Chapitre 23 - Gabin

600 32 1
                                    

Dire que je suis serein serait mentir. Je suis sur la route de l'appart après le taf et je n'ai aucune idée de comment je vais trouver Abby à mon arrivée, ni si elle y est déjà. J'avoue que même si on s'est beaucoup rapprochés, et pas qu'un peu ces derniers temps, j'ai toujours le souvenir de sa fuite en tête. À chaque instant, je m'attends à ce qu'elle prenne ses jambes à son cou et disparaisse. Le fait qu'elle m'ait répondu à mes messages ce matin, même à moitié, me rassure un peu. Même si, je ne serai apaisé que lorsque je serai à l'appartement pour constater qu'elle n'a pas fuie. C'est clairement un avantage que l'on vive ensemble, elle ne peut pas s'échapper aussi rapidement qu'à l'époque, mais malgré tout, je flippe. Je ne prends pas la peine d'attendre l'ascenseur en arrivant au rez-de-chaussée. Je grimpe les escaliers à la place, que je monte trois par trois, mes grandes jambes m'aidant énormément à cet instant. Pendant ce temps, j'ai le temps de me remémorer comment Sophie m'a tiré les vers du nez ce matin.

Quelques heures plus tôt

Je ne voulais tellement pas quitter les bras de ma coloc que j'arrive en retard au taf. Le regard sournois que me lance Sophie de son bureau me fait comprendre que je ne vais pas m'installer en paix.

— Panne de réveil ? Ne mets pas la faute sur les transports, je ne te croirai pas.

— Et pourquoi ça ?

— Parce que tu souris comme si on venait de te dire que le Père Noël existe réellement !

Je lève les yeux au ciel. Je commence à penser que je ne suis pas seulement un livre ouvert pour Abby, mais pour tout le monde. Je ne lui réponds pas, j'allume mon ordi à la place. En attendant, je cherche une nouvelle info sur les réseaux sociaux, en espérant pouvoir écrire un article.

Je sais que c'est vivre dans la désillusion de croire que ma collègue ne reviendra pas à la charge. Elle est tenace. Seulement, je profite de cette courte paix pour envoyer un message à Abby. Je ne souhaite pas lui donner l'impression que je la fuis à mon tour.

Je me doutais bien que Sophie n'abandonnerait pas. Quand elle pose brutalement son plateau devant moi à la cantine, je sais que j'ai dépassé ses limites.

— Bon, je n'en peux plus, Gabin ! Je veux savoir.

Un sourire moqueur étire mes lèvres.

— Savoir quoi ?

— Gabin ! s'exclame si fort ma collègue que tous les autres se tournent vers nous.

Elle se calme, puis d'un ton plus posé, elle reprend :

— Vous avez enfin couché ensemble ? Ça se voit comme le nez en plein milieu du visage.

Je rigole en secouant la tête, mais pour éviter que cette conversation dure encore trop longtemps, j'avoue :

— Oui.

Sophie écarquille les yeux si grands que j'ai peur qu'ils tombent de leur orbite. Munie d'un large sourire, elle se penche vers moi.

— Et ?

— Et c'était génial.

Mon amie pousse un cri de joie en tapant dans ses mains.

— Vous êtes alors en couple ?

Pourquoi ai-je l'impression qu'elle veut vivre par procuration une relation amoureuse ? Je peux comprendre qu'elle en ait envie, ça fait un an qu'elle est séparée de son mari. Cependant, je ne saisis pas pourquoi elle ne recommence pas à voir des gens. Certes, elle a un gosse, mais elle est jeune encore. Je pense donc que je vais la décevoir là.

Je devine que mon visage parle pour lui-même vu comment elle se rembrunit.

— Non ?

— Non, confirmé-je en ignorant la sensation amère qui pointe le bout de son nez dans ma gorge.

En coloc avec mon EXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant