J'entrai dans le hall de la demeure de Lady Cornélia et confiai au majordome les documents que mon père souhaitait lui transmettre.
— Pouvez-vous apporter ces papiers dans le bureau de Sa Grâce ? Mon père m'a dit que Lady Cornélia était au courant de leur teneur.
Il acquiesça et m'indiqua.
— Sa Grâce est dans le petit salon où elle prend le thé avec des amies. Si vous souhaitez la voir, je peux vous annoncer.
Je le laissai me guider, le majordome envoya un valet déposer les documents dans le bureau de Lady Cornélia puis m'amena vers Sa Grâce. Je reconnus rapidement le visage des vieilles amies et les salua d'un signe de tête. Cependant, je fus surpris de trouver Miss Lucinda et sa mère parmi elles. Cornélia m'invita à prendre place auprès d'elles avant de me demander.
— Que nous vaut votre visite parmi nous, Andrew ? Bien que je sois toujours ravie de vous voir, il m'étonne de vous savoir prendre plaisir à rejoindre une réunion de vieilles dames.
Elle se tourna vers Lucinda, qui s'apprêtait à l'interrompre.
— Je ne vous compte pas parmi nous, ma chère. Je me doute que nos jérémiades ne fassent pas partis des sujets de discussion à votre âge. Et n'essayez pas de me contredire par politesse.
Lucinda ne put retenir un sourire. Lady Cornélia savait exactement quoi dire pour dominer une conversation. Elle se tourna à nouveau dans ma direction.
— Alors Andrew ? Par quel plaisir, êtes-vous ici ?
— J'ai proposé à mon père de vous apporter des documents à propos de votre domaine. Quand j'ai appris que vous receviez, j'ai saisi l'occasion pour profiter des douceurs de votre cuisinière dont vous m'avez vanté plusieurs fois les mérites.
Mon explication ne convainquit pas la maîtresse de maison, elle replaça ses lunettes sur son nez, réflexe qu'elle a transmis à son fils.
— Puisque que vous n'êtes pas ici pour profiter de ma présence, que diriez-vous de proposer une balade à Miss Lucinda en attendant la nouvelle fournée ? Vous pourriez vous promener dans le parc d'à côté.
Sa Grâce ou l'art subtil de donner des ordres. Elle ne nous laissa pas le temps de protester et fit mander une bonne. N'ayant pas d'autre choix, nous nous exécutions et sortîmes.
La bonne nous suivit en nous laissant quelques pas d'avance. Un silence gêné s'installa entre nous et s'éternisa jusqu'à notre entrée dans le parc. Je choisis un sujet neutre pour détendre l'atmosphère.
— Seriez-vous présente ce soir à la soirée musicale ? Lady Cornélia m'a demandé de l'accompagner.
— je ne serais pas là, nous sommes invités chez mon oncle, le marquis d'Hertford. Il perpétue la tradition qu'avait instaurée mon grand-père. Il réunit toute la famille et quelques amis autour d'un repas. C'est un évènement très attendu pour nous et pour la Haute Société, les invitations sont très attendues. Certaines de mes cousines ont été dames de la compagnie de Sa Majesté la Reine Victoria. Cela attire les convoitises de plusieurs membres de la Haute Société.
— Et personne ne cherche à vous voir ?
Elle leva les yeux au ciel.
— Je suis la fille de Sir Frederic, un héros de guerre, un homme bourru dont le regard met mal à l'aise une bonne partie des gens et ma femme est infirme. Voilà ce que je représente aux yeux de tous. Personne ne recherche ma compagnie.
Je haussai les sourcils.
— Personne ? J'ai l'intime conviction qu'Eleanor vous couvrait au théâtre et je suis persuadé que Cavendish se trouvait avec vous dans la loge ce soir-là.
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Correspondances avec la Marquis (anciennement Réputation) -Terminé
RomanceAngleterre 1843 Andrew rentre en Angleterre après cinq années passées en France avec son oncle. Il retrouve sa place parmi les pairs du royaume, ses proches et surtout Eleanor, la soeur de William, son meilleur ami. Pendant ses cinq années, ils ont...