Allongée sur le lit de Louis j'attendais la réponse de ce dernier. Assis par terre il réfléchissait à ce que je lui avais raconté. Le silence devenait pesant. Je ne savais plus quoi dire. Au bout d'un certain temps il finit par lâcher :
- Elle a sûrement raison.
Quoi ? C'est tout ce qu'il avait à dire ? 'Elle a sûrement raison' ? Mais raison à propos de quoi de mon rêve ? De mon espèce ? De l'éventuel voyage en Inde ? De quoi parlait-il ?
- Peux-tu être plus clair ?
- Pour ton rêve je suis d'accord. Il va falloir leur en parler. Mais pour le fait d'aller chercher des réponses en Inde... elle a sûrement raison...
- Oui mais la question c'est quand ?
- Ça je ne sais pas... Peut-être pourrais-je y aller une première fois avec mon père puis selon ce qu'on découvrirait on verrait pour organiser ton voyage.
C'était en effet une possibilité. Bien qu'elle ne me plaise pas particulièrement. Cela voudrait dire tout d'abord que Louis devrait partir pour une période indéterminé sans moi. Qui plus est avec son père. Si un problème survenait avec mes nouvelles aptitudes je ne saurais pas me débrouiller seule. Et Louis était la personne qui me comprenait le mieux et Gabriel celle qui comprenait le mieux mon espèce pourtant inconnue à ses yeux. Bien sûr je pouvais toujours compter sur Olivia, Jade et les autres mais ce serait différent.
En outre cela signifierait qu'ils rencontreraient -s'ils y parviennent- mon espèce avant moi. J'ai conscience que c'est une attitude puérile et égoïste mais il s'agissait de répondre à mes questions. De comprendre ce qu'il m'arrive à moi.
Je savais qu'il ne comprendrait pas. Aussi, je me contentai de hocher la tête. Les yeux fixés dans le vide, il réfléchissait toujours. Son front formait un plis entre ses sourcils. Ses cheveux encore décoiffés de sa nuit formaient un épi sur le dessus de sa tête.
- Où alors... commença-t-il, on part tous ensemble cette été, avec tes parents...
Avec mes parents ? Quelle idée lui avait traversé l'esprit.
- Mais Louis ! Tu sais très bien qu'on ne peut pas mêler mes parents à tout ça !
- J'ai jamais dit qu'il fallait leur dire la vrai raison de notre voyage en Inde. Mais par exemple, un jour, tout le monde ne fait pas la même sortie et nous on va chercher des infos pendant que tes parents vont je ne sais où. Tu comprends ?
- Oui...
C'était en effet une possibilité envisageable. D'un côté je la préférait. C'est vrai que comme ça je serai présente et il n'y a plus le problème de la première possibilité. Mais je ne sais si c'était très sûr pour mes parents. Et si jamais je les mettais en danger sans le faire exprès ? Je ne me le pardonnerais jamais.
- Becky ?
- Ouais ?
- Qu'est-ce que tu crains si tes parents sont au courant ? Je veux dire qu'est-ce que tu crains qu'il leur arrive ?
Sa question me surprit. Je pensais que c'était évident pour lui.
- Eh bien tout d'abord il y a Matias. Ensuite j'imagine que vous n'êtes pas les seuls loups garous. Et des humains au courant c'est des humains dangereux, non ?
- Si, en quelque sorte. Mais il n'y a pas que ça. Je me trompe ?
Parfois je me demandais s'il n'avait pas la capacité de lire dans mes pensées même quand je suis humaine.
- Non... tu ne te trompe pas...
Il vint s'asseoir face à moi sur le lit et prit mes mains dans les siennes.
- Dis-moi, m'encouragea-t-il doucement.
- Je ne veux pas qu'ils pensent que je suis un... monstre.
- Quoi ? Mais tu n'es pas un monstre.
- Je sais, je sais. Mais comment dire... Imagine que tu es humain et que jamais il ne te serait venu à l'esprit que toutes les légendes que tu connais, pourraient être vraies. Mets-toi à leur place. Comment réagirais-tu si ta fille se transformait en aigle ou en loup géant ?
Il prit quelques secondes pour réfléchir mais finit par dire :
- Je remettrais sûrement tout en question et me collerais une bonne migraine pendant des mois. Mais je ne pense pas que je la prendrais pour un monstre. (Il me sourit) Tu sais si tes parents t'aiment ils essaieront de comprendre. Je ne pense pas que ta mère te rejette comme ça. Vu comment elle est inquiète à chaque fois qu'on l'appelle elle doit t'aimer énormément. D'ailleurs tu devrais l'appeler maintenant. Elle se demande à chaque fois pourquoi elle ne peut pas te parler.
- Merci.
Je déposai un baiser rapide sur ses lèvres et me levai pour aller dans le bureau. Gabriel y était installé, un livre dans les mains. Il leva la tête quand j'entrais.
- Je viens pour téléphoner à ma mère. Je peux ? demandai-je en pointant le téléphone.
- Bien sûr, sourit-il. Pense à masquer le numéro pour pas qu'elle sache d'où on appelle.
- Merci.
Je tapai le numéro de la maison, espérant que ma mère y soit. Elle ne travaillait pas le mercredi mais sortait souvent faire quelques courses. Mais ce n'était pas le cas ce jour-là. Elle décrocha à la troisième sonnerie.
- Allô ?
Sa voix me fit sourire. J'avais l'impression de ne pas l'avoir entendu depuis une éternité.
- Bonjour maman !
- Becky ! Comment ça va ? Il parait que vous êtes bloqués en montagne.
- Eh bien oui. C'est exact.
- Tu vas bien ? À chaque vous que vous appelez tu n'es jamais là alors je commençais à m'inquiéter.
Louis avait raison. Ma mère m'aimait beaucoup. Ça s'entendait dans sa voix. On entendait qu'elle se préoccupait de tout ce que je disais. Elle n'était pas comme toutes ces personnes qui posaient des questions par pure politesse sans vraiment s'occuper de la réponse.
- Oui je vais bien. J'étais juste très occupée ces derniers temps. J'en profite tu sais. Le mauvais temps commence peu à peu à se lever alors les avions vont sûrement repartir dans trois ou quatre jours.
- C'est génial ! Tu nous manques beaucoup à ton père et moi. Et puis tu loupes beaucoup d'école.
- Vous aussi vous me manquez. Et ne t'inquiète pas pour ça, Gabriel nous fait suivre quelques cours. Histoire de ne pas être trop perdus.
Je jetai un regard à ce dernier pour être sûr qu'il avait écouté. Il le sourit et replongea dans sa lecture.
- J'espère au moins que tu t'amuses.
- Oui, beaucoup. D'ailleurs dans cinq minutes on va aller visiter un petit château.
- D'accord. Je vais te laisser alors. Je t'aime.
- Moi aussi.
Je raccrochai.
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Loups
FantasyQuincay : 500 habitants. Parmi tout ce petit monde, Becky est tombée sur LA personne qui changera sa vie. Au milieu de secrets elle parviendra cependant à trouver son bonheur. Couverture : PandaRoux_54