BOURREAU DES COEURS - TOME 1

CHAPITRE 31 - Isabella

Cela fait maintenant quelques minutes que je suis seule, allongée sur le lit de la Dark Room, du moins c'est l'impression que ça m'en donne.

Officiellement, je suis en compagnie de mes deux camarades de chambre. À un détail près que Hailey git sans vie, les poignées encore attachées au plafond par d'immenses chaînes, et qu'Alexandra est à plat ventre sur une espèce de chaise de torture, après avoir subi la sodomie la plus douloureuse de sa vie. Et la première, soit dit en passant.

Leur corps est recouvert de plaques vermeilles qui offrent une odeur nauséabonde à cette pièce des abysses. Seule la respiration saccadée d'Alexandra brise le silence de mort qui se dresse à nos côtés comme un vieil ami.

Voilà où nous en sommes.

Quant à moi, à ma grande surprise, je n'ai encore rien subi. Pour je ne sais quelle raison, notre bourreau a pris ses jambes à son cou, juste au moment où il allait me violer. Il avait commencé à me pénétrer, mais il a vite tout arrêté. Pourquoi ? J'ai beau essayer de rassembler mes esprits, je ne parviens pas à comprendre son comportement.

Finalement, a-t-il un minimum de cœur ?

Est-ce que ça existe, un psychopathe à soixante-dix pourcents ?

Je soupire bruyamment, en tentant de bouger les poignets, encore emprisonnés dans leur cage d'acier, de part et d'autre de mon corps. Je ne sens plus le sang circuler dans mes doigts.

— Is... Ab...

— Alexandra ! Tu vas bien ?!

— Je... Cr... Ois... Répond-t-elle faiblement.

Elle est à bout de forces. Il l'a réellement défoncée. Victor avait raison sur ce point : Hadrian est bien pire que lui, en tout point de vue.

Soudain, un léger tintement vient interrompre mes pensées. C'est la porte d'entrée de la pièce qui s'ouvre. Elle se met à grincer plus que de raison, ouverte beaucoup trop lentement comparé à l'usage que doit en faire son propriétaire d'ordinaire. J'éprouve de la difficulté à déglutir et avaler ma salive qui forme un amas de liquide épais dans ma bouche. Va-t-il encore nous faire du mal ? Alexandra n'y survivrait pas, c'est certain.

Contrairement à ce que j'imaginais, c'est un sous-fifre désabusé qui entre dans la pièce, et qui tente par tous les moyens de ne pas reluquer mon corps nu qui lui est offert sur le matelas, comme sur un plateau. L'anus dilaté et maculé de sang d'Alexandra lui fait également face, mais le jeune homme semble plongé dans ses pensées, n'y faisant aucunement attention. Il se dirige vers l'interrupteur et rallume la lumière jaunâtre, retirant la lueur tamisée qui nous enfermait dans les enfers jusqu'à maintenant. C'est à cet instant que je perçois plus en détail les séquelles physiques d'Alexandra, et l'état dans lequel le corps de Hailey git à nos côtés. J'ai envie de rendre le contenu de mon estomac.

— Vic... Victor...? Osé-je interpeller le sous-fifre afin de m'assurer qu'il n'est pas ici pour nous faire du mal.

— Oui, Mademoiselle ?

— Que... Qu'est-ce qu...

— Je suis là pour vous ramener dans votre chambre, nous annonce-t-il.

Il semble un brin irrité, si j'en juge par son regard encore plus malveillant que d'ordinaire.

Le jeune homme s'approche lentement de moi, puis attrape mon poignet gauche pour me libérer des menottes. Sous mon regard circonspect, il défait la seconde menotte, puis ramasse mes vêtements à moitié déchirés et me les balance en plein visage.

— Je... Je ne comprends pas... Où est Hadrian ?

— Monsieur Campbell ne souhaite plus passer de temps avec vous pour l'instant, Isabella. Je vous serais reconnaissant de ne pas me causer de problème.