Je pris la direction de la chambre de Jeff pour rallumer mon ordinateur. Un papier tomba de l'étui de celui-ci. Intriguée, j'y jetai un coup d'œil. Il s'agissait du numéro de Léo qui m'était complètement sorti de la tête. Tiraillée entre l'envie de le mettre à la poubelle ou de l'enregistrer dans mon téléphone, je pris le PC et partis m'asseoir au petit secrétaire de la chambre. Dans ces moments de doute, seule Séléna, ma grande sœur, arrivait à me dire quoi faire. Habitant à Québec et ayant six heures de décalage horaire avec nous, on ne l'avait que rarement au téléphone. Nous privilégions toujours les mails et la messagerie « Facebook », cela étant gratuit par Wifi. Les appels vers le Canada n'était pas inclus dans notre forfait téléphonique.
Le message envoyé fut bref, mais suffisamment explicite.
« Besoin d'aide grande sœur. Rien de vital, quoi que... "XOXO" ».
Ce mot m'a été appris par ma frangine. C'est un symbole d'origine américaine où chaque X représente un bisou et chaque O, un câlin.
Par chance, elle était connectée et m'appela en « Facetime » dans la foulée.
— Hey ! Mais... T'as bonne mine ! Ce genre de message, habituellement, précède un torrent de larmes.
— Je suis perdue, mais pas triste en soit ! lui affirmé-je par un clin d'œil.
— Raconte-moi tout, je veux tout savoir !
Sans rentrer dans les détails et chuchotant presque pour ne pas me faire griller par Jeff, je lui fis part des récents événements, de mon intention de ne pas me caser, adoptant ainsi le mode de vie de Jeff et de mon choix cornélien d'appeler ou non Léo. Elle fut du même avis qu'Isaac. Le seul moyen pour que Jeff comprenne, c'est que je sorte avec un autre.
— Tu sais que j'ai pas l'habitude de manger mon prochain ! Mais s'il se poigne le moine, c'est pas ta faute ! À force d'avoir le hamster qui roule dans ta tête, tu vas finir Craquepotte ! Arrête de travailler en cabochon et remets-toi dans les rails !
Je pris d'abord une tête d'ahurie et je finis par exploser de rire. Depuis dix ans qu'elle vivait là-bas, Séléna parlait comme ses beaux-parents québécois et devenait de moins en moins compréhensible.
— En français, ça donne quoi ?
— Ça veut dire que tu dois arrêter de réfléchir et foncer ! répondit à sa place Jeff qui arrivait en silence derrière moi.
— Salut Jeff, dis, tu fais la chouette toi, maintenant ? interrogea Séléna.
— Il faut bien, sinon comment ta sœur comprendrait de quoi tu brais ?
— Et oh, vous deux, je suis là ! Vous arrêtez vos carabistouilles ?
Cette réflexion fit rire tout le monde, moi y compris. C'est l'un des seuls mots que je savais dire. Ils échangèrent en québécois quelques minutes puis je repris la conversation :
— Bon, c'est quand que vous descendez ? Vous nous manquez. C'est à peine si on connaît le petit Lex !
— T'es mignonne, toi. Faire descendre cinq personnes, c'est dispendieux ! Venez, vous, plutôt ! Vous n'êtes que deux ! Enfin Trois en comptant le "Moron" à côté de toi, s'il veut venir bien sûr !
— Je crois que je vais le faire venir avec nous, juste pour jouer les interprètes ! C'est quoi un "Moron" et "faire sa chouette" ?
— Un "Moron", c'est un imbécile heureux, m'affirma-t-elle. Quelqu'un qui se repose sur ses lauriers. "Faire sa chouette", c'est... C'est ... Raaaaaa, je l'ai sur le bout de la langue, aide-moi toi !
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L'AFFRANCHIE - Tome 1 : L'apollon et la Noctuelle
RomanceATTENTION : CE TEXTE EST POUR UN PUBLIC AVERTI, IL CONTIENT MOULTES SCENES DE SEXE ! «Sophie, la belle noctuelle, aime éperdument, vit tout à mille à l'heure, rêve éveillé et finalement n'est jamais satisfaite Jeff, l'énigmatiqu...