Chapitre 9 - Charlotte

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Plus qu'une semaine à bosser et je vais pouvoir profiter de quelques jours de vacances. J'ai hâte, en ce moment au boulot ce n'est pas la joie. On croule sous les dossiers et j'en ai presque mal aux doigts de saisir et saisir des données toute la journée. De plus nous sommes obligés de respecter de nouveaux protocoles de sécurité car apparemment des hackers ont tenté de pirater des informations sensibles. Je me demande bien ce qu'ils peuvent vouloir pirater. Je rentre chez moi vers dix-neuf heures, juste un peu avant l'appel de Fabien. Nous ne nous sommes pas reparlé depuis son message accusateur de samedi, soit trois jours. Lorsque mon téléphone sonne, je décroche en mode vidéo.

— Salut ma puce, comment tu vas ?

— Salut, je réponds avec un grand sourire. Ça va et toi ? Je viens tout juste de rentrer du travail, je suis épuisée. Et toi ? Ta matinée s'est bien passée ?

— Dur dur, on a pris du retard sur notre projet, on va devoir mettre les bouchés doubles.

— Ah mince ! Mon pauvre, tu y passes déjà tellement de temps ! Tu m'as l'air fatigué. Faut que tu te reposes aussi.

J'observe son visage. Il tente de me sourire mais je vois qu'il est épuisé lui aussi. Ses traits sont tirés, et un voile ternit ses yeux bleus d'habitude si pétillants. Puis, chose très inhabituel chez lui, il n'est pas rasé de près. Un chaume sombre creuse son visage.

— Ne t'inquiète pas pour moi ma puce.

— Tu me manques ! je fais.

— Toi aussi tu me manques. Tu me montre ce que tu as en dessous de ton chemisier, demande-t-il avec un petit éclair dans le regard, je suis sûr que ça va me remonter le moral.

Pas un mot sur ma soirée de samedi, ni sur son message plein de reproche du lendemain. Il semble être passé à autre chose, c'est souvent le cas avec lui. Il se fâche sur un sujet et le lendemain tout est oublié comme si rien n'était arrivé. Je ne souhaite pas non plus revenir dessus et risquer de gâcher notre appel du jour, mais parfois j'aimerais qu'on mette les choses à plat ! Les non-dits s'accumulent entre nous. Je n'aime pas le conflit alors je préfère m'abstenir de lancer un sujet houleux.

— T'es où là ? En salle de pause de ton boulot non ?

— Ouais, mais y'a personne ! Tu me fais un petit strip ? Ton corps me manque ma puce...

— Moi aussi, ton odeur, la chaleur de ta peau me manque, avoué-je.

Je commence à défaire lentement les boutons de mon chemisier, en essayant d'être sensuelle malgré un goût amer qui me reste dans en travers la gorge. Je n'ai clairement pas envie de le faire. Mais je vois son regard attiré par autre chose, et il fait un signe de tête à quelqu'un ce qui me coupe dans mon élan. Un mal pour un bien.

— C'était qui avec toi ? dis-je en stoppant mon action directement.

— Rien, c'était Jane, mon assistante, qui me faisait un signe, je vais devoir partir en réunion d'urgence.

— Depuis quand tu as une assistante ? Tu ne m'en avais jamais parlé.

— Si si, je t'en ai parlé !

— Non, je m'en serais souvenue ! répliqué-je surprise.

— Bon, pas grave, je dois te laisser ma puce, on s'appelle dans deux jours. J'irai dans un coin plus tranquille pour que tu me montres ton joli corps. Bisous, mime-t-il avec ses lèvres.

— Bisous.

Je raccroche dubitative. L'appel n'a duré que dix minutes à tout casser, et il a une assistante ! C'est qui cette Jane ? Plus les semaines passent, plus je nous sens nous éloigner. La relation de couple à distance est vraiment compliquée à gérer. Au début, s'était amusant, différent, mais très vite c'est devenu lassant. Surtout que je suis une personne très tactile, j'aime sentir la présence physique de quelqu'un et depuis un an, je me sens terriblement seule. Depuis que l'on est en couple, cela fait quatre ans, avec cette année de virtuelle, on était très physique, on faisait l'amour très souvent. Alors passer de rapports fréquents a plus rien du tout, c'est rude... après cet appel, je me sens déprimée et quand je suis déprimée, j'appelle Audrey. Elle décroche après à peine quelques sonneries.

— Ça va ma poule ?

— Bof... Tu fais quoi ce soir ?

— Rien, j'allais me faire un truc à manger et mater un film.

— Tu viens le mater chez moi ? Je commande des pizzas.

— Si tu me prends par les sentiments. J'arrive, hawaïenne pour moi la pizz. Je prends ce qu'il faut pour dormir chez toi, car j'aurai plus envie de bouger ensuite.

— Oui, c'est mieux.

Audrey est une perle. On se connait depuis le début du collège et tout de suite on a accroché. On avait les mêmes centres d'intérêt, les mêmes trips. On s'est un peu éloignée l'une de l'autre quand j'ai rencontré Fabien à vingt ans. Il ne l'aime pas et m'a petit à petit plus ou moins incitée à m'éloigner d'elle, mais elle est toujours restée pas très loin de moi, et en plus on a eu la chance de trouver un taf dans la même boite.

On profite de la soirée en matant une comédie à l'eau de rose, où des amoureux transis finissent par se marier à la fin, on appelle ça nos films de connasses, que l'on aime regarder les soirs de déprime en s'empiffrant de pizza.

— Putain, j'ai vu ce film cent fois, et à chaque fois je chiale à la même scène, avoue Audrey. Il se sépare alors qu'ils s'aiment, mais aucun des deux n'osent l'avouer. J'ai autant envie de les étrangler que de les réunir.

— C'est clair, c'est toujours aussi émouvant. Mais on sait qu'ils vont se retrouver à la fin.

Moi aussi j'essuie ma larme. Je pleure facilement devant un film, dès qu'il y a des sentiments en jeu.

— Mais bon, y'a que dans les films que ça se passe comme ça ! La réalité est beaucoup moins sympa. Moi je cumule que des rencontres sans lendemain et toi ton mec est à sept mille kilomètres.

— Comme tu dis !

— Ça te dit de venir avec moi samedi voir Mika ? Il m'a promis de regarder un peu ma moto. C'est lui qui faisait toujours l'entretien avant, alors si je peux éviter d'aller au garage.

— Oui je veux bien si ça ne dérange pas.

Kiss me... Good byeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant