~ Chapitre 48 ~

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Ce matin je me suis réveillée bien avant mon réveil. Les premières lueurs de l'aube filtraient à travers les rideaux, baignées d'une lumière pâle et silencieuse. Il n'était que six heures, et déjà je sentais une tension inhabituelle dans mon corps. Incapable de rester immobile, je me suis levée, le cœur lourd mais résolu.
Je savais ce que je devais faire.

J'ai pris mon téléphone et, presque mécaniquement, j'ai composé le numéro de ma mère. Elle n'avait aucune idée de ce que je traversais ni même si j'étais toujours vivante. Cela faisait des mois que je n'avais donné aucun signe de vie. Je savais qu'elle devait être morte d'inquiétude, alors je n'ai pas hésité plus longtemps.
Après une profonde inspiration, j'ai appuyé sur l'icône d'appel vidéo. L'attente sembla interminable, mais enfin, l'écran s'illumina et le visage de ma mère apparut. Elle était allongée, les yeux encore gonflés de sommeil. Lorsqu'elle me vit, elle se redressa brusquement, comme si elle venait de voir un fantôme.

— Franck ! cria-t-elle en direction de la chambre voisine. Franck, viens voir ça, tout de suite ! Tu ne croiras pas ce que tes yeux vont te montrer !

Son excitation me réchauffa le cœur, mais une part de moi restait tendue, méfiante. Je savais que mon père ne partagerait pas cet enthousiasme. Dès l'enfance, j'avais ressenti cette froideur qui le distinguait de ma mère. Avec ma sœur Leyla, il était affectueux, attentif, presque admirable. Avec moi, c'était tout le contraire : indifférence, critiques, et une distance inexplicable.

Mon père finit par apparaître à l'écran, le visage fermé. Ses yeux croisèrent les miens, mais ils n'exprimèrent ni surprise ni soulagement. C'était comme si mon absence prolongée n'avait rien signifié pour lui.

— Ah, ta fille est de retour ? lâcha-t-il d'un ton sec. Je te l'avais bien dit, elle reviendrait quand elle en aurait assez de vagabonder. Tu t'es inquiétée pour rien, comme toujours.

Ses mots me frappèrent en plein cœur. Je sentis une chaleur douloureuse monter dans ma gorge, mes yeux s'emplirent de larmes avant que je ne puisse les contenir. Ma mère, visiblement gênée, détourna brièvement le regard. Elle posa une main tremblante sur l'épaule de mon père, essayant d'apaiser la tension.

— Il ne voulait pas dire ça, Ariane, je te le promets, dit-elle d'une voix douce.

— Oh que si, maman. Arrête de le défendre. Tu l'as entendu, comme moi. Il pense chaque mot qu'il prononce, et tu le sais aussi bien que moi.

Mon père se redressa, défiant du regard ma mère qui semblait prête à protester. Il reprit la parole d'une voix encore plus froide.

— Si, c'est exactement ce que je voulais dire. Tu fais ton cinéma, comme toujours. Tu es revenue parce que tu n'as plus rien à faire dehors, pas parce que tu nous manquais. Et arrête de pleurnicher, tu es bien moins futée que tu le penses.

J'étais paralysée. Chaque mot qu'il prononçait était comme un coup de poignard. Je cherchais désespérément un signe de compassion dans le regard de ma mère, mais elle semblait partagée entre son amour pour moi et sa loyauté envers cet homme.

— S'il te plaît, dis-moi que cet homme n'est pas mon père, maman. Dis-moi que ce n'est pas vrai.
Je savais que c'était absurde. Je savais que Franck était mon père. Mais je refusais de croire qu'un père pouvait parler à sa fille de cette manière.

— Ariane, écoute-moi, commença-t-elle, la voix tremblante. Ton père t'aime. Il a souffert de ton absence, c'est pour ça qu'il réagit ainsi. Il ne veut pas te blesser, je te le promets.

Mais avant qu'elle ne puisse continuer, mon père l'interrompit brutalement :

— Arrête de mentir pour moi, Abi. Je vais tout lui dire. Elle mérite de savoir.

𝑳𝒆 𝑴𝒂𝒓𝒊 𝑫𝒆 𝑴𝒂 𝑺œ𝒖𝒓( en cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant