Chapitre dix-sept

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Mes enjambées me guidèrent vers un salon de thé plutôt apprécié par Charlie. Il m'avait donné rendez-vous ici. Depuis qu'il était venu chez moi pour m'aider dans mes recherches, infructueuses et tristement drôle d'après le jeune homme, je n'avais pas eu l'occasion de le voir. Que ce soit au travail ou en dehors. Le brun, sans hésitation, avait pris en charge mon planning et avait su s'arranger pour que l'on puisse se rejoindre et qu'on passe un moment ensemble. Il avait même réussi à trouver d'après lui l'endroit parfait au sein de ma ville d'adoption, je cite, Charleston. J'entrai dans ce qui semblait être le salon de thé le plus improbable imaginé, Twenty-six divine.

L'intérieur du salon était habillé de diverses teintes de brun, doré et de légère nuance de marron. L'endroit paraissait sortir d'une œuvre de Conan Doyle. Le lieu sentait de papier ancien, le feu de cheminée, la menthe et la cannelle. Un mouvement de bras attira mon attention. Charlie était agréablement installé près du feu de cheminée. L'asiatique avait revêtu son plus beau pull de noël. J'affichais un large sourire, je marchai proche de lui avant de m'asseoir, ébouriffant ses mèches rebelles, le taquinant comme à mon habitude. Cela lui arracha un rire aux lèvres.

- Tu sais que noël n'est pas avant quelques jours... ? Demandais-je d'un ton mal assuré. Noël et Charlie... Grande histoire d'amour.

- Tu as bien une tête à fêter Halloween tous les jours vu ton teint blafard et j'te dis rien donc laisse-moi et mes magnifiques pulls de noël.

Whoa... Charlie était plus qu'en forme. Je fis paraissant protéger mes arrières d'une potentielle attaque de la part de mon collègue et ami. Ma gestuelle avait l'air de t'amuser à en croire la manière dont il se tordait le ventre, les larmes aux yeux. Charlie était connu pour trois choses au sein du studio photo. Tout d'abord, Charlie de son nom complet "Charles Elias Song" est plus qu'un passionné de photo. Il mange, dort et se lave en pensant à rien d'autre qu'à la photographie et oui... C'est possible... Deuxièmement, il est très franc, voire trop.

Et troisièmement, il est très sociable, c'est avec lui que j'ai commencé à lier une amitié en premier. J'étais assise pendant ma pose sur un banc, un café à emporter dans la main gauche. Quand le jeune coréen s'est approché de moi, me reconnaissant, il avait grimacé. "Comment ose-tu boire cette merde liquide" m'avait-il dit. Je n'avais pas su comment répondre. Il avait saisi mon gobelet de café et l'avait aussitôt jeté dans la poubelle la plus proche avant de me tirer vers ce qui se rapproche du saint-Graal. J'ai nommé, Second State coffee, en plus d'avoir dû vraiment voire très bon café, l'ambiance est au rendez-vous. Plus qu'un simple restaurant au style de routier, c'est également le lieu de rendez-vous de la majorité des personnes travaillant au studio, dont Charlie. C'est donc ainsi que notre folle amitié est née.

- Alors, des nouvelles d'Hadès ? Dit-il avant de prendre une gorgée de sa boisson à la camomille.

- C'est Eros, abruti ! E-R-O-S ! Dis-je légèrement sur la défensive.

Et pour répondre à sa question, non. Pour la seconde fois depuis que je corresponds avec mon inconnu, je n'ai plus aucun signe de vie de sa part. J'essayais tant bien que mal de comprendre, mais ma conclusion en revenait au même point. Tout était parfait. C'est peut-être justement ça le problème. Avait-il prit peur que cette amitié ne s'effrite avec le temps ? Que cette relation ne se casse à cause d'une quelconque dispute.

- Calmos Juliette, je ne vais pas lyncher ton Roméo ! Déstresse ! lança-t-il sur le ton de l'humour. Puis son regard croisa le mien et il comprit. Sa bouille d'enfant se tendit avant de me partager un regard plein de compassion.

- Pas de nouvelles ?

- Pas de nouvelles. Ma gorge était serrée.

J'avais retranscrit via message toute la journée que m'avait organisée Eros. Chaque instant, chaque moment de joie, chaque fois où je riais et maudissais gentiment Eros de m'avais fait sortir de ma zone de confort. Cette journée avait été l'une des plus belles que je puisse avoir. Mon cœur était demandeuse de revivre ce genre de moment, mon âme en voulait plus. Ma peau réclamait de sentir une friction contre elle, de pouvoir sentir celle d'Eros. Hélas, cette dernière partie de moi ne ressentait que la maigre chaleur du feu de cheminée. Charlie se rapprocha et me prit dans ses bras. Il murmura au creux de mes oreilles qu'il était désolé. Il n'avait pas à l'être. Je m'autorisai à lui poser une question qui risquait de me briser le cœur.

- Charlie... Réponds-moi le plus honnêtement possible. As-tu vu Eros depuis sa surprise ?

Charlie me sourit d'un air attendrissant. Il massa délicatement le milieu de mon dos avant de me rassurer.

- Oui, je l'ai vu le soir même ou tu étais à la fête foraine. Ça faisait longtemps que je ne l'avais pas vu aussi heureux. Tu as réussi à le faire espérer.

- Espérer quoi ?

- Espérer un meilleur futur.

Il se leva et alla chercher ma commande. J'observai le feu crépitant dans le foyer avant de laisser mon visage dériver sur l'extérieur. Je pouvais y voir de la neige tomber par fine poignée. Noël arrive à grands pas, pensais-je en voyant l'allée menant au salon de thé s'habiller de son plus beau manteau. Je pris mon téléphone et vais consulter mon agenda. J'ai pu lire le vingt-quatre octobre. C'est ce vingt-quatre octobre qu'Eros à trouver mon cliché et m'a écrit pour la première fois. Cela fait donc cinquante-sept jours que j'entretiens cette correspondance avec lui... Je ne m'étais pas rendue compte que les jours avaient filés comme des étoiles. Nous sommes le vingt décembre. Dans quelques jours... Cela fera deux mois que je connais Eros, mon inconnu et je n'ai pas de cadeau de Noël pour lui.

- Et merde... J'ai failli oublier Noël.

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