XX. Ça, c'est le pouvoir.

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Je me dirige comme une foule de gens inconnus vers l'arène. Là sont entassés des centaines, voire des milliers de personnes. C'est impressionnant, mais toujours moins que les défilés des corps de métiers lors de la journée de l'intégrité organisée chaque année le treize juin en Ville. Là j'ai vu rassemblées près d'un million de personnes dans les gradins entourant l'allée d'honneur de la ville.

Je descends pour me placer à proximité de l'estrade centrale. J'ai beau être en colère contre le chef, je sais qu'il est mon meilleur allié et, possiblement, ma seule possibilité d'avoir un avenir certain dans ce clan. Alors je vais devoir faire en sorte qu'il ne me garde pas rancune de ce que je viens de lui dire pour qu'il me défende effectivement face au clan.

La foule murmure de partout, et sur ma droite un jeune garçon de huit ans questionne son père sur la raison de sa venue ici. Apparemment il est déçu d'avoir loupé son cours de sport de l'après-midi. Je le comprends. Moi aussi, mon cours préféré à son âge, c'était le sport.

Mais ne t'inquiète pas gamin. Si j'ai bien compris le but de Cheldan, tu vas suivre une formation accélérée pour devenir un guerrier capable de tuer, et c'est pour bientôt !

Un mouvement me fait tourner la tête vers la gauche, et j'aperçois un groupe compact d'une douzaine de personnes s'avancer vers l'estrade. Il doit s'agir du chef et des responsables des quartiers qui forment sa garde rapprochée organisée au dernier moment. Je crois que l'attaque surprise avortée de toute à l'heure leur a fait prendre conscience de la vulnérabilité du chef.

Ils montent sur le promontoire, et Cheldan monte seul sur le ring légèrement surélevé. Il fait lentement un tour sur lui-même et scrute du regard la multitude présente dans les gradins. Lorsqu'il passe sur moi, je vois à l'étincelle dans ses yeux qu'il m'a reconnue, mais il ne laisse voir aucune émotion sur son visage.

Quand il a fini son inspection, il inspire un grand coup avant de sortir son pistolet et de tirer deux fois en l'air.

J'ai appris la signification de ce signal au cours des dernières semaines passées ici. Un coup pour un rassemblement, deux coups pour réclamer le silence pour une annonce importante, trois pour signaler une attaque contre l'ennemi, quatre coups pour une attaque surprise de la part d'assaillants, et cinq coups pour annoncer la mort du chef. C'est un peu comme les cloches dans l'ancien temps, avant la guerre nucléaire. C'est elles qui servaient de relais pour prévenir les habitants des campagnes que quelque chose se passait. Mariage, enterrement, ou déclaration de guerre.

Immédiatement le silence se fait, et c'est carrément intimidant de voir autant de gens presque arrêter de respirer et se concentrer sur un seul homme, qui nous tient tous au creux de sa main.

Ça, c'est le pouvoir. Cette capacité à imposer à autrui ses décisions sans aucune opposition. Je n'avais jamais vraiment compris comment fonctionnait le clan, mais là, j'en ai un exemple très parlant, et c'en est étourdissant.

—Clan du Loup ! Certains d'entre vous se doutent de la raison de ce rassemblement, mais d'autres l'ignorent.

Il va se casser la voix s'il parle comme ça, enfin s'il crie comme ça, pendant tout son discours. Mais bon, il a choisi d'être chef, tant pis pour lui. Comme on dit, un grand pouvoir implique de grandes responsabilités.

—Ce matin, j'ai mis à mort Dexion, un guerrier, car il avait agi contre la loi la plus importante du clan, celle de ne pas menacé et de ne pas s'attaquer à un membre et camarade. La sentence pour une telle insubordination qui menace la cohésion et la confiance au sein du groupe est connue par tous depuis des années, un tel traître ou une telle menace pour le clan est voué à mourir.

RefouléeWhere stories live. Discover now