CHAPITRE 12 - Isabella

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Je suis étendue sur le matelas, somme toute confortable, qui m'était destiné. Cela fait des heures que je suis éveillée, et plongée dans la pénombre. Je ne vois absolument rien. En ces lieux, tant que la lumière artificielle reste en veille, aucune éclaircie n'illumine nos vies.

Je ne sais absolument pas quelle heure il est, mais je peux aisément supposer que nous sommes au beau milieu de la nuit.

Je soupire à maintes reprises et je commence à avouer l'évidence : j'ai peur. Même si je suis un fort caractère, j'ai peur. Même si je n'ai pas tendance à laisser mes émotions néfastes prendre le dessus, j'ai peur.

Oui, j'ai peur de savoir ce qui m'attend, de subir les pires cruautés, d'être esclave de quelqu'un d'autre pour le restant de mes jours.

J'ai peur de finir ma vie dans cet endroit maudit.

Eleanor a été emmenée par Victor, et ce, depuis des heures. Les murs sans doute capitonnés de cette pièce ne me laissent pas percevoir le moindre bruit provenant des quatre coins de cette baraque, sans doute immense. Et qui sait dans quel bourbier la jeune femme est tombée à l'heure qu'il est. Même si je ne l'apprécie pas, je n'en reste pas moins humaine. Je suis inquiète pour elle et me soucie de son sort, malgré son caractère bien trempé et sa tendance à me mettre des bâtons dans les roues à tout bout de champ.

Peut-être se fait-elle torturer, frapper, saigner, violer, qu'en sais-je ? Je peux tout imaginer. Dans tous les cas de figure, je ne pense pas que nous soyons ici pour passer des vacances reposantes.

— Qu'est-ce qu'on fiche ici... Soupiré-je alors dans le noir, sans même m'en rendre compte.

— Mmh... Quoi ? M'interroge Hailey, dans les vapes.

Je ne devrais pas. Pourtant, j'en ressens le besoin incommensurable. Je dois lui communiquer mon questionnement. C'est le seul moyen d'espérer sortir d'ici un jour : se faire confiance, et se serrer les coudes.

— Pourquoi il nous a fait kidnapper ?

— Hein... ? Insiste-t-elle d'une voix toujours aussi faiblarde.

— Pourquoi nous laisser prisonnières, enfermées entre quatre murs... Qu'est-ce qu'il veut, cet Hadrian, à la fin ?

— Certainement un casse-croûte... Répond une autre voix familière.

— Comment ça ? Osé-je demander, sentant mon palpitant s'affoler.

— C'est certainement un détraqué qui veut faire de nous des esclaves... Avoue alors Alexandra, en allumant la lampe de chevet. Des esclaves sexuelles...

— Mmh...

J'aperçois une partie de son visage, éclairé par la lueur de la lampe. Un de ses yeux demeure dans la pénombre, m'offrant une vue partielle sur son teint blafard qui dépeint toute l'angoisse accumulée de son corps à bout de forces.

Si ce qu'elle dit s'avère être vrai, je n'ose même pas imaginer ce que doit subir Eleanor à l'heure qu'il est.

Une chose est sûre : je ne me laisserai pas faire. Quoi qu'il veuille me faire subir. J'en fais le serment. Jamais je ne me soumettrai.

Tu ne sais pas à qui tu as affaire, Hadrian, qui que tu sois.

Je suis plus coriace que tu ne le penses.

Tu as enlevé la mauvaise fille.

Je repense soudain aux raisons qui m'ont conduite ici. Je n'aurais pas dû aller voir Dimitri.

Sans cela, jamais je n'aurais croisé la route de mon kidnappeur, de cet Hadrian dont nous n'entendons parler que de manière floue et qui ne s'est toujours pas présenté à nous. Tout ce que je sais, c'est qu'il est riche.

BOURREAU DES COEURS - TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant