Chapitre 4 : Mikhaïl

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"La haine est un carcan, mais c'est une auréole."

Edmond Rostand

La chambre était petite, mal éclairée et surtout mal isolée, située au niveau des combles Mikhaïl ne parvenait pas à supporter les chaleurs infernales de Paris.

Bref, il n'y avait rien d'agréable et d'avantageux à vivre dans ce trou perdu, même les oiseaux étaient insupportables. Le jeune homme avait même l'impression que des horreurs se tramaient en coulisse dans la demeure.

Pourtant, l'hôtel Chouchou n'avait en soi, rien d'effrayant, même ses domestiques étaient agréables (Mikhaïl n'incluait évidemment pas cette Amélia dans le lot, ses longs monologues venaient l'effrayer encore dans ses cauchemars).

Mais, il y avait quelque chose dans cette habitation qui le dérangeait. Peut-être était ce dû au manque d'adultes responsables dans le lieu (son frère et l'ami vampire, ne pouvant pas être compté comme tel, puisqu'ils étaient de vrais incapables).

Il y avait des activités que Mikhaïl excellait grâce sa taille légèrement (il le soulignera lui-même), très légèrement (il soulignera également ses modalisateurs en employant le suivant adjectif) "petite". Des activités, comme l'espionnage (à un niveau très faible évidemment, mais très pratique), ainsi, son frère n'avait presque plus de secrets pour lui. Et, il avait tout entendu lorsque le chasseur était venu, il y a quelques jours de-là. 

L'homme parlait si fort que Mikhaïl s'étonnait que personne n'ait découvert cette organisation secrète à qui, il appartenait. Les clients de l'hôtel devaient non seulement êtres inconscients mais également ignares.

L'enquête avait alors commencé et Mikhaïl était prêt à tout pour découvrir la vérité : qui avait tenté de le tuer. Il était surprenant que Vanitas n'est pas encore fait lien entre ce Chronos et les diverses attaques. 

Un sentiment inexpliqué gonfla rapidement la poitrine du jeune homme, une étreinte presque mortelle semblait provenir de ses émotions chamboulées. La vengeance n'est pas le bon moyen pour trouver la paix de l'âme lui avait on dit. Mais il n'y a pas de catharsis plus puissante...

Quelqu'un était derrière tout ça, quelqu'un de certainement important, au vu du nombre d'affaires chez les humains étouffée : Roland avait expliqué que moins d'une dizaine de personnes avaient disparu, alors qu'en réalité, Mikhaïl avait comptabilisé plus d'une centaine de morts depuis six mois.

Pourtant, le chasseur n'avait rien dit, avait-il menti, ou était-il simplement ignorant de ce fait ?

De nouvelles questions, de nouvelles idées sans réponses, toujours des questions. Sa quête serait-elle toujours sans fin ? Il y avait bien une possibilité, un coupable presque "parfait" qui pourrait répondre à tout ses problèmes. Mais il refusait d'y penser, l'accuser au final aurait été remettre en cause le lien qui l'unissait à son frère. Il  avait déjà du mal à apprendre à revivre avec lui, à le revoir tout les matins (vers 11 heures n'exagérons rien du matin selon Vanitas), et chose incroyable à le voir rire et sourire avec de véritables sentiments derrière (ce satané vampire devait posséder ce "je ne sais quoi" qui était suffisant pour beaucoup, ou du moins pour son frère). Il ne pourrait sans doute jamais s'habituer à revoir le visage de Vanitas heureux, mais il était prêt à s'émerveiller à chaque fois qu'il verrait cette expression. Sans le savoir, ce léger détail lui avait manqué toute son enfance.

Pour démarrer correctement son enquête, il devait interroger cet autre témoin de l'agression. Il devait interroger celle qui ne s'était pas remise dans cette rencontre. Celle qui criait parfois au beau milieu de la nuit, poursuivie par un monstre aux cheveux blancs.

Il arriva sans se presser devant la pièce contenant la malade. Il inspira brusquement doutant pour la première fois de l'issue de son plan. Mais il n'eut pas le temps de se questionner plus, alors qu'une voix masculine demandait d'entrer à l'intérieur.

Le jeune homme s'exécuta, et la vit pour la première fois depuis six mois.

Elle semblait fatiguée, ses yeux autrefois si malicieux étaient aujourd'hui dépourvu de joies. Quelque chose d'autre illuminait à présent son regard, quelque chose de sombre, une lueur presque semblable à la folie. Aux côtés de la malade, Jean-Jacques veillait, d'un air protecteur et chaleureux. S'il avait connu le sentiment, peut-être Mikhaïl aurait-il pu identifier la tendre émotion d'amour qui illuminait les yeux du jeune homme en face de la présence de Chloé.

Il s'en voulait un peu de mener son interrogatoire lorsque son adversaire était si diminué, et le visage de son ami si préoccupé, mais, il était absolument nécessaire de savoir la vérité sur cette affaire. Non seulement pour aider les gens de Paris, mais surtout pour lui-même. Sa tête oscillait entre les besoins croissants de réponse, et la nécessité de rendre son frère heureux, leur ancienne conversation lui revenant en mémoire. 

Alors, il commença ses questions.

﴾ ﴿

Ça avait été plus dur qu'il ne l'avait imaginé, et plus court également. Il n'avait rien appris si ce n'est que l'homme Jean-Jacques était dévoué à cette femme.

Il n'était toujours pas plus avancé dans son enquête et c'est à cet instant qu'il l'aperçu dans le coin de la pièce, le regard perdu vers le ciel sombre de Paris.

Le vampire aux yeux violets était là, un sourire benêt au visage. Il était fou de voir quelqu'un posséder un talent si puissant, et de malgré tout, n'en faire aucun usage utile. Il avait la possibilité de changer les choses, de devenir quelqu'un de puissant, et pourtant il n'en faisait rien. Il préférait reste ce pauvre vampire pathétique et soumis, à la place d'être le seul maître de sa destinée. Il acceptait de se soumettre au désir de son frère (d'être tué par sa main) plutôt que de se rebeller et de l'inciter à sa battre pour sa vie. Le monde était si étrange et injuste : donner tout à quelqu'un qui n'en ferait rien. 

Son expression montrait pleinement le ressentit qu'il éprouvait à l'égard de Noé. Mais l'Archiviste ne semblait pas s'en émouvoir, perdu dans son propre monde de bienheureux. Mikhaïl hésita un instant avant de s'approcher du jeune homme et discuter avec lui, il avait toujours des doutes sur son innocence. Peut-être que s'il était véritablement le coupable, l'humain pourrait lui accorder le fait d'avoir du panache : vivre dans la maison de ses victimes, extra !

Mais avant même qu'il ne puisse prononcer la moindre parole, le vampire l'arrêta d'un simple sourire, et engagea lui-même la discussion :

"-Mikhaïl, te voilà enfin ! As-tu goûté aux desserts de mademoiselle Hortense la nouvelle cuisinière ? Un véritable délice, elle parvient presque à me rappeler mon enfance ! Tu sais, cet air au goût fabuleux de l'Italie ! Comme ce temps là me manque, il n'y avait pas encore de problèmes, et tout semblait innocent." cette dernière phrase eut le mérite d'intéresser au plus au point le jeune Mikhaïl.

Si le vampire évoquait des ennuis, cela voulait sans doute dire que quelque chose le préoccupait, et que quelque chose de mauvais était entrain de se passer. Son argumentation contre le vampire était certes assez hasardeuse, mais renforcée par le sentiment de haine qui étreignait son cœur envers l'Archiviste. L'interrogatoire allait enfin pouvoir commencer... 

Les souvenirs d'un ArchivisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant