CHAPITRE 25 - Isabella

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Je rouvre lentement les yeux après une longue nuit d'angoisse. Mes yeux sont encore embrumés, mais qu'importe. Nous sommes toujours plongées dans le noir lorsque nous n'allumons pas les lumières artificielles.

Seigneur...

J'ai enchaîné les cauchemars, qui eux, ne me restent pas vraiment en tête ce matin. Le seul songe qui stagne dans mes pensées, c'est un doux rêve dont j'ai eu le bonheur de faire l'expérience au beau milieu de la nuit. Je me promenais sur le bord d'un étang, au soleil couchant, main dans la main avec Dimitri.

Oh Dimitri, tu n'imagines même pas à quel point tu me manques.

Tu n'imagines même pas ce que ça fait d'être loin de toi, alors même que je n'ai même pas pu toucher ta peau, goûter tes lèvres, sentir ton odeur...

Dès notre rencontre, à l'instant même où j'ai posé les yeux sur son visage, il m'a hypnotisée. Dès cet instant, j'ai brûlé de savoir son goût et sa texture. Dès la première seconde, j'ai imaginé sa voix sépulcrale et hypnotisante hurler mon prénom pendant qu'il me faisait l'amour. J'ai imaginé sa langue parcourir les parcelles les plus interdites de mon anatomie en gémissant contre mon épiderme.

Et rien qu'en y pensant, mon entrejambe s'humidifie.

Interrompant mes pensées, je perçois soudain le souffle d'Alexandra qui ne tardera pas à se réveiller. Et quand j'y pense...

Hailey n'est toujours pas revenue.

Je me demande si nous allons avoir l'occasion de la revoir un jour. Nous nous attendons à tout, preuve en est que nous ne passons plus une seule nuit à dormir sur nos deux oreilles. Nous sommes toujours sur nos gardes même si finalement, cela ne changera rien. Lorsque notre heure viendra, nous ne pourrons pas nous battre.

CLIC CLAC

J'entends le verrou de la porte d'entrée de nos appartements. C'est certainement Victor qui nous apporte notre petit déjeuner. Ses pas sont lents, mais sa démarche toujours assurée.

Je l'entends circuler de gauche à droite, certainement pour déposer un nombre incalculable de plats remplis de nourriture sur la table. Je sens d'ici l'âcreté des citrons, les effluves sucrés des pâtisseries, la fraîcheur des différents jus de fruits versés dans les pichets. J'entends le crépitement du bacon grillé, et les murmures des œufs brouillés tout juste échappés de la poêle.

Je me fiche de manger ou non. Mon ventre ne crie même plus famine. Depuis combien de temps sommes-nous ici ? Une semaine ? Non... Plus que ça. Je ne saurais pas dire quel jour nous sommes, ni quelle heure il est exactement, mais ce que je sais, c'est que nous devons agir. Je veux retourner à ma vie. La nourriture est seulement un moyen pour moi de regagner de l'énergie, et de me préparer pour le jour où j'affronterai Hadrian.

Je retire la couverture, et me redresse dans mon petit lit. Après m'être frotté les yeux, je sors de la pièce et fais face au visage lumineux de Victor. Je n'ai plus peur de lui. Simplement parce qu'il a peur d'Hadrian, cela va de soi.

— Bonjour, Mademoiselle. Bien dormi ?

— Question idiote, rétorqué-je d'un ton cinglant.

— Réponse idiote, Mademoiselle.

Son ton est piquant, malgré le respect dont il fait preuve. J'ai tenté une fois de le séduire pour lui soutirer des informations, en vain. Autant ne pas me fatiguer. Le jeune homme s'adonne toujours à sa tâche, ne s'interrompant pas pour mes paroles insensées. Après tout, qu'y a-t-il de sensé ici ? La situation ne l'est pas. Notre geôlier ne l'est pas. Mais ce qui me serre le cœur est que bien trop souvent, j'ai l'impression d'être totalement invisible.

BOURREAU DES COEURS - TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant