Fire On Fire [Kiribaku]

.27.

Pdv Bakugo
La vérité, c'est qu'entendre Mina l'appeler par son prénom m'a agacé. Moi aussi, je veux pouvoir l'appeler comme ça, en toute simplicité.
Il déglutit, alterne entre ma bouche et mes yeux.
S'il ne parle pas dans les dix secondes qui viennent, je l'embrasse.
Il ouvre la bouche.

- Tais toi.

Il fronce les sourcils, pris de court. Mentalement, le compte à rebours se fait. Lorsqu'il atteint zéro, mes doigts trouvent leurs places entre les siens, et mes lèvres savent elles aussi où aller. Ça ne dure pas plus de quelques secondes, mais ça me suffit pour l'instant.

- Maintenant, parle.

Confus, il étouffe un rire.

- C'est peut-être qu'une fausse rumeur, mais...

Il évite mon regard et soupire de résignation.

- On dit partout que tu vas être de retour dans l'arène.

Un silence.

- Dans combien de temps ?
- Le tournoi est prévu après-demain.

Pdv Kirishima
Il se met à sourire.

- Un tournoi, sérieux ? Autant appeler ça une exécution !
- Tu y as déjà assisté ?
- Jamais. Ceux qui y participent n'en reviennent pas.

Il roule des yeux.

- C'est sans fin. Ils n'ont jamais vraiment laissé tomber et ils ne le feront pas tant que ma tête sera encore attachée au reste de mon corps.
- ... Qu'est-ce que tu veux faire ?
- Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Je vais me battre.
- On ne s'est pas beaucoup entraînés.
- Non, mais on sait que j'ai déjà gagné dans le passé, même si ce n'est pas vraiment moi. Et à cette époque, je n'étais pas un combattant, juste un gosse de riches.
- C'est comme ça que tu me qualifierais, moi qui suis dans la même situation que ton "toi du passé" ?
- C'est factuel, pas insultant.

Je n'ai rien à répondre à ça.

- Mais à ce moment là, c'est contre moi que tu te battais.
- Alors n'entre pas dans l'arène. A aucun moment. Reste hors de la structure et attends moi.

Je pousse son torse avec ma jambe et le déséquilibre juste comme il faut pour renverser les positions.

- Tu crois vraiment que tu peux me demander ça ? Je vais pas faire la potiche en attendant de savoir si tu vas t'en sortir vivant ou non!!
- Tu m'as déjà vu perdre?
- Non, mais je ne t'ai pas vu combattre si souvent non plus.
- Tu veux qu'on tente, là ? Voir si tu me bats?

Son bras bouge brusquement, mais je le maintiens contre le sol. Il perd son sang froid.

- Je veux pas me battre avec toi.

Ce n'est peut-être que dans ma tête, mais j'ai l'impression que ses yeux se sont un peu ouverts et se sont attendris.

- D'accord, alors. Mais fais moi confiance.
- C'est pas en toi que je manque de confiance, Katsuki.

Son genou remonte lentement et son mollet se pose délicatement sur mon dos. Il exerce une pression qui m'attire plus proche de lui.

- Tu vois? Je suis plus fort.

Plus fort, oui, mais le plus fort? Je ne sais pas.
Je lâche une de ses mains. Il la passe dans mes cheveux, sur ma nuque, et me guide jusqu'à ses lèvres.
Je me perds dans son souffle. Ses paroles sont tellement confiantes, je meurs d'envie de le croire.
Mais ses doigts tremblent, et son baiser a le goût du prétexte.

Pdv Bakugo
Je ne veux pas parler. À quoi bon? Je ne peux pas prédire ce qui m'arrivera dans cette arène. Les règles ne sont pas les mêmes, la vie n'a pas la même valeur. La seule vérité commune, c'est que les gestes ont plus d'impact que les mots. On ne déclare forfait que par la mort, et il n'y a pas d'autre issue que la victoire si on veut vivre. Mais vivre grâce aux meurtres des autres ? Je l'ai trop fait. Fermer les yeux et sentir l'odeur des corps en putréfaction, voir leurs yeux se voiler dans les dernières respirations, laissant parfois même transparaître une peur de la fin.
D'autres fois, il n'y a rien du tout. Les pupilles se grisent, les côtes se brisent, mais sous cette carapace de soldat, de combattant, rien. Vide. Tout est déjà mort, consumé par le temps.
Et j'ai peur d'être comme ça, moi aussi. D'avoir été trop longtemps là-bas, de m'inventer des émotions pour me rassurer, de ne pas aimer Eijiro, mais d'aimer l'image qu'il a de moi.
Être humain aux yeux de quelqu'un.
Comment ne pas avoir l'air si malsain à côté de quelqu'un de si franc, de si pur? Comme une tâche sur la toile, je n'ai rien à faire ici.
Ses lèvres se détachent et mon corps se déchire. Mes poumons s'arrachent de ma trachée et s'accrochent à ma cage thoracique pour ne pas s'extraire de ma poitrine. Je cherche les yeux de Kirishima, mais la lumière m'éblouit. Un coup de vent fait claquer le loquet de la fenêtre. Le bruit s'introduit dans mon conduit auditif, remonte jusqu'à ma boîte crânienne et résonne, résonne, et résonne encore. Les mêmes bruits en boucle, qui ne font que s'accumuler.

Pdv Kirishima
Sa main se resserre sur mon avant bras, et je sais déjà que quelque chose ne va pas. Il peine à déglutir. Son regard fuit tout ce qu'il rencontre.

- Bakugo ?

Il ne répond pas.

- Hey...

Je ne sais pas quoi dire. «Tout va bien»? Je ne veux pas mentir. On sait tous les deux que ça ne va pas.
Il plaque soudainement les paumes de ses mains sur ses yeux. Je vois à la contraction de ses épaules qu'il appuie fort, trop fort. Avec son cubitus, il se donne un coup sur le front.

- Doucement!

Pdv Katsuki
Je ne comprends pas ce qui cloche chez moi. Tout avait l'air si simple, tout allait bien, et d'un coup... D'un coup, tout part en fumée. Je ne veux plus vivre dans une illusion, croire en de futiles et stupides espoirs. J'expire, et un peu de rêve s'échappe de mes lèvres. Je n'essaie qu'à moitié de reprendre mon souffle, parce qu'après tout, quitte à mourir, autant le faire maintenant. Hors de question de retourner là-bas, je sais ce qu'il m'y attend, et je ne veux pas de cette certitude.
J'aimerais que mon cœur s'arrête maintenant, ce cœur qui bat plus pour Eijiro que pour moi.
Je n'ai qu'à moitié conscience de ma bouche tremblotante, des larmes sur mes joues. Ses bras s'enroulent autour de moi, parce qu'évidemment qu'il serait là pour me voir dans cet état pitoyable, et bien sûr qu'il essaierait de m'en sortir. Parce qu'il est comme ça. Tellement, tellement lui.
Et moi, je ne fais que le souiller de mon corps, de mes mots.
Je le détruis à petit feu.