A l'encre de ton Coeur Tome 2

Chapitre 9 : Rose

San Gimignano Toscane — 28 août 2022

— Bravo Nonna !

L'assemblée, réunie, applaudit. Toute la famille l'entoure. Les frères de mon père, leurs femmes et tous les cousins et cousines que j'ai appris à connaître, à aimer, même si je me sens toujours un peu comme une pièce rapportée.

J'ai toujours été bien accueillie, à bras ouverte, choyée, mais il y a ces moments de fêtes de famille, de célébrations religieuses où je me sens en décalage.

D'après mes cousines, mon père, le dernier des quatre fils était le préféré de ma grand-mère, Rosalina. Alors quand j'ai débarqué, il y a un peu moins de cinq ans, un peu perdue et en manque de repères, elle m'a accueillie avec beaucoup d'amour et de fierté. Elle aimerait que mon frère soit plus présent, mais il n'est venu qu'une fois. Aujourd'hui, ses repères sont Meghan et Livio, sa vie en Amérique et il n'a pas forcément envie d'aller au-delà.

C'est sans doute un peu tard...

Moi, j'en ai besoin. C'est comme si en étant ici je me sentais plus proche de notre père. Il me manque, son sourire, sa bienveillance et ce regard emplit d'amour qui illuminait son visage quand il posait ses yeux sur nous. Je sais qu'il aimait son pays, sa terre, et me retrouver à cet endroit, même si je m'y sens quelquefois étrangère, c'est un baume sur mon cœur meurtri par son absence. Toutes ces choses qu'on ne s'est pas dites, tout ce qu'on ne pourra plus jamais partager.

Certains vivent avec les fantômes de ceux qu'ils ont aimés quand d'autres découvrent tardivement l'identité d'un parent...

La vie est curieusement faite...

La journée s'écoule sous l'ombre des conifères, à travers les bourrasques de poussières des enfants qui jouent dans les chemins sableux tandis que les oncles servent le vin familial pendant que mes tantes jouent de la musique, chantent et dansent sous le regard bienveillant de nonna. Nous n'avons presque pas quitté les pieds de sous la table qu'elles pensent sans doute déjà au repas du soir.

Je sirote mon café, légèrement en retrait, quand l'une de mes cousines, Monica s'approche.

— Toujours à l'écart ?

Je souris. Nous avons déjà eu cette conversation. Je ne suis pas habituée à me mettre en avant. Surtout quand je ne me sens pas à l'aise avec les habitudes de la famille. J'aime les observer, m'imprégner de leur bonheur. Après le décès de grand-père, j'aime être entourée de joie de vire même si j'ai du mal à la laisser m'envahir totalement.

— J'aime vous regarder être heureux.

— Tu pourrais être avec nous cousine.

Elle me donne un coup d'épaule affectueux. Monica est celle qui m'a accueillie avec le plus d'entrain. Elle m'a fait découvrir tous les endroits fun de la région, entendu ceux que ma grand-mère ne connaît pas. De quatre ans mon aînée, elle est toujours célibataire et profite de sa jeunesse à fond, au grand désespoir de ses parents qui ont compris qu'elle n'envisage pas d'embrasser la vie traditionnelle tracée par nos tantes. Elle a ce petit grain de folie qui me rappelle Siri. Spontanée et libre jusqu'au bout des ongles.

— Tu vas repartir à San Francisco ? C'est à ça que tu penses ?

— Je pars après-demain.

— J'aimerais partir avec toi, j'ai toujours rêvé de visiter les States.

— Fais-le !

— Quoi ?

— Viens avec moi ! Tu passeras du temps avec Danny, ce serait un bon moyen de l'inciter à mieux connaître sa famille !