noires, inaccessibles et inexplicables.

Pdv Bakugo
Le soleil disparaît, et ses derniers rayons teintent le ciel de nuages orangés. Mina est retournée travailler il y a quelques heures déjà, et j'attends depuis. J'ai fouillé un petit peu, mais à part des livres, de l'argent et quelques broutilles inutiles, il n'y a rien ici qui puisse me faire croire qu'il est mauvais. Enfin, la demeure est grande, et je n'ai fait que la chambre.
Il est tout de même long à revenir. J'ai un mauvais pressentiment. J'attrape une cape dans son armoire et regarde avec prudence par la fenêtre. A cette heure, les magasins sont fermés, et les habitants de ce quartiers rentrent se mettre au chaud. Les rues sont vides.
Je fais coulisser la vitre pour me laisser l'espace de me glisser à l'extérieur. La chambre n'est pas à l'étage le plus haut, je ne devrais pas avoir trop de difficultés.
La fraîcheur de la soirée me caresse le dos.
Je tends l'oreille. Quelques disputes derrière les carreaux du voisinage troublent le silence écrasant des rues pavées. Je prends des routes un peu au hasard, en espérant trouver quelque chose d'alarmant, quelque chose qui me rapprochera de lui d'une manière ou d'une autre. Quelques voix sur ma droite. Je les suis. Ce ne sont que quelques femmes qui me sourient au fur et à mesure que je m'approche. L'une d'elles s'avance.

- Bonsoir ! Tu cherches quelque chose ?
- Quelqu'un, en fait.
- Alors tu es au bon endroit ! Le prix dépend du service, mais on fait aussi des tarifs de l'heure, si ça t'intér-
- De quoi tu parles ?

Elle a l'air confuse.

- De sexe ?
- Hein ?
- Tu as dit que tu cherchais quelqu'un.
- Je cherche un... Une connaissance, qui n'est pas rentrée depuis un moment. Je pense qu'il est dehors et qu'il a des ennuis.

Elle échange un regard avec ses congénères.

- Tu ne viens pas d'ici, toi, pas vrai ?
- Pas vraiment. Pourquoi ?
- Tu es dans les quartiers de luxure, ici. Si ton ami est ici, il ne devrait pas être en danger.
- De luxure ?

Elle se racle la gorge.

- C'est un mot plus flatteur pour parler de prostitution.

Je considère leur accoutrement et me trouve stupide de ne pas l'avoir compris plus tôt.

- Ah. Je pensais pas qu'il y en aurait dans une ville aussi bourgeoise.
- Wow, tu viens vraiment du centre, toi. Tu t'es égaré, là. T'es dans la banlieue.
- Ce qui veut dire ?
- Que tu vas découvrir le vrai visage de cette ville. Tu viens de trouver l'entrée des quartiers pauvres. Bienvenue !

Elle écarte théâtralement les bras, et son haut découvre une partie de son ventre. Sa peau porcelaine est tachées de difformes touches de bleu, violet et jaune.
Bienvenue, ouais.

Fire On Fire [Kiribaku] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant