En coloc avec mon EX

Chapitre 13 - Gabin

Je suis incapable de me retenir de l'observer pendant qu'elle se concentre sur l'article que j'ai écrit, mes yeux sont attirés par elle comme Icare du soleil. La voir penchée comme ça sur mon ordi me rappelle la fac, faisant remonter tout un tas de souvenir et de sentiments que j'aurais aimé occulter. Même si je me rends compte que je suis incapable de l'oublier elle, tout comme c'est de plus en plus difficile de faire semblant de la détester. Je la veux. Terriblement. Je veux la faire craquer, je veux qu'elle m'aime, je veux qu'elle me désire autant que moi.

7 ans auparavant – un jour de décembre

Je ne veux pas dire que je suis un intello, mais je me débrouille plutôt bien, ce qui fait que j'ai terminé le partiel alors que l'on n'est même pas encore arrivé à la moitié du temps de l'épreuve. Je dois donc attendre avant de pouvoir sortir. C'est notre dernière éval avant les vacances de Noël, on reprendra à la rentrée pour le restant des examens pour ce premier semestre. Je relis une énième fois ma copie, puis je m'appuie contre le dossier de mon siège en croisant les bras. Je regarde autour de moi, certains ont l'air de trouver l'épreuve facile tandis que d'autres galèrent un peu plus. Je rigole légèrement en voyant certains soupirer de désespoir en passant soit leur main dans leurs cheveux ou sur leur visage. Certains fourrent même leur tête dans leurs bras croisés sur leur table.

Je continue d'observer et mon regard tombe naturellement sur elle, Abbigaëlle. La tête sur un poing formé par sa main droite, elle écrit sur sa copie comme si c'était un ennui pour elle. Si j'ai bien compris quelque chose sur elle depuis la rentrée, c'est qu'elle n'est pas à la fac pour être la meilleure des élèves, elle est là pour valider sa licence. Elle ne fait que le strict minimum, sans savoir pourquoi, c'est ce qui m'attire chez elle. Enfin, qu'est-ce qui ne m'attire pas chez elle ?

Trois mois que l'on a presque tous les jours des cours en commun. Autant de temps que je ne peux cesser de la regarder. Elle est belle, tout le monde le sait, sauf elle apparemment. Tous les mecs la matent et elle ne s'en rend même pas compte. Elle est dans son monde, imperturbable. Ouais, on peut dire que j'ai un crush de dingue sur cette nana alors que je ne lui ai encore jamais parlé. Je ne suis même pas sûr qu'elle connaisse mon existence, pourtant je crois que toute la promo a remarqué que je l'aime bien.

Je suis tellement perdu à l'observer que je ne capte pas tout de suite qu'elle a relevé la tête dans ma direction. J'aimerai détourner le regard, mais je suis comme happé par ses yeux noisette. Elle semble surprise de croiser le mien, ses sourcils se froncent légèrement comme si elle se demandait ce que je lui voulais.

Merde, fais quelque chose Gabin ! Tu vas passer pour un fou auprès de la meuf que tu kiffes.

Je lui lance alors un petit sourire, qu'elle ne me rend pas. Je suis dépité jusqu'à ce que je vois ses joues se teindre adorablement d'un rouge cramoisi avant qu'elle ne rebaisse la tête sur sa copie en se mordant les lèvres. Moi aussi j'aimerai lui mordre. Merde ! Pourquoi ai-je pensé à ça ? Ce n'est pas le moment de se sentir à l'étroit dans un jeans, alors que je vais bientôt devoir me lever.

— Il ne reste plus qu'une heure ! annonce justement le surveillant. Ceux qui ont fini, vous pouvez sortir, dans le silence s'il vous plaît.

Je suis un des premiers à quitter l'enceinte. J'attends devant l'amphi que mon pote, Antoine, sorte. J'espère qu'il a bientôt fini et que je ne vais pas encore devoir poireauter une heure. Il pointe finalement le bout de son nez de la salle dix minutes plus tard. Seulement, ce n'est pas lui que je remarque, c'est Abbigaëlle juste derrière lui.

Je me redresse par automatisme. Antoine me questionne du regard, se doutant que ce n'est pas pour lui que mon attitude a changé, puis il se retourne. Il éclate de rire en me rejoignant.