Chapitre 30 Georg

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Je reste planté là à regarder la place maintenant vide devant moi.

J'ai pas été sympa.

Mais je ne veux pas qu'on devienne ami. Je ne veux pas qu'elle soit elle aussi dans le viseur de Franz. Déjà qu'il a tout le groupe...

Je sors de la chambre d'un pas lent et me rends dans le salon.

Quand j'arrive, mon regard se pose sur la porte d'entrée, espérant inconsciemment qu'elle réapparaisse.

Ça n'arrivera pas.

"Qu'est-ce que tu lui as dit pour l'énerver autant ?"

"Rien qui te concerne, Tom."

"Où étais-tu passé ? Nous nous sommes fait un sang d'encre !"

"Je suis vraiment désolé, Simone. Je ne voulais pas vous inquiéter, mais je ne voulais pas rester là-bas et vous m'y auriez renvoyé."

"Comment va t'as jambe, fiston ?"

Je m'assois sur le canapé à côté de Gustav et je soulève mon pantalon du côté droit. Une grande marque traverse toute la jambe de la cheville jusqu'au genou.

"C'est pas joli joli."

Je détourne le regard en acquiesçant.

"Raconte-nous où tu étais."

"Je vous l'ai dit. Chez un pote."

"Un pote ? Quel pote ? On ne le connaît pas ! Tu nous as jamais parlé d'un pote que t'avais ici !"

"Peut-être que j'ai pas envie de vous le présenter !" criai-je en me relevant.

Tom et moi sommes maintenant face à face et bien qu'il soit plus grand que moi, je ne cède pas.

"J'ai d'autres amis que vous, Tom, que ça te plaise ou non."

L'air blessé, il se rassoit dans son siège à côté de son frère.

"Tu ne nous fais pas confiance..." annonce Bill d'un ton triste.

"Quoi ? Bien sûr que si ! Vous êtes mes meilleurs amis ! Mes frères ! Ne redis jamais une chose pareille."

Je quitte le salon en colère et vexée, puis vais m'allonger rageusement sur mon lit, le bras sur le visage.

"Rentre, Gustav." Autorisai-je après quelques minutes.

La porte s'ouvre timidement et un petit blond apparaît.

"Comment t'as su que j'étais là ?"

"Je te connais."

Je retire mon bras de mes yeux et le regarde s'allonger à côté de moi.

Nous ne parlons pas. Nous n'en avons pas besoin. Ça a toujours été comme ça entre nous. Nous n'avons pas besoin de parler pour nous comprendre. Nous pouvons voir à l'attitude de l'autre quand il atteint son point de saturation.

Du coin de l'œil, je vois ses mains tapoter en rythme sur son ventre. Un sourire se dessine sur ses lèvres en constatant que, une fois de plus, il ne s'en rend même pas compte.

"T'as l'âme d'un batteur."

"Hmm ?" Il tourne la tête vers moi avant de baisser les yeux sur ses mains lorsque je les lui indique du regard. "Ah ça." Rigole-t-il doucement.

"Ouais, ça."

Nous sourions avant qu'il ne me donne une petite tape sur l'épaule.

"Dit donc toi. Tu nous caches pas mal de choses en fait !"

"Vous cacher que j'ai un autre pote que vous n'est pas le secret du siècle !"

"Alors là, si. Et en plus, je parlais d'Alina, pauvre con."

"Il n'y a rien avec Alina." Affirmais-je sûr de moi.

"Alors là !" Il se relève et me frappe une nouvelle fois. "Tu m'la fais pas, Georg ! Je connais ce regard !"

"Ah ouais ?"

"Oui. C'est celui que Bill a pour Jeanne et que Sarah a pour Tom."

Nous grimaçons en évoquant ces "couples".

"Tu crois qu'ils s'en rendront compte un jour ?"

"Non. Pas avant qu'il se passe quelque chose et ne change pas de sujet !"

Je souffle faussement énervé et me redresse.

"Y'a rien avec Alina. Et s'il y avait pu avoir quelque chose, il n'y aura rien. J'ai été un vrai con."

"Comme toujours..."

"Hey !" Je le frappe tandis qu'il rigole en s'écartant.

"Plus sérieusement, qu'est-ce que t'as fait ?"

"J'ai été trop brusque."

"Avec elle ? C'est la brusquerie incarnée cette fille, je doute que ce soit ça !"

"Tu te trompes."

Il me lance un regard qui en dit long sur ses pensées, ce qui me fait doucement rire.

"J'te jure. Il y a quelque chose qui ne va pas avec elle."

"Elle est un peu bizarre, ouais."

"Non, pas dans ce sens-là. Il y a quelque chose en elle qui va pas. Je veux dire... J'ai entendu des choses. Et... c'est vraiment moche."

Mes réflexions suscitent sa curiosité, car il m'écoute attentivement.

"Sa sœur..."

"Celle qui est morte ?"

"Oui. Elle n'est pas juste morte. Elle a été assassinée. Devant Alina. Enfin, d'après ce que j'ai compris."

Il recule légèrement, les yeux grands ouverts de stupeur.

"Tu déconne ?"

Je secoue la tête négativement, le regard dans le vide.

"Je lui en ai pas parlé, j'attends qu'elle le fasse."

Enfin, si elle le fait un jour.

"Bordel..." jure-t-il en s'appuyant sur la tête de lit, "tu déconnes pas..."

"Malheureusement."

"Tu devrais lui parler. Commence par t'excuser. Et peut-être que si elle ne t'en parle pas, c'est parce qu'elle n'y arrive pas et que si tu vas vers elle, ça l'aidera."

"T'as pas entendu ce que le médecin avait dit à ce flic ? On ne prononce pas son nom devant elle. Et elle a d'autres choses à gérer que ma curiosité mal placée pour le moment."

"Si tu le dis. Mais je reste convaincu qu'il y a quelque chose. En tout cas pour toi."

Il tourne la tête vers moi et me fixe droit dans les yeux.

"Je l'aime bien."

Il sourit à pleines dents et me dit qu'il le savait en se marrant.

"Tu le dis à personne, Gustav !"

"Même pas au jumeau ?"

"Le fait que je l'aime bien... je pense qu'ils le savent. Mais pour sa sœur, tu ne dis rien."

"Tu ne leur fais pas confiance ?" demande-t-il en fronçant les sourcils.

"Bien sûr que si, putain, arrêtez de dire ça ! Je placerais ma vie entre vos mains sans hésiter ! C'est juste que si t'en parles à Bill, il le dira à Tom et je refuse que Tom s'en serve contre elle dans une dispute. Tu sais comment il peut être !"

"C'est un connard, mais il ne se servirait jamais d'une chose aussi grave contre une personne, Georg."

"J'en sais rien. Vu ce qu'il fait à son frère, je m'attends à tout."

Laisse-moi t'aider.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant