Chapitre 38 : Le Vrai Diego (2/2)

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DIEGO


Je me souvenais de l'odeur de cette épée. 

C'était une relique chargée d'une histoire mystérieuse et sinistre, une arme maudite dans le monde des chasseurs de sorcières. Son nom avait été effacé des annales, mais son essence se rappelait à moi à chaque fois que je la tenais. Une lame avide qui se nourrissait de la magie de celui qui l'empoignait, une épée affamée qui réclamait toujours plus. Je me souvenais de l'odeur métallique de son tranchant, de la sensation glaciale de sa poignée dans ma main. 

Lucie était l'incarnation même de la balance parfaite pour manier cette épée maudite. Avec une maîtrise limitée de la magie, elle représentait une source de pouvoir idéale pour l'arme avide. Son énergie magique, bien que modeste, suffisait à alimenter l'appétit insatiable de l'épée, la transformant en une force redoutable contre les ennemis dotés de puissantes capacités magiques. À chaque coup porté, l'épée dévorait la magie de ses adversaires, les privant de leur source de pouvoir et les laissant vulnérables à l'attaque. Lucie était le catalyseur parfait pour libérer tout le potentiel destructeur de l'épée sans risquer d'être consumée par son pouvoir. 

Mais maintenant qu'elle était un vampire, les choses étaient bien différentes, l'épée serait plus dur à utiliser, mais je ne suis pas sûr que ce soit une priorité. Quand je fermais les yeux, je revoyais son visage couvert de sang, je revoyais les flammes tournées autour de son corps immobile. Si je n'avais pas été là, elle serait morte, et alors moi, ne partie de moi serait morte avec elle. 

Mais je crois, que peut-être, elle aurait préféré ça. Je crois qu'elle aurait préféré mourir que d'avoir à vivre éternellement, et je crois que je le savais. Ce faisant, j'étais une personne égoïste, je lui avais volé quelques choses que je n'aurais jamais pu lui donner : "La mort". 


Jaime, mon grand-frère, se tenait près de la porte du hangar. Son manteau noir flottait autour de lui, remplaçant désormais son uniforme de policier qu'il avait longtemps arboré avec fierté. Autrefois déterminé à défendre la justice, il avait quitté la mafia italienne et l'organisation de Papa pour s'éloigner du crime. Mais aujourd'hui, il semblait avoir tout perdu. Les illusions d'une société juste et équitable s'étaient effondrées devant lui. Ses collègues, autrefois reconnaissants d'avoir un loup-garou dans leurs rangs pour affronter les dangers, lui avaient demandé de se faire recenser, sous prétexte de précaution. Cette demande avait été pour lui le rappel brutal de son statut, de citoyen de seconde zone dans un monde qui refusait de le reconnaître pleinement. Surtout au vu du fait quil était à la tête d'une meute...il représentait une menace. 

Ces mêmes qui étaient bien heureux d'avoir un loup-garou pour prendre des balles ou pour se jeter sur les bombes. Ces mêmes-là qui utilisaient le mot "ami".

Au fond, qu'est-ce qu'un ami, sinon une personne qui peut nous trahir et nous faire du mal. 

- C'est là, il demanda froidement. 

Je fermais les yeux, je pouvais sentir l'odeur du sabre. Une odeur âcre imprégnant l'air, mêlée à une touche poivrée qui chatouillait mes narines, tandis qu'une essence boisée, semblable à celle du chêne ou du sapin, flottait dans l'atmosphère. Par-dessus tout, je pouvais également entendre le battement du cœur d'une dizaine de personnes, résonnant à l'unisson. L'odeur de l'eau me troublait légèrement, le sabre, il voulait l'exporter dans un autre pays ? Sur un bateau ? 

Je pris une profonde inspiration, sentant le poids de la situation peser sur mes épaules, avant de placer ma main contre le mur, comme pour m'ancrer dans la réalité brutale qui se déroulait autour de nous. Je me tournai vers mon frère Jaime, les yeux plongés dans les siens, alors que j'annonçais d'une voix calme :

- Douze hommes armés. Ils sont équipés de fusils d'assauts, de pieux, de balles en argent, et l'un d'entre eux possède même un lance-flammes. Tu devrais rester là. 

Un léger sourire étire ses lèvres tandis qu'il extrait un revolver de sa ceinture avec une aisance désinvolte.

- Je ne suis pas seulement un loup-garou, je suis le chef d'une meute, un Alpha. Ne me sous-estime pas, prévient-il d'une voix empreinte d'assurance.

Il avait probablement raison, mais la prudence était de mise, comme toujours.

- On y va, murmura-t-il simplement alors que son corps se couvrait de poils et que ses yeux viraient à un rouge luminescent. En entrant dans le hangar, il se déplaçait déjà quatre pattes à une vitesse impressionnante. 

Il se balança sur le premier homme armé, lui donnant un coup de pied d'une force t-elle qu'il le décapita d'un coup, sa tête volant plus loin comme un ballon de foot en finale de Coupe du Monde. Les autres se tournèrent en hurlant, pointant désespérément leurs fils d'assauts sur lui, faisant résonner un chaos assourdissant. 

Moi, je m'étais dissimulé derrière les gigantesques conteneurs qui remplissait le hangar, avançant vers l'odeur du sabre qui semblait m'appeler, mais qui se voyait troubler par l'odeur de l'eau et de la fumée libérée par les bateaux qui entrait dans le port. 

Tous les yeux étaient tournés vers mon frère, alors, je pouvais facilement me faufiler jusqu'au bout du hangar où reposait l'arme. Un homme me surpris, mais eu à peine le temps de se retourner que mes mains s'enfoncèrent dans sa poitrine et lui arrachèrent le cœur. Je ne faisais pas dans la dentelle. 

Il ne lui fallut que cinq minutes pour nettoyer les alentours. Visiblement, les ennemis étaient armés de balles d'argent, mais semblaient avoir oublié d'apprendre à tirer. L'épée reposait là, sur une table, parfaitement gardée dans son fourreau d'un noir scintillant orné de fleurs rouges.

Je le saisis et sens immédiatement l'arme dévorer la magie en moi.

- Je l'ai enfin...

Miguel releva les yeux, désormais couverts de sang et des organes des hommes qu'il venait de tuer. Son regard luisait d'une lueur sombre que j'avais déjà aperçue dans mes yeux lorsque j'observais mon reflet dans un miroir.

On était frère, et je crois que nous partagions une haine similaire qui grandissait en nous. Une haine pour les humains, lui parce qu'il avait l'impression d'avoir été utilisé en tant que policier, et moi parce que ce sentiment était similaire vis-à-vis de mon titre de Seigneur de Guerre. Mais surtout, parce qu'il s'en était pris à ma Princesse. 

- Que comptes-tu faire, il demanda simplement, après ce que les humains ont fait... nous n'avons même pas pu compter le nombre de morts, mais on serait à près de 10 000 dans tout le pays, c'est inacceptable...je...je

- Je sais, je lui répondis calmement, mais tu devrais attention, c'est toi qui disais qu'il ne fallait pas laisser mes émotions guider mon jugement. 

Il baissa les yeux puis hocha la tête. Il ne s'attendait pas à ce que je ressorte ces conseils de Maître Yoda comme un Contre-Uno, en pleine conversation. Mais, je savais bien qui lavait raison. Pendant longtemps, nous avions tenté de nous contrôler, vampire et loup-garou, et malgré ça, dans l'air, il y avait toujours eu une certaine haine... malgré le fait que nous avions combattu les démons. 

Ce n'était pas juste une trahison, mais une déclaration de guerre. Et peut-être que certains attendaient une réponse de ma part ? 

Dévore-MoiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant