L'or de la piraterie

Chapitre 10: De vieilles connaissances

Harbor. Le village des épices et des marchands. À la vue de tous les navires accostés dans le port, on pourrait facilement croire que tous les navires de la mer se sont réunis au même port. Les marins transportent des barils et des marchandises et les commerçants, avec leurs voix perçantes, attirent les regards des villageois et des inconnus qui croisent leur passage.

Je débarque du pont et saute sur le quai, un peu soulagée de retrouver la terre ferme. Malgré mon objectif de retrouver mon père, la navigation est devenue mon quotidien et sans le vouloir, je m'y suis attachée. Néanmoins, retrouver l'ambiance des villages est soulageant à la fin d'un voyage en mer.

La robe couleur rouge crépuscule que je porte tombe en un jupon rouge rubis. La couleur me suit à merveille avec mon teint basané et mes cheveux d'un noir jais, mais le décolleté plongeant découvre un peu trop de ma peau à mon goût. Je préfère de loin inspirer la peur que le désir et les regards insistants. Je porte également une besace qui pend de ma ceinture.

- On ne repart que dans deux jours, allons s'amuser! s'écrie Alya qui, sans que je l'aie remarquée, s'est jointe à mes côtés.

Elle porte une robe crème en satin et ses cheveux tombent en deux jolies nattes sur chacune de ses épaules. 

Je me tourne vers les pirates derrière moi.

- Ne faut-il pas approvisionner le navire? je demande.

- Non, les hommes de Ben vont s'en occuper. Allez, viens, je meurs de faim, dit Alya en me tirant vers un kiosque de pommes qui semblent avoir été trempées dans un liquide brun chaud.

Je la suis, curieuse malgré moi de goûter au fruit enrobé de la substance à l'aspect sucrée.

Alya donne quelques pièces d'or au marchand et ce dernier nous tend deux pommes. Alya ne m'attend pas avant de croquer à pleines dents dans la sucrerie. Elle semble en extase ce qui me pousse à goûter à mon tour. Le goût sucré vient pétiller sur ma langue tandis que je prends une seconde bouchée, puis une troisième.

- C'est mangeable, dis-je en finissant ma pomme.

- C'est délicieux tu veux dire! Je n'ai jamais goûté de meilleures pommes dans ma vie.

Je retiens un rire en la voyant gambader gaiement sur le chemin envahi de marchands et de villageois. Alya est la femme la plus enjouée que j'ai connu dans ma vie de pirate. Elle est un vrai rayon de soleil si je la compare aux hommes aux esprits torturés qui hantent les navires. Je me demande comment elle peut garder son sourire et son humeur si contagieuse, alors qu'elle est condamné à une vie sans amour et sans réconfort. 

Il est presque impossible qu'elle ne rentre dans aucune personne en raison de sa démarche maladroite. Mon attention est tellement portée sur sa démarche que je ne remarque même pas la fissure dans la route pavée qui s'ouvre sous mon pied. Je tombe en poussant un léger cri avant de me cogner contre un mur, ou peut-être contre un torse me dis-je en sentant des mains froides qui me retiennent. Je lève les yeux, déboussolée. Des yeux bleu nuit me fixent d'une lueur amusée.

- J'apprécie l'effort, mais vous devriez changer de technique, vous me faites horriblement mal au pied.

Je recule presque instantanément en rougissant.

- Excusez-moi, je me suis enfargée.

Il sourit d'un air moqueur, mais avec une étincelle de malice qui me donne des frissons. Ses cheveux bleus sombres s'emmêlent sur sa tête donnant une impression désordonnée, contrairement à son manteau aux boutons en or, à ses pantalons noirs sans aucun repli et à ses bottes dignes d'un garde royal qui donne plutôt l'impression d'un noble gentleman.