Prologue - Gabin

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— Un nouveau jour, et pourtant la même routine, pesté-je en entrant dans la cuisine en traînant des pieds.

C'est le silence dans l'appart, Quentin est déjà parti au taf. J'avoue, ça fait du bien, notre ancien coloc qui nous a justement quitté hier parlait dès le matin. Un enfer pour moi qui ait besoin de boire mon café avant de prononcer un mot. Quoique je ne suis pas le plus loquace la plupart du temps. Ce qui est un comble, étant donné que je suis journaliste.

En m'installant au comptoir de la cuisine, je découvre un post it avec l'écriture de Quentin. C'est vrai que je dois poster l'annonce comme quoi on recherche un nouveau coloc. Je ferai ça ce soir en rentrant du taf, on n'est pas à ça près.

Alors que je mène la tasse à mes lèvres pour enfin me réveiller, on sonne à la porte. L'heure sur le micro-onde m'indique sept heures trente. Qui peut venir à cette heure ? Peut-être que Quentin a oublié ses clés et qu'il lui faut quelque chose dans l'appart ? Étant certain que c'est lui, je ne prends pas la peine d'enfiler des vêtements. Mon caleçon suffit, puis il fait déjà chaud en plus. Vive la fin juillet à Paris.

— Tu penseras à ta tête la prochaine...

Je m'arrête en découvrant non pas mon coloc, mais la concierge sur le palier.

— Madame Chabot ? fais-je perplexe en cachant mon corps derrière le battant. Un problème ?

Elle est âgée, sans doute plus de soixante-dix ans, on s'inquiète toujours avec les autres locataires. Mais je me dis que si elle avait un souci, elle appellerait ou irait sonner aux apparts du premier. On est quand même au sixième. Dans ma tête, je refais toutes les factures à payer, tous les papiers à signer, des potentiels colis à récupérer. On est aux normes normalement. Alors qu'est-ce qu'elle fout là ? Elle est gentille, mais elle peut s'avérer aigrie quand ça ne va pas dans son sens.

— Non, mais je dois te parler, m'informe-t-elle avant de me pousser pour rentrer comme chez elle dans mon appart.

Est-ce qu'elle est sérieuse ? Un de mes joggings traîne sur le canapé, je l'enfile rapidement sous son regard courroucé.

— J'espère que toi et Quentin, vous vous habillerez plus décemment quand votre nouvelle coloc sera là.

Je fronce des sourcils. Cette matinée devient de plus en plus bizarre. Qu'est-ce qu'elle me raconte ? On n'a pas encore décidé qui prendra la chambre libre. Mais sûr on ne choisira pas une fille. Deux mecs et une nana, c'est mal barré.

Je ne fais pas attention à ce qu'elle vient de dire et me dirige vers les placards de la cuisine. Mon café est en train de se refroidir à cause d'elle.

— Je vous sers quelque chose ? Et de quoi vouliez-vous me parler ?

— Non merci et c'est fait.

Elle est conne ou quoi ? Non, Gabin. On ne parle pas comme ça des anciens. Reprends-toi. Imagine, elle te fout à la porte ?

— Je vous demande pardon ?

Elle me fixe comme si c'était moi le problème. Il n'est même pas huit heures et elle vient me retourner le cerveau. C'est plutôt elle, la folle là. Je passe une main dans mes cheveux en soupirant longuement pour me calmer puis d'un ton posé, je demande :

— Peut-on reprendre depuis le début, s'il vous plaît ?

Elle lève les yeux au ciel puis me réprimande du regard. J'ai l'impression d'être un teubé actuellement. Oh putain, j'ai envie de me recoucher là. La journée s'annonce longue. Non, mais c'est ça, ce n'est qu'un rêve !

— Toi et Quentin vous allez accueillir une fille dans votre coloc, finit-elle par récapituler d'un ton ennuyé. Je dirais le mois prochain. Une jeune femme, brune, de petite taille, que tu connais déjà. Vous avez un lien très fort, tous les deux.

C'est de pire en pire, on est d'accord ? C'est de ça qu'elle voulait me parler ? Mais d'où ça sort ? Je saisis vivement ma tasse de café et avale une longue gorgée pour me réveiller. Non, elle est toujours là. Ce n'est pas un cauchemar. Et en plus, elle me regarde comme si je la dérangeais. Vous êtes chez moi, sorcière !

— Vous êtes alcoolisée ? demandé-je pour la forme me préparant à appeler l'hôpital, département psychiatrie.

— Je sais que tu ne me crois pas, mais moi j'ai confiance en mon intuition. On en reparlera. Je te laisse maintenant.

Sans un mot de plus, elle quitte mon appartement. J'observe la porte comme si elle pouvait me dire ce qui vient de se passer. Je suis encore en train de rêver, c'est ça ? Un rêve sacrément tordu, si même mon café ne me réveille pas. Je crois que je préfère les songes mettant en scène mon ex, finalement. 

En coloc avec mon EXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant