Chapitre 45

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J'éteins l'écran de la télévision un peu dégoûtée. Rien n'est intéressant à mes yeux et je soupire en regardant mon pied et les béquilles posées à côté du canapé.
- Fait chier ! Je jure toute seule dans mon appartement. J'étais rentrée d'Allemagne et ma douleur à la cheville avait encore augmenté. Il a bien fallu aller consulter et résultat des courses : 2 semaines d'immobilisation avec une attelle et des traitements anti-inflammatoires. Sans oublier des séances de rééducation. Tout ceci dans la joie et la bonne humeur. C'est ironique of course.
J'avais rien dis à Daniel pour ne pas le perturber pour le GP d'Azerbaïdjan. Week-end à rayer des mémoires pour l'équipe McLaren puisque les deux pilotes avaient fait P14 et P15.
Demain commence les essais à Montréal. Daniel m'avait téléphoné ce matin et son sourire m'avait remonté le moral. Entre mon bobo et les commentaires sur mon travail de master, j'ai vu mon taux d'optimisme prendre la pente descendante. Ne pouvant pas trop faire de choses physiquement, j'axe mon énergie à reprendre mon travail de fin d'études et passe bien des demi-journées dessus.
Dimanche 19 juin, Daniel part en milieu de grille à Montréal et j'espère qu'il pourra grignoter une ou deux places. Je regarde la course et soupire en voyant qu'il reste en 11ème position. Par contre Lando connaît aussi un coup de mou en finissant P15.
J'envoie un message à mon australien « bravo, tu as bien défendu ta position. Fière de toi. Tu me manques énormément. Je t'aime. »
Il a pas fallu attendre bien longtemps avant que mon téléphone sonne :
- Ma Minimoys, ça va ? J'adore quand tu m'envoies des messages comme ça.
- Hey Sweetheart, tu te sens comment?
- Mieux mentalement mais fatigué physiquement. Et toi ? Qu'as-tu fait à part voir ton beau pilote à la télé ?
- hmm tu parles de Carlos ? J'éclate de rire en imaginant la tête de Daniel suite à ma vanne pourrie.
- rhooo ça va ... il est deuxième ton latino.
- Je te taquine mon cœur. Tu rentres demain à Monaco ?
- Hmm non. Il y a une brunette qui m'attend et j'ai trop envie de la voir.
- C'est moi la brunette ? Tu viens me voir ? Mais ....
- J'arrive à Genève pour 16h. Je peux avoir mon Uber en Audi RS7 ?
- Sans problème, j'ai trop hâte de t'avoir pour moi toute seule.
Étonnamment, il n'y a pas foule à l'aéroport et j'attends Daniel qui devrait plus tarder puisque son vol a atterri. Je me suis mise un peu en retrait et patiente en m'appuyant contre une barrière. Il arrive avec ces deux valises et me cherche du regard. Je lui fais signe et il fonce vers moi mais son sourire disparaît en voyant ma béquille. Il m'enlace avec force, m'embrasse et me chuchote à l'oreille :
- My Sweetheard, tu m'as manqué. Qu'as-tu fait ? Pourquoi cette béquille ?
- Welcome grand brun. C'est pas bien méchant, ne t'inquiète pas. Tu as fait bon voyage ?
Tout en prenant la direction du parking, il me raconte les potins du paddock et les bêtises qu'il a fait. Je lui tends les clés de ma voiture en déclarant :
- Ta voiture de location ... pour ces quelques jours en Suisse. Fais-toi plaisir mais attention aux limitations. Autrement tu payes les amendes Baby Shark.
Il me fait un salut militaire avec son plus beau sourire. Rhaa je fonds !

Ne pouvant pas reprendre les entraînements, je suis un peu oisive mise-à-part mes rendez-vous de physio. Daniel s'occupe de moi et j'avoue que c'est très agréable de se faire dorloter mais j'impose quand même des limites.
- Daniel, je peux marcher, je dois juste éviter de mettre tout le poids du corps sur ma cheville. Donc ... je me lève et je vais chercher ce que j'ai besoin .... Toute seule !
- Mais demande. Je veux t'aider.  Allez fait pas ta tête de mule Lauren.
Il appuie ses deux mains sûr mes épaules pour m'obliger à rester assise.
- Dany ....
- Lauren !
- Mais arrête on dirait ma mère. Je ...
Ma phrase reste en suspens car ses lèves se sont collées aux miennes pour me faire taire. Je souris en lui rendant son bisou.
- Tu vois, j'ai enfin trouvé le truc pour t'empêcher de parler. 
Il éclate de rire, trop fier de lui.
- C'est ça oui, tu te vois m'embrasser tout le temps ? Tu vas de lasser à force.
- Alors là... jamais ! et il me refait un deuxième baiser.
Nous profitons de l'appartement, de se balader en voiture et de se reposer. Daniel m'accompagne aux séances de physio et je suis contente de voir que mon inflammation diminue. Encore une petite semaine et je pourrais reprendre le sport et mes activités. Ces quelques jours ont passé très vite et même trop vite puisqu'il doit repartir à Woking chez McLaren avant le GP de Silverstone.
Affalés sur le canapé en regardant une série, Daniel ose finalement me demander:
- Lauren, tu veux venir à Silverstone ? Tu pourrais me rejoindre vu que ta cheville va mieux.
Je m'attendais à cette question. Je me penche sur son épaule et lui caresse son bras en suivant le contour de son tatouage.
- Je ne pense pas, ma tendinite se résorbe et j'ai pas envie que l'inflammation  recommence. Et puis il me reste exactement une semaine pour terminer mon travail. Tu comprends ?
Il m'embrasse le front mais ne répond pas de suite.
- Et l'Autriche, ça te tente ? On mange des bretzels là-bas.
- Et ???
- C'est trop bon ... c'est important de se nourrir.
Il blague ? C'est pas possible de me sortir cet argument.
Je suis parcourue d'un fou rire à me faire pleurer. Il est tout fier de sa connerie et attend que je me calme.
- Daniel tu es exceptionnel. Tu me vends du rêve ... avec des bretzels. On me la jamais faite celle là.
- Je sais, je sais ... cela fait partie de mon charme. Le trio gagnant : nez, sourire et déconne. C'est pour ça que tu m'aimes ma chérie.
- Ok je viens mais c'est uniquement pour les bretzels. On est bien d'accord ?
- C'est évident, le pilote est juste du bonus !

Les jours passent et je termine enfin mon travail de master. Il est posté, plus de retour en arrière possible. Je suis donc officiellement libre jusqu'au 1er septembre. Deux mois pour souffler, je me sens libérée et soulagée.
Le Grand prix de Silverstone n'a pas été top pour Daniel et Lando. Par contre j'ai fait la danse de la victoire devant ma télé en voyant Carlos sur la plus haute marche du podium. Il a été incroyable et n'a pas tremblé contre Perez et Lewis.

Ce matin, j'ai décidé de rechausser mes patins et de faire une petite cession de glace. Rien de méchant, juste des bases. Il y a des jeunes du club des patineurs et je leur consacre un moment. J'adore pouvoir conseiller et partager mes expériences. Il faut absolument que je refasse des nouvelles vidéos tutoriel, cela fait bien longtemps.
Je recontacte un jeune étudiant en art visuel qui m'avait aidé et nous programmons deux après-midi de tournage.
Daniel m'a préparé mon voyage pour l'Autriche. J'avais insisté pour faire le déplacement en voiture mais il a refusé. Malgré mes arguments qui étaient tout-à-fait recevables, il a été inflexible. Je me retrouve donc dans un petit jet en direction de Spielberg en Autriche. Je n'avais pas eu le temps de passer le portique du Paddock que je vois arriver mon australien, sa combinaison sur les hanches me foncer dessus et me faire tourner dans ses bras. Au moins l'accueil est sympa. Il m'embrasse et m'embarque vers le garage McLaren.
- J'ai quelque chose pour toi. Mais faut te dépêcher.
Il me tire littéralement en faisant de grandes enjambées. Je salue les mécanos et l'équipe comme je peux. Un cameraman nous filme, c'est bizarre.
- Mais Daniel, ralenti. Tu as une qualification qui t'attend ou quoi ?
- Nope. J'ai beaucoup mieux. Regarde ma belle !
Une magnifique McLaren GT4 attend devant l'entrée du circuit, prête à rouler.
- Belle bête ! Tu l'as testée ? Je le regarde toucher la carrosserie du bout de ses doigts. Il a le regard qui brille.
- Pas encore Sweetheard. Je t'attendais. Aller prend un casque.
Je comprends de suite que ma petite ballade ne va pas être tranquille.
- OK mais vas-y mollo les premiers virages stp.
- Oui oui tu me connais. Il me fait un clin d'œil.
- Justement!  Je rigole en attachant mon casque.
L'équipe média nous filme et une caméra est embarquée dans le véhicule. J'ose pas trop lui faire de remarque ni hurler mais j'avoue que c'est pas l'envie qui me manque.
Daniel est à fond dans sa conduite, maîtrisant parfaitement le bolide et ses trajectoires. Ma tête cogne contre le siège et repart en avant sous la force des G, je comprends mieux pourquoi il faut se muscler la nuque. Daniel s'aperçoit que je grimace et relâche la pédale en me tenant mon casque d'une main. On se sourit et finissons pas rentrer au garage.
- Alors cela t'a plu ? Il y en a sous le capot. Il enlève son casque tout content de m'avoir fait partager des sensations sur le bitume.
- C'est grisant mais j'ai la nuque qui en a pris un sacré coup. Tu étais à combien sur la ligne droite ?
- Tu veux vraiment le savoir ?
- Finalement non, oublie ma question.
Daniel vient tout près de moi, replace une mèche derrière mon oreille et me sourit. Il dépose un petit bisou sur ma joue et me murmure :
- 308 km/h bébé.

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