Le faux frère

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St Paul, le 18 février 2014

« P'pa,

J'ai quitté la marine.

Ils voulaient des robots qui ne réfléchissent pas et ça ne me convient pas.

Je travaille dans un ranch et c'est assez intense. Le montana c'est vraiment très beau mais je dois avouer que l'océan me manque.

Vous me manquez également et parfois je me demande ce que je cherche tout en continuant de le chercher. Est-ce que ça a du sens ?

Je vous aime.

Buck. »

– Qu'est-ce qu'il fait à Billings ? demanda Ray en s'installant en face de lui.

– Apparemment, il bosse dans un ranch, admit Bobby en sortant la nouvelle photo de son fils de l'enveloppe.

Bobby passa ses doigts sur la silhouette de son fils.

Il lui manquait terriblement mais le ton de sa carte lui donnait de l'espoir. Buck était en train de se rendre compte que son véritable chez lui était auprès des siens.

Ray regarda Bobby avec un sourire compatissant alors qu'il observait la nouvelle photo de Buck.

– Il a l'air bien, n'est-ce pas ? remarqua-t-il, essayant d'apporter un peu de réconfort à son ami.

Bobby hocha la tête, un sentiment de fierté mêlé à une profonde nostalgie s'emparant de lui.

– Oui, il semble bien. Et je pense qu'il est en train de réaliser où est sa vraie place. Il reviendra bientôt, j'en suis sûr.

– Tu as fait un excellent travail avec lui, confirma Ray en posant une main sur son épaule. Buck est devenu un jeune homme remarquable, autonome et intelligent. Il a juste besoin de trouver son propre chemin, mais il sait que la porte est toujours ouverte pour lui.

– J'espère juste qu'il le sait vraiment, lâcha Bobby avec un sourire reconnaissant. Parce que quoi qu'il fasse, où qu'il aille, je l'attendrai toujours.

Les deux hommes échangèrent un regard empreint de compréhension et d'amitié, sachant que leur lien avec Buck resterait indestructible, peu importe où la vie les mènerait.

Bobby regarda fièrement la photo de son fils et se fit la promesse silencieuse de ne plus le lâcher une fois qu'il serait de retour.

Puis, il attendit la bonne nouvelle, persuadé que Buck lui dirait qu'il rentrait.

« P'pa,

Je suis retourné près de l'océan.

L'Oregon est sympa, les gens sont cool. Mais il va bientôt faire trop froid ici alors, je pense que je vais aller faire un tour au Pérou.

Un de mes anciens potes du ranch possède un bar là-bas. Je vais redevenir barman. C'est drôle, j'ai l'impression que la boucle est bouclée.

Embrasse tout le monde pour moi et dis leurs que je les aime.

A bientôt P'pa.

Buck »

– La boucle est bouclée ? demanda Marcy.

– Oui, affirma Bobby. C'est pour ça que je pense qu'il est prêt à rentrer.

– Tu dis ça après chaque lettre Bobby. Il y a quatre mois tu disais que le ton de sa lettre t'indiquait son retour prochain.

– Oui mais là c'est différent parce qu'il a écrit « A bientôt ».

– Peut-être qu'il dit ça pour te dire qu'il t'enverra bientôt sa prochaine lettre.

– Je pense que la prochaine lettre annoncera son retour ou alors il sera carrément de retour. Dans quatre mois, ce sera son anniversaire et je suis sûr qu'il sera parmi nous. Tu sais combien il aime soigner ses entrées.

– Ça lui ressemblerait bien, sourit-elle en regardant de nouveau la petite carte.

– Notre fils va rentrer à la maison, Marcy. Il va enfin rentrer.

– J'ai hâte de le serrer dans mes bras, admit-elle.

Et Bobby avait passé ces quatre mois sur un nuage d'espoir et de bonheur, à tel point que le jour J, il ne tenait plus en place. Il avait tellement hâte de serrer son fils dans ses bras.

Il était vraiment persuadé que la fin de leur cauchemar était proche.

Mais Buck n'apparut pas ce jour là pas plus que Bobby ne reçut de nouvelle carte. Une semaine passa, puis un mois et bientôt cela faisait déjà six mois qu'il attendait angoissé.

Bobby refusait de perdre espoir mais au fond de lui il savait que quelque chose était arrivé. Il avait déjà été au Pérou deux fois, à parcourir les rues en montrant les dernières photos de Buck qu'il possédait mais personne ne semblait l'avoir vu.

Il avait collé des avis de recherche dans les rues et il appelait l'ambassade au moins une fois par semaine mais il obtenait toujours la même réponse : Buck n'était pas apparu dans le pays.

Bobby était désespéré.

Son fils avait véritablement disparu et personne ne voulait l'aider à le retrouver. Pire encore, tout le monde semblait avoir accepter qu'il ne revienne jamais.

C'était comme s'il était mort et Bobby refusait d'accepter ça.

– Ok ça suffit maintenant, s'énerva Ray. Tu traverses quelque chose de difficile mais reprends-toi, merde, t'es en train de tout perdre.

– Laisse-moi tranquille, d'accord ? grogna Bobby. Je n'ai pas besoin de tes jugements en ce moment.

– Je sais que tu souffres, mais tu dois affronter la réalité. Buck n'a pas donné de nouvelles depuis presque un an maintenant. Il est temps d'arrêter de vivre dans le passé et de commencer à accepter ce qui s'est passé.

– Tu n'as aucune idée de ce que je ressens, cracha-t-il. Tu ne sais pas ce que c'est de perdre un fils.

Bobby savait que c'était un coup bas mais il ne pouvait pas s'en empêcher. Il souffrait et il voulait que tout le monde souffre comme lui.

– Je sais ce que c'est que de voir quelqu'un s'auto-détruire à cause de son chagrin, admit-il après quelques minutes de silence. Tu recommences à boire, Bobby. Tu mets en péril ta santé, ton travail, tout ce pour quoi tu as travaillé si dur.

– Tu crois vraiment que je ne le sais pas ? Tu crois vraiment que je ne le vois pas ?

– Alors pourquoi est-ce que tu continues ? Pourquoi est-ce que tu t'autodétruis encore et encore ?

– Parce que je refuse de perdre espoir. Parce que je refuse d'accepter que mon fils ne revienne jamais.

– Il est temps d'arrêter de te mentir à toi-même. Buck est probablement mort. Peut-être dans un accident, peut-être autrement. Mais tu dois faire ton deuil. Tu dois avancer.

– Tu n'as aucun droit de me dire ça. Tu n'as pas le droit de me dire que mon fils est mort !

– J'ai le devoir de te protéger, le contrattaqua-t-il. Et si ça signifie te confronter à la réalité, alors c'est ce que je vais faire. Tu es en train de te perdre, et je ne peux pas te regarder faire ça sans rien dire.

– Je n'ai pas besoin de toi. Je n'ai besoin de personne sauf de mon fils.

– Tu as besoin d'aide. Et si tu ne veux pas l'accepter de moi, alors tu devras l'accepter de quelqu'un d'autre. Je ne vais pas te laisser te détruire même si ça veut dire te dénoncer au capitaine.

– Qu'est-ce que tu attends pour le faire ? le provoqua-t-il. Vas-y ! Ça prouvera quel genre d'ami, tu es ! Que tu n'es qu'un faux frère.

– Peut-être que tu as raison, rétorqua-t-il. Peut-être que je suis un mauvais ami et que je n'ai pas été là pour toi comme je l'aurais dû. Mais je suis là maintenant. Et je vais te sortir de cette spirale, que tu le veuilles ou non.

9-1-1 - Dans le bleu de tes yeux - (AU)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant